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vendredi, 23 janvier 2015

Marge dans la voix

    Sur l'œuvre d'Ananda Devi, il faudrait écrire transversalement — je veux dire, reprendre les romans que je connais, lire ceux que je ne connais pas, tracer un itinéraire. En l'espèce, son dernier, Les Jours vivants, que j'ai lu à sa sortie, il y a plus d'un an, est sur l'énorme pile des livres que je n'ose pas encore ranger des fois que au cas où. J'en avais laissé passer facilement quatre ou cinq, et j'ai retrouvé son écriture mûrie, moins baroque, moins âpre, moins cruelle, plus classique peut-être.

L'histoire est très forte, par l'empathie du narrateur pour ce personnage de vieille dame murée dans sa mémoire, aveugle et sourde au monde extérieur, et qui se prend progressivement d'une amitié subreptice, qu'elle ne comprend pas elle-même, pour un jeune paumé des quartiers sensibles. Le basculement dans une sorte de fantastique très charnel, pas du tout “mystique” au sens où cet adjectif peut ressortir d'un kitsch rebattu, est savamment, lentement préparé par les premiers chapitres ; c'est aussi un très beau livre sur Londres. Au fil de son œuvre, Ananda Devi nous propose, mieux encore que Marie Ndiaye, un modèle paradoxal, car par force sans émules possibles, de récit marginal : récits sur des personnages rejetés, ou déjetés, écartés ou à l'écart, dont la voix narrative s'empare et se dépossède, dont le caractère insaisissable reste comme lancé.

Le sens de la marge est dans la voix même.

05:25 Publié dans Aujourd'hier, MOTS | Lien permanent | Commentaires (0)

jeudi, 22 janvier 2015

“Retourner à Florence”

Je retourne à La Phénoménologie de l'Esprit, perplexe. Après Thanatos au dictaphone, Eros en bottes de cuir... me fais l'effet d'un pantin que ce couple logique s'envoie tour à tour dans sa danse.

Vincent Eggericx. Mémoires d'un atome (2015), p. 25.

 

    Souvenirs de juin 2005, énorme bouchon parisien à chercher l'os, et création du blog ça juste avant. Cela fera bientôt dix ans que je tiens le coup, m'astreins à pondre — peut-être que c'est mon côté butineur, bordélique, le refus des systèmes, qui m'a permis de tenir aussi longtemps.

 

 

En raison du gel,

des déchets sont restés collés

à votre bac,

qui n'a pu être correctement vidé.

Merci de le présenter

à la prochaine collecte.

Tour(s) plus

09:03 Publié dans Droit de cité | Lien permanent | Commentaires (0)

jeudi, 08 janvier 2015

Mémoire de siamois

    Une histoire me revient, se dit le revenant, une histoire me revient depuis les lointaines lettres de Mozaya, l’histoire de deux frères siamois dont l’un perdit, un jour, la mémoire.

Kossi Efoui. Solo d’un revenant, 2008, p. 197.

 

 

Son vrombissement de 405 gasoil pourrave me tape sur les nerfs, c’est idiot, idiot à, écrire, idiot de le ressentir. Si je compose un abécédaire à la manière de François Bon, ce sera uniquement avec des mots français s’achevant par la lettre g, et il y aura dedans le siamang. Autre chose encore de resserrer les fils de mon essai sur la mêmoire (en allant chez le coiffeur ce matin je songeai à l’intituler Les Accents).

17:06 Publié dans Droit de cité, Les Murmures de Morminal | Lien permanent | Commentaires (0)

mercredi, 07 janvier 2015

Dose d’effroi

    C’est avec ces lettres qu’il m’arrive encore de remonter le temps, recherchant les indices qui m’auraient permis de mesurer, à leur juste dose d’effroi, ce qui allait advenir.  Comme une ruine soudaine, la saison des fuites allait advenir, la ligne de démarcation, la partition de Gloria Grande, cette guerre, le pays tout entier se recrachant par petits paquets de lambeaux…

Kossi Efoui. Solo d’un revenant, 2008, p. 79.

 

[Manuscrit, septembre 2013. Bordeaux, trams bondés. Les seuls qui se marrent ce sont les mascarons.]

 

 

Janvier 2015. Souvenir de février 2008, virée avortée à Arcachon et Bordeaux, tout affaire d’advenir et de revenant, il a fallu revenir, mon père est resté surtout enfin c’est le plus heureux. Souvenir d’Arcachon donc noyé dans le bleu, l’arc tendu, souvenir de Bordeaux aborigène en février 2014, souvenir de Bordeaux graffité de barbapapas grunge en 2005, souvenir de Bordeaux mascarons seuls à rigoler septembre 2013 et pour cause./

17:03 Publié dans Droit de cité | Lien permanent | Commentaires (0)

mardi, 06 janvier 2015

Sur le point d'arracher le clou

    Elle brûla le mobilier, elle brûla des milliers de livres, elle brûla toutes les toiles. Ce fut seulement quand elle fut désespérée qu’elle retira les Mucubais du mur. Elle était sur le point d’arracher le clou, simplement pour une question d’esthétique, car il lui semblait déplacé là, sans utilité, quand l’idée lui vint que peut-être ce bout de métal retenait le mur. Il sustentait peut-être tout l’édifice. Qui sait, si elle arrachait le clou du mur, toute la ville s’écroulerait.

Elle n’arracha pas le clou.

 

José Eduardo Agualusa. Théorie générale de l’oubli,

traduction de Geneviève Leibrich. Métailié, 2014, p. 93

14:30 Publié dans Droit de cité | Lien permanent | Commentaires (0)

lundi, 05 janvier 2015

Fermata 2015

    « L’arrêt de bus ne ressemble à rien. Une banquette en béton, deux lampadaires rouillés, une poubelle et une pancarte marquée FERMATA qui oscille dans le vent des montagnes. […] J’ai craché trois fois. Le chartreux n’a rien vu. » (Yves Bichet. L’homme qui marche, chapitre 14, pp. 114-5)

 

Un chat s’est glissé derrière la fenêtre de mon bureau, rue des Tanneurs.

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Son vieux cuir épais n’a dupé personne. Il a cliqué sur le déclencheur, et voilà une autre vue, un jour de Saint Valentin. Du grand n’importe quoi.

14:26 Publié dans Brille de mille yeux, Droit de cité | Lien permanent | Commentaires (0)