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mardi, 25 avril 2006

XIII

    Dans sa biographie de Beckett, dont j’ai dit (méchamment et sans doute à tort) du mal, Deirdre Bair rapporte que, lors de l’ouverture de sa galerie à Londres, en 1938, Peggy Guggenheim avait exposé des œuvres de Geer van Velde, qui n’avaient eu aucun succès, si ce n’est que Beckett en avait acheté plusieurs “on the stuttering system”, soit, littéralement, selon le système du bégaiement, c’est-à-dire, dirait-on de nos jours, en plusieurs fois sans frais. J’aime cette expression, qui est très emblématique de l’écriture de Beckett (et aussi, certainement, de l’impression de dèche qui émane de plusieurs de ses personnages). Cette expression m’a aussi remémoré la très belle chanson de Dick Annegarn, Le blues du bégayeur, puis, de fil en aiguille, un garçon que j’ai un peu côtoyé à Normale Sup’, qui était gentil, subtil, incisif, et affecté, de surcroît, d’un bégaiement très contrôlé mais néanmoins perceptible.

Ce garçon avait mis en scène, en mai 1995, Fin de partie, une version très convaincante et très bien interprétée ; nous avions discuté à ce sujet deux ou trois fois, car nous étions, des huit « troupes » théâtrales de l’Ecole, les deux seules à utiliser la salle Dussane pour notre spectacle. La pièce qu’il montait, comme celle que je mis en scène (assez piteusement, dois-je dire), s’accommodait d’une scène minuscule, et nous n’étions pas mécontents de ne pas aller courir boulevard Jourdan, ou à la Cité Universitaire, ou allez savoir où encore, pour y installer nos accessoires et nos décors.

J’ai toujours eu l’impression que ce garçon (qui se prénommait Stéphan) ne m’aimait pas, ou qu’il se méfiait de moi, ou que je l’agaçais (toutes choses dont je ne pourrais lui tenir rigueur), et pourtant, comme je mettais en scène Architruc, il y avait, entre nos spectacles, d’autres liens que le lieu de représentation, puisque Robert Pinget était l’ami de Beckett, que Beckett traduisit au moins l’une des pièces de Pinget en anglais (il s’agit, je crois, de La Manivelle). Mais ma passion pour Pinget relevait alors du torrent (L’Inquisitoire, lu en hypokhâgne, m’a marqué à jamais) ou de la dissemblance (fou de Monsieur Songe, tout me différenciait de lui).

Commentaires

ah rosy arrose y arrose y arrose !

Écrit par : paul | mardi, 25 avril 2006

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