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samedi, 06 octobre 2007

Marin, momie

Rencontre avec Linda Lê. Le Livre, 5 octobre 2007.

 

    Chemin faisant, j’ai croisé une très jolie Vietnamienne, sapée à mort (c’est-à-dire vulgairement, sinon de façon commune), tenue à la taille par un garçon quelconque, et qui n’allait pas évidemment pas au même endroit que moi. En attendant que commence la rencontre avec Linda Lê, ma main à la chair mauve près des livres de Gracq, j’ai remarqué que les ouvrages de l’invitée du jour se trouvaient, sur les rayonnages, entre ceux de Laure et ceux de Léautaud. J’ai noté le titre d’un livre de Klossowski, Le Baphomet, mais aussi que le tiret séparait Louis de Combet, et non Claude de Louis, ce que j’avais toujours cru, de sorte que ce prolixe écrivain est classé à la lettre L, et non à C, comme je l’avais toujours pensé. (Il en est de même pour Roger Gilbert-Lecomte.)

 

« Un cri vite étouffé interrompt la sonate » (extrait lu, par Laurent Evrard, du Complexe de Caliban).

 

Les influences

« L’un des plus beaux mots de la langue française, c’est hommage. » (à propos d’une écriture nourrie par les lectures)

« Ce sont surtout les interrogations que la découverte d’un grand livre font naître en moi, un afflux de questions. »

Tsvétaïeva a su « résister à la tentation du silence ».

« Lire, c’est déchiffrer des oracles. »

 

À couteaux

Laurent Evrard suggère que l’obsession des lames et armes blanches (Laguiole d’In memoriam, Kriss, etc.) pourrait venir de Kafka ; Linda Lê renvoie plutôt au « virus du crime » selon Ingeborg Bachmann. (De proche en proche, on en vient à Uwe Johnson.)

À un point du débat, ou du dialogue (de sourds, parfois), je me demande comment on peut admirer Des Forêts (que Linda Lê prononce dévorez).

 

Une voix 

À propos de ses 3 premiers livres, qu’elle refuse de voir réédités et même mentionnés dans sa bibliographie : « Je ne les reconnais plus comme étant miens. Avec Les Évangiles du crime commence une voix qui, même balbutiante, est la mienne. Les trois premiers sont comme des photos floues. »

Kriss : « je ne pense plus écrire de théâtre. Je voulais revisiter l’histoire d’Électre en la replaçant dans la guerre du Vietnam. »

À la question que lui pose Laurent Evrard sur son style, et plus précisément sa phrase, équilibrée – selon lui – entre pros od ie classique et mouvement vers la m od ernité, Linda Lê répond que tout est dans le ton, dans le rythme. « On ne verse pas dans l’académisme en s’en tenant à une prose mesurée. »

Une dame lui demande si, parallèlement aux figures suicidaires de Tsvétaïeva, Bachmann mais aussi de Sola, héroïne d’In memoriam, elle a de l’admiration pour Danièle Collobert. Linda Lê ne l’a pas lue. Toutefois, ajoute-t-elle avec finesse, « j’aurais pu parler d’Unica Zürn ». « Même si ce sont des destins funestes qui suscitent de l’émotion, il n’y a pas non plus de tropisme vers les suicidées. »

 

Être ourdi 

À ma question sur la récurrence du verbe ourdir dans ses textes (ourdi / ourdit), et sur la possibilité qu’il s’agisse d’un terme symptomatique d’une oscillation ténue entre dissimulation et dévoilement, Linda Lê répond qu’il s’agit d’une belle métaphore de la littérature. « Même si Roger Laporte disait qu’il fallait se méfier de l’image du tissage, je me vois assez en tisserande. » Sola fomente des complots, dit Linda Lê, ce qui est, pour elle, salvateur. (J’entendais aussi, sous ourdir, des significations positives données à un verbe plus souvent péjoratif.) Sur la question de la dissimulation : « Un des textes qui m’ont le plus marqué quand j’avais vingt ans, c’est Kierkegaard, l’idée de tourner toujours autour d’un secret sans jamais le dévoiler, reconnaître qu’il y a un secret mais ne jamais livrer ce qui en est le fondement. »

 

(Replonge dans Les Murmures de Morminal.)

Commentaires

belle interrogation sur ce qu'est la littérature , est ce un corpus en mirroir de toutes nos charnière ou est un espace vide ou pourrait se glisser le plein en crissement de nos vie

Écrit par : aloredelam | dimanche, 07 octobre 2007

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