mardi, 24 janvier 2012
Karel Čapek : L’année du jardinier
Ce petit livre, que j’ai lu l’été dernier après l’avoir acheté – me semble-t-il – à Montolieu – sur la foi du nom de son auteur mais aussi des dessins très « anglais » qui l’illustraient, est un almanach parodique, un traité de jardinage à l’usage des bêcheurs amateurs, mais surtout des ironistes ou de leurs frères ennemis les nonsensicalistes (ainsi qu’on pourrait appeler la grande caste des limerickiens et autres pythonistes). Le lecteur risque de se lasser, car Karel Čapek abuse des mêmes formes rhétoriques (antiphrase, accumulation, prétérition) pour constituer ses répertoires saisonniers ; en l’occurrence, ce qui m’a le plus frappé, c’est que cet ouvrage donne l’impression d’avoir été publié sous forme de feuilleton, mais qu’à le lire d’un trait, le trait, justement, se renforce – au lieu de rester léger, à fleur de papier – et le charme s’évanouit quelque peu.
Comme j’étais à Cagnotte, chez mes parents, quand j’ai lu ce petit livre, je n’ai pas manqué d’y trouver de savoureux parallèles avec la folie potagère de mon père, ou avec la ferveur botaniste de mes deux géniteurs. Pour ma part, je n’ai hérité d’eux que le véritable amour des arbres fruitiers, donc des vergers. Même si c’est un hasard, je suis heureux d’avoir acheté il y a trois ans un pavillon de banlieue qu’entourent, tels de faméliques mais solides dieux tutélaires, deux néfliers, deux cognassiers et un prunier (d’ente). J’espère que, si creux soit ce billet (mais comment ne pas être creux, avec un texte de terreau ?), on me reconnaîtra le mérite d’avoir pris le temps de chercher, dans mon logiciel de traitement de texte, la majuscule Č, que je reproduis à l’envi maintenant que je l’ai dénichée (ČČČČ) et qui forme, outre la première lettre du patronyme de Karel Čapek, une sorte de silhouette rondouillarde évasée, jardinier dont le béret va jusqu’à s’involuer sous l’effet du soleil, du vent ou de la pluie, ces trois bienfaits calamiteux du jardinage.
Il sied de terminer cette brève notule par une phrase tout à fait séante, et qui forme, à l’ensemble, une temporaire conclusion :
« Il va de soi qu’au premier coup d’œil vous ne voyez du jardinier autre chose que son derrière : tout le reste, tête, mains et pieds, se trouve au-dessous. » (L’année du jardinier [1929], traduction de Joseph Gagnaire, 10/18, 2000, pp. 54-5)
15:35 Publié dans MAS | Lien permanent | Commentaires (2)
Commentaires
La dernière citation me fait penser aux cultivatrices de Victor Hugo.
Écrit par : Patrick | mercredi, 25 janvier 2012
Jeu de langage voisin de ceux que l'on trouve dans les échanges Musset/Sand.
Écrit par : MuMM | mercredi, 25 janvier 2012
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