« 2012-01 | Page d'accueil
| 2012-03 »
vendredi, 17 février 2012
Au cinquième jour
Nous savons que les vendredis
– Jours qu’en versifiant je maudis –
Peuvent ne valoir qu’un radis
Et, parfois même, pas la fane.
Les poètes, peu étourdis,
Même en comptant quatre jeudis
Et même experts de la chicane,
N’ont pas le droit, de la semaine,
D’allonger sur leur ottomane
Chacun des six qui rime en –dis.
On ferait tâter la tatane
À qui, du fond de son taudis
Ou, pis encore, de sa savane,
S’aviserait, sans Melpomène,
D’égrener ce collier profane
De journées au décompte insane.
C’est dans la fièvre des midis
Que, fuyant le salmigondis
De plats poissonneux et ourdis
Par des femmes en bigoudis,
Je célèbre, mégalomane
Et plutôt Leffe que tisane,
L’aise anodin des vendredis.
10:21 Publié dans Vénérales | Lien permanent | Commentaires (0)
F = Février
Après le froid glacial, paradoxalement les frimas annoncent le printemps. La grande terrasse nommée « dalle » est désormais sèche, pour de bon. Les textes les plus brefs sont les plus travaillés (voire).
08:55 Publié dans En/tiers (Triolets quantifiés) | Lien permanent | Commentaires (0)
jeudi, 16 février 2012
_ Where is love _
Assez de roturiers :
le kiwi pas mûr tord le boyau
balance de gauche à droite
allège allaite le fardeau
nie tout en bloc.
Donc
allégé j’écoute polyphonies colorées,
rien de fade, rien de pâle —
chérir jusqu’à l’obscurité ce qui se
hérisse en mélopées
existe absolument.
12:27 Publié dans J'Aurai Zig-Zagué, Zézayant au zénith | Lien permanent | Commentaires (0)
vendredi, 10 février 2012
Massimo Bontempelli : La Vie intense
« À mesure que toute cette humanade s’éloignait des portes qu’elle avait franchies, ouvragée par les arabesques des tramways et leurs désinvoltes volutes, blessée par les flèches cinglantes et rigides des automobiles, elle allait se pulvériser en un fourmillement toujours plus flou vers la ténèbre romantique du jardin, les tortueux engloutissements des allées, les feux cruels des deux rangées d’hôtels qui servent de coulisses à ce féroce décor. »
(Massimo Bontempelli. La Vie intense.
Traduction de Maurice Darmon. L’Arpenteur, 1990, p. 142)
Dans la petite bourgade de l’Aude (Montolieu) où l’on trouvait des distributeurs automatiques de fruits et légumes issus de l’agriculture biologique, se trouvent aussi nombre d’échoppes de bouquinistes. Toutefois, c’est à Auch, quelques jours auparavant, que j’achetai le volume de Bontempelli, lu dans la foulée, et donc, me semble-t-il, dans l’Aude, dans la chambre aux murs blancs, près de l’escalier sous voûte, le soir, en digérant les fruits et légumes issus de l’agriculture biologique. Que je trace mon chemin à pattes de mouche, en n’ayant encore rien dit de La Vie intense, c’est très bien, fidèle à ma méthode. On ne le croirait pas, ma méthode est terriblement méticuleuse, exigeante, dépareillée, une vieille maîtresse encore plus âprement séduisante d’aller de travers ou en crabe.
Donc, ce matin, sept mois après, du café et des tartines de miel dans le ventre, après avoir pelleté pas moins de trois campagnols morts que la chatte a ramenés cette nuit, je prends le volume dans la pile des livres-pas-encore-rangés-au-cas-où, et recopie la citation qui figure en épigraphe de ce billet. Et allez.
La Vie intense appartient à ces textes des années 20 qui cherchaient à travailler – au corps, au ras, jusqu’à sa perte – le genre romanesque. Le livre est une succession de dix « anti-romans » synthétiques, fictions extrêmement brèves qui penchent foncièrement du côté du loufoque (pas de l’incongru). Tant dans la revendication de formes romanesques « modernes » que dans la remise en cause du principe de fiction, La Vie intense m’a fait penser aux romans de Flann O’Brien, dont Nuruddin Farah avait bien vu – notamment pour At-Swim-Two-Birds (mais la démonstration pourrait s’étendre sans problème à d’autres (The Hard Life, The Third Policeman, The Various Lives of Chapman and Keats) – qu’ils étaient aussi profonds, aussi explosifs, aussi radicalement inventifs que les tentatives contemporaines de Joyce, Sarraute ou Broch. Les textes modernes qui se situent du côté du loufoque, de la remise en question de l’esprit de sérieux, me semblent d’ailleurs plus radicalement modernes que les autres, car ils fondent tout sur la porosité, non des genres, mais des tons. Sans doute est-ce la raison pour laquelle je préfère Beckett à Joyce : avec Beckett, on ne sait jamais véritablement de quel côté le texte donne de la voix, quel est le ton dominant… puisqu’il n’y a pas de ton (de tonalité ?) dominant(e). Pour en revenir à Bontempelli, son « roman des romans » est difficile à classer tout bonnement, tout uniment, au rang des textes humoristiques ou parodiques, quoique l’on ressente souvent l’esprit parodique même sans identifier le modèle (ainsi dans le récit du jeune homme qui souhaite lancer la mode de la pêche au chat, cf p. 107).
2770/3300
09:40 Publié dans 410/500 | Lien permanent | Commentaires (1)