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samedi, 01 avril 2006

Carrément casse-cannes (C.C.C.)

    Mes parents sont partis pour l'après-midi, avec mon fils, qui avait été très déçu, fin novembre, de ne pouvoir visiter que les jardins du château de Villandry. Les intérieurs ont dû rouvrir depuis la mi-février, et, même s'ils ne constituent pas le clou de cette visite, il y tenait très fort. Ils devaient essayer aussi de visiter les grottes pétrifiantes de Savonnières, qui ont l'air d'être une belle ringardise, ou un joli attrape-andouilles, une sorte de Musée du Lacet pour touristes désespérés, dont, en un mot, nous nous dispensons fort bien, c'était et moi.

Cela fait plusieurs jours que je n'ai pas composé de note un tantinet élaborée ; je ne sais ce que va donner celle-ci, si ce n'est que j'ai déposé quelques poissons ce matin sur deux ou trois blogs, sans compter les innombrables semblables animaux d'écailles et d'arêtes qui, de leur silhouette en papier, ont orné vêtements et murs, pour des jeux enfantins se rapprochant du cache-cache. Je me suis esquivé dans la matinée, pour le marché de la place Coty.

Cet après-midi, c'était et moi avons vu les navrantes installations du C.C.C. (navrantes, à l'exception du petit film tourné je ne sais où en Croatie par un vidéaste au nom légèrement serbo-croate lui aussi). On ne peut en sortir : l'essentiel de la production contemporaine, en matière d'installations, de vidéos, de travaux plastiques autour de modules, de jeux d'échos, d'environnements sonores, est d'une platitude et d'une ineptie à faire pleurer. Evidemment, le responsable du C.C.C. accueille le visiteur en lui proposant la brochure : à moins d'avoir les yeux rivés sur le blabla le plus souvent creux et jargonnant de ces artistes frustrés de ne pas être philosophes, il n'y a aucun espoir,  ce que praticiens et galeristes admettent eux-mêmes, de rien comprendre aux oeuvres exposées. Eh bien ! je refuse cela ! Je ne lis plus les notices et autres livrets d'accompagnement, ou alors après, pour vérifier*. Mais, si l'intérêt est de lire le petit texte farci de termes pentasyllabiques, alors il ne faut pas faire d'oeuvres : écrivez des livres et fichez-nous la paix avec vos machins dont vous admettez vous-mêmes qu'ils n'ont de valeur que par le discours qui les enrobe !

(Je vois vers où va cette note : le vieux débat de l'art contemporain, dont je suis, pour de très nombreux cas, un grand et presque incoditionnel adepte, mais dont j'aime bien pourfendre aussi les ridicules. (Il n'en manque pas, il faut dire.))

Nous avons parcouru la rue de la Scellerie, en nous arrêtant dans plusieurs des boutiques d'antiquaires, librairies anciennes, et même renouveler notre stock de thé dans le salon de cette même rue. Une flânerie de deux heures, de ci de là, dans le centre de Tours.

 

* D'ailleurs, en général, en lisant la notice a posteriori, je me rends compte que j'ai à peu près tout deviné du "sens de l'oeuvre", ce qui est mauvais signe, voire même que je suis allé imaginer telle ou telle "explication" qui est bien plus élaborée que la sauce conceptuelle à deux centimes du "plasticien"... J'ajoute, profitant de cette astérisque en guise de post-scriptum, que c'était vient de me lire un extrait du n°19 de la revue MAP (mouvement action plastique), au sujet d'Isabelle Lévénez, qui expose au C.C.C. une sorte de projection vidéo parfaitement insipide comme il s'en pond des quinzaines par jour dans toutes les écoles d'art plastique du monde. Je vous laisse apprécier cette citation qui vaut son pesant de cacahouètes :

Elle affronte l'indicible, réduit la grosse machine duelle (être homme être femme) en tralala lalère du devenir enfant, devenir homme ou devenir femme, devenir l'autre. [...] Si sa peinture devient sonore c'est pour mieux désigner le vertige, le trou ("les petites filles ont un trou par où s'échappe la mémoire") comme zones picturales paradoxales.

 

Outre que ce genre de balivernes peut se reproduire à l'infini (je suggère à l'auteur de ces lignes d'aller jusqu'à "la création du troulala à air de l'anusité crypto-vénale"), tout ici est entièrement démontable, tout argument réversible : en quoi le vertige est-il une "zone picturale paradoxale" ? Et je ne dis rien des trois premiers mots, qui, sous des dehors géniaux, sont un truisme de la plus belle eau, car on pourrait dire cela de toute forme d'expression artistique non verbale, et même, dans une certaine mesure, de tout ce qui relève de l'écriture. Dostoïevski, Berg, Delacroix, Bach, Mallarmé, le Caravage, Britten, Shakespeare, Soutine, Soulages, Dante, et tant d'autres... tous affrontent l'indicible...

18:40 Publié dans MAS | Lien permanent | Commentaires (12)

Commentaires

Cher MuMM, cette « note un tantinet élaborée » était fort agréable à lire, mais peut-être rédigée un peu trop rapidement.
Je n’ai pas retrouvé la faute de frappe « qdont » évoquée l’autre jour, en revanche, j’ai « traquer » (chacun son tour !) les coquilles qui traînaient dans ce message:
> « il n'y a aucun espoir, ce que » : faute d’espace, soit, mais faute quand même,
> « incoditionnel adepte » : caprice lexicologique ? Je ne pense pas, et ça n’a rien d’un poisson d’avril non plus…
> « voire même » : mon professeur de lettres, en première littéraire, m’avait entouré ces deux mots en rouge, sur ma copie, et avait ajouté en majuscules : « pléonasme ! » (qui croire ? Un agrégé de lettres ou d’anglais ???)

NB : n’y voyez rien de méchant, juste une petite revanche pour ma faute de déclinaison (IhreM Kopf) vertement reprise l’autre jour…

Écrit par : Aurélie | samedi, 01 avril 2006

Pour la seconde, il s'agit d'une coquille, et, pour la troisième, l'argument de votre professeur de français est convaincant. À vérifier... Pour le premier point noté, le passage entre virgules ("ce que, etc.") est une incise et pourrait figurer entre parenthèses.

Reprenons-nous les uns les autres ; je suis d'accord avec vous là-dessus !

Écrit par : MuMM | samedi, 01 avril 2006

Cher MuMM, lors d'un prochain passage au CCC, n'hésite pas à laisser un petit mot en ligne : j'aurai plaisir à te recevoir autour d'un thé ou d'un café... Nous ne sommes qu'à quelques pas de cette "institution".

Écrit par : Denis | samedi, 01 avril 2006

"Voire même" est de la même eau que "incessamment sous peu", me semble-t-il, à savoir un pléonasme, effectivement.

Quand à l'assertion "l'essentiel de la production contemporaine, en matière d'installations, de vidéos, de travaux plastiques autour de modules, de jeux d'échos, d'environnements sonores, est d'une platitude et d'une ineptie à faire pleurer", la question est de savoir d'une part quelle est la part en elle de vrai et de faux (ce qui est un indice de ma lecture en cours) (ou quel est le pourcentage d'"essentiel"), et d'autre part si les artistes, ou les oeuvres, qui constituent en elle la part de faux (par exemple, pour moi, Annette Messager ou Christian Boltanski, dont la plupart (sic) des installations sont très émouvantes), ne l'invalide pas totalement, non pas pas leur nombre, mais par leur qualité.
(il me semble que l'on avait déjà abordé un sujet voisin en discutant de la qualité d'un musée et des chefs-d'oeuvre qu'il abrite)

Écrit par : Philippe[s] | mardi, 04 avril 2006

Quant aux grottes de Savonnières, c'est assez pétrifiant, en effet.

Écrit par : Philippe[s] | mardi, 04 avril 2006

Ah ! Merci Philippe (et enchantée !) pour la confirmation de ce pléonasme.

Il n’y a rien de méchant à cela, MuMM, mais comprenez-moi : vous avez parfois souligné de deux traits rouges ou points d’exclamation, certaines fautes de mon anglais (encore bancal sous l’effet du stress..) ; par conséquent, relever un pléonasme dans les notes de mon (ancien) professeur semblait plus qu’im-possible/pensable, jusqu’à dimanche dernier, où Avril vous a fait déraper… !

Quant à vous, Philippe, je ne vous pense pas capable d’une telle faute, puisque vous êtes suffisamment doué pour démasquer les pléonasmes de MuMM, mais relisez-vous tout de même : QuanT à l'assertion ??? (A bon entendeur, hein !!)

Écrit par : Aurélie | mardi, 04 avril 2006

Chère Aurélie, je me demande s'il ne faudrait pas, en cette occurrence, tempérer votre ardeur corrective. L'expression "voire même" est certes parfois condamnée par certains puristes, il n'en reste pas moins qu'elle est utilisée depuis le début du dix-septième siècle, et qu'on la retrouve chez les meilleurs auteurs. Littré en cite de nombreux exemples ; celui-ci, emprunté au Dictionnaire de l'Académie : "Ce remède est inutile, voire même pernicieux."; cet autre, extrait des "Loisirs d'un banni", d'Arnault (1823) : "On s'y instruit de choses qui ne se trouvent pas dans les livres les plus graves, voire même dans l'Encyclopédie".

Écrit par : Stéphane | mardi, 04 avril 2006

Effectivement, mes « recherches » s’étaient tout simplement arrêtées à la remarque de mon professeur de français, lorsque j’étais en première…
Suite à votre remarque, Stéphane, j’ai bien peur que la mienne reste sans objet. Ce que j’ai corrigé est finalement acceptable, cela fait-il de moi une coupable ?

Écrit par : Aurélie | mardi, 04 avril 2006

Aurélie > L'écart par rapport à la grammaire, l'inventivité de la faute vénielle, etc., vous êtes bien placée, en tant qu'éminente linguiste, pour apprécier cela.

Merci à tous de faire vivre ce débat fertile, et à Stéphane de ces exemples : je serai donc l'Arnault du XXIème siècle, ce qui ne risque pas de me gonfler les chevilles !

Philippe[s] > question "essentielle"... Une exposition comme celle de Jean-Gilles Badaire, l'été dernier à Tours, est à même de compenser toutes les fumisteries de tous les C.C.C. du monde, mais il n'en demeure pas moins que ces fumisteries sont là... (Il y a un passage de notre commune lecture, vers novembre, qui est tout à fait éclairant sur ce point-là : *Rannoch Moor*, p. 662)

Écrit par : MuMM | mardi, 04 avril 2006

Sur "voire même": l'expression est souvent considérée comme fautive, et parfois non, elle est aussi souvent employée, y compris par de grands auteurs, et depuis longtemps ; il n'en reste pas moins qu'il s'agit de toutes les façons d'un pléonasme, "voire" signifiant "même".
La question est donc de savoir s'agit il d'un pléonasme toléré ou d'un pléonasme rejeté, mais en aucun cas de savoir s'agit il d'un pléonasme ou pas.
Pour le T, c'est une faute d'inattention, bien sûr...

MuMM> Je n'en suis qu'à mai 2003 dans ma lecture de RMoor...

Écrit par : Philippe[s] | mardi, 04 avril 2006

Il me semble que le Maître de Plieux traite magistralement la question qui nous occupe dans son "Répertoire des délicatesses". Permettez-moi de le citer :

"Voire même" est de longue date repéré comme un pléonasme par les demi-puristes, qui rappellent que "voire" signifie aussi "même". Chaque fois qu'on dit "voire même" dans une société un peu attentive à ces choses-là; on peut être sûr que l'on offre à quelqu'un l'occasion de penser que l'on s'exprime dans une langue fautive. Mais ce quelqu'un là se trompe; car à puriste puriste et demi, qui sait que "voire" n'a pris que tardivement (au dix-septième siècle) le sens de "même", lequel ne lui est pas "naturel". Il n'y aurait donc pas pléonasme.

A puriste et demi puriste double, cependant, qui pourrait faire remarquer que dans l'usage moderne "voire" est presque exclusivement employé au sens de même", ou plus exactement de "peut-être même"; et pas du tout au sens étymologique de "vraiment". Donc, s'il n'y a pas pléonasme de droit, puisque "voire" en fait ne veut pas dire "même", il y a bel et bien pléonasme de fait, d'intention, ou d'inattention, puisque "même" est bien ce qu'il signifie, presque toujours. Donc mieux vaut éviter "voire même", quoiqu'il ne soit pas bien méchant."

Écrit par : Stéphane | mardi, 04 avril 2006

J’étais loin de soupçonner, dimanche, que cette remarque allait déclencher tant de commentaires, et pensais que celle de MuMM (« À vérifier... ») allait clore le débat.
Mais votre éclairage étymologique, Stéphane, répond bien à une question, qui m’a souvent intriguée…
Finalement, mon professeur de français connaissait-il lui-même l’étymologie ? Cette maladresse méritait-elle vraiment : qu’on l’entoure, un point d’exclamation, et « pléonasme » en majuscules ? Non, c’est sûr, il ne savait pas…

Écrit par : Aurélie | mardi, 04 avril 2006

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