dimanche, 07 mai 2006
XXV
« Ça ne s’invente pas : dans le grand Robert, Obock se trouve immédiatement après Oblomov. »
Que ces propos me soient tenus par un spécialiste renommé de Flann O’Brien, le professeur Seamus Waddington, aurait dû me mettre la puce à l’oreille. Pourquoi aussi tous ces messieurs imbus de Beckett étaient-ils d’aussi parfaits francophiles ? Pourquoi le professeur Waddington avait-il, sur ses rayonnages, la même édition du grand Robert en douze volumes que mon beau-père ? Pourquoi m’étais-je embarqué pour les Etats-Unis, pour la première fois de ma vie, dans le seul but de glaner quelques conversations pour mon grand livre de souvenirs consacré au centenaire de la naissance de Beckett ? Pourquoi le grand-père de ma compagne, mort trois ans avant que je la rencontre et que je n’ai conséquemment pas connu, disait-il qu’il se « burclait » les mains avec son Opinel ? Quelles vaines chimères poursuis-je dans ces pages ?
Avoir un petit vélo dans la tête : cette expression, dont notre spécialiste mondial de l’incongru, Pierre Jourde, semble faire peu de cas, m’évoque The Third Policeman, délicieuse pochade métaphysique et roman d’espionnage littéraire de Flann O’ Brien. Sur la métaphore du cycle dans l’œuvre de Flann O’Brien, le professeur Waddington est intarissable. Il me rappelle un immense ours en peluche, qui me fit m’exclamer, un jour d’août 1992, à Londres : « C’est de l’orange ! »
Il n’est guère question de bicyclette dans les poèmes de Paul Eluard, mais, en ce jour d’août 1992, j’avais acheté, un peu par hasard, sur la foi des quatrièmes de couverture, plusieurs livres d’un auteur sud-africain alors inconnu de moi : Breyten Breytenbach. Le monde peut s’effondrer dans l’onde, et, sur les rivages de la Tamise, nous nous sommes tant aimés.
Je devrais prendre des notes, au lieu de divaguer. Je devrais me concentrer sur les prolixes débordements du professeur Waddington. Le chagrin lâchait la bonde. Tout de même, je ne vois pas pourquoi, pour ce projet beckettien, je lirais les œuvres complètes de Henry de Monfreid.
………………
Sous la pluie d’avril, je m’éloignai, songeant que j’avais mangé mon pain blanc, car il me restait si peu de jours pour ne pas célébrer Samuel B., et le 13 mai encore était loin.
13:05 Publié dans Comment je n'ai pas célébré le centenaire de S.B. | Lien permanent | Commentaires (1)
Commentaires
Le nom de Seamus Waddington me semble trop beau pour ne pas être inventé. Et n'est-ce pas que toutes les notes mummiques citant le 13 mai sortent à 13 h 05 ???
Écrit par : fuligineuse | dimanche, 07 mai 2006
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