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vendredi, 09 décembre 2016

Sonnet 44 (Edmund Spenser)

    Ce matin, ma cinquante-huitième traduction improvisée a enfin touché à quelque chose que j'évitais soigneusement depuis mars : la traduction de formes contraintes. C'est l'achat hier, pour trois euros, du minuscule volume VIII des œuvres d'Edmund Spenser paru à Édinbourg en 1778 qui, me faisant découvrir les 88 sonnets de ce poète que j'admire (mais n'avais guère pratiqué récemment), m'a poussé à sauter le pas.

J'ai donc jeté mon dévolu sur le sonnet XLIV.

 

En effet, l'exercice est rude : c'est à peine si, en dix minutes, j'ai pu défricher le sens de ce poème et en proposer un premier brouillon. Trouvant l'exercice particulièrement frustrant, j'ai tout de même voulu ensuite tenter une traduction en vers et en alexandrins. Je ne suis que très partiellement satisfait, car la structure du sonnet spensérien (j'en parle dans la vidéo : abab/bcbc/cdcd/ee) n'est conservée chez moi qu'à condition d'accepter que les rimes en -able et -arpe assonent entre elles.

 

Quand en Grèce jadis les grands nobles illustres

Entêtés et fiers entre eux se disputaient

Oublieux de la Toison d'Or et de ses lustres,

Orphée, de sa harpe, mit fin à leurs forfaits.

Cependant, la guerre sans fin, impitoyable,

Qui de moi contre moi en moi-même se fait

— Tandis que ma puissance y faiblit, lamentable —

Rien ne peut l'apaiser, nul sens ne la soumet.

Mais que je prenne en main, désaccordée, ma harpe,

Je ne fais qu'aggraver le fiel des ennemis,

Raviver les douleurs, faire qu'enfin s'écharpe

En feux nouveaux mon moi contre moi insoumis.

Et plus je cherche entre eux à instaurer la paix,

Plus leur méchanceté de mordre se repaît.

 

(Traduction Guillaume Cingal)

 

Mise à jour de 18 h. Décidément peu satisfait de la traduction des rimes liant entre elles le deuxième et le troisième quatrains (et qui repose déjà sur une adaptation hasardeuse du schéma abab/bcbc/cdcd/ee en abab/cbcb/cdcd/ee), j'ai repris la traduction et viens de constater, du même coup, que le dernier mot du vers 7 que, dans l'édition de 1778, j'avais lu — en raison de mon manque de familiarité des caractères d'imprimerie anciens — waried (et interprété comme wearied, cf vidéo supra), est en fait warréd, donc le participe passé du verbe war avec diérèse (indiquée par l'accent aigu).

Je propose donc la nouvelle version ci-après :

 

Quand en Grèce jadis les grands nobles illustres

Entêtés et fiers entre eux se disputaient

Oublieux de la Toison d'Or et de ses lustres,

Orphée, de sa harpe, mit fin à leurs forfaits.

Là, la guerre sans fin, intestine et cruelle,

Qui de moi contre moi en moi-même se fait

— Tandis que mes passions faiblissent en querelle —

Rien ne peut l'apaiser, nul sens ne la soumet.

Mais que je prenne, désaccordée, ma harpe, elle

Ne sait rien qu'aggraver le fiel des ennemis,

Raviver les douleurs et remettre sur selle

En âpre lutte moi contre moi insoumis.

Et plus je cherche entre eux à instaurer la paix,

Plus leur méchanceté redoublant se repaît.

 

(Traduction Guillaume Cingal)

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