mercredi, 22 mars 2006
D’une belle équivoque de Beyrouk
« La fugue de Lolla m’a appris à tout attendre du nouveau cours des eaux. Elles peuvent rompre les digues les plus solides et aller dévaster les champs. La colère, la douleur m’ont longtemps empêché de regarder le miroir en face, de scruter les images crues renvoyées par le reflet des soleils qui passent. Mais désormais, il faudrait se laver les yeux, chasser les somnolences qui guettent et surveiller ! » (Mbarek Ould Beyrouk. Et le ciel a oublié de pleuvoir. Paris : Dapper, 2006, p. 75)
Crues : adjectif bifide, mais aussi nom commun.
Bechir, l’une des quatre voix du roman, évoque la rupture des digues, comme dans le célèbre poème d’Eluard (“Prends garde, c’est l’instant où se rompent les digues…”), et sous la plume vient ce curieux groupe nominal images crues renvoyées, dans lequel l’adjectif déjà riche de potentialités (cru au sens métaphorique de non cuit, ou de cruel, sanglant, brut) est suivi d’un participe passé. Le contexte aqueux invite le lecteur à voir dans ces “images crues” non seulement les visions brutes ou cruelles, mais aussi des images qui montent, eaux qui enflent, un fleuve chargé, en état de charrier.
Polysème à tout vent, dans l’œil du cyclone.
Du coup, le soleil se reflète et devient lui-même eau ; les yeux brûlants, sphères mimant la lueur de l’astre, doivent être lavés ; ces soleils pluriels sont des ors qui s’échappent de la répétition du son-graphème mais (Mais désormais).
Ainsi de suite.
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............ sans oublier Le Renard et les raisins, tous évanouis......................
06:40 Publié dans MOTS | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : TRES GRANDE MUSIQUE
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