mardi, 03 avril 2007
23 autoportraits au bord du gouffre
Il nous défie.
Il s’efface, son manteau d’encre fait écran.
Deux visages spectraux hantent le fond de cette fière stature.
L’œil noir, les traits se diluent.
Orbites enfoncés font lunettes.
Placé debout dans une salle il épie.
La fine moustache de celui qui dessine sculpte un visage harassé.
De sa silhouette à contre-jour, toujours il guette notre regard.
C’est à regret qu’il se détache outremer.
Les manteaux accrochés, le fauteuil pour chevalet, la canne dans la ligne de l’aquarelle au mur, tout converge vers ces yeux profonds.
Épiant, il peint.
L’air mauvais, pianiste phtisique aux doigts endoloris, crache le sang de sa palette.
Un spectre en soutane tenant un chapeau rouge.
La lune rouge voue ce balcon à la folie.
――― Les rectangles glissent du ciel. ―――
――― C’est un linceul recouvrant les rêves. ―――
Un crâne agité succombe au succube hallucination.
Cadavre furieux toujours il nous défie.
Le voici revenu ; il reprend des couleurs.
De la casquette comme un masque.
Avec le sépia qui dégouline la tête semble arrachée au col et au manteau toujours noir d’encre.
Flottent couleurs lumière noyée les veines vibrent.
Respectable, en onze ans il a comme rajeuni, mais son regard foudroyé plus que jamais emprisonne le nôtre.
04:40 Publié dans MAS | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : Art, Autoportraits, Peinture, écriture, Poésie, Musées