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dimanche, 02 avril 2006

Visions d’avril, 4

    Dans un tableau lumineux et rouge qui pourrait être de Hubert Robert, le soupir du cerbère s’exhale. Refus valent exorcisme.

Il est seul. Quelle est sa quête ? Mains croisées, veines saillantes, le fou fait songer au Christ revenu.

………

Dostoïevski frappé d’aphasie (impensable). Kafka sans l’humour (difficile). Faut-il inventer le concept d’humour gris ?

(Ce n’est pas l’humour noir.) La jeune fille assise sur la chaise aux immenses barreaux se mord la lèvre inférieure d’un air apeuré. La toile du ciel plafond lui voit faire les cent pas, pendue au sol comme une revenante brûlante.

………

Don Juan n’écoute pas. La chambre s’est élargie, vaste comme le vaste monde. Le bruit constant de l’eau qui suinte et la peur lue sur les traits de la jeune fille composent le tableau échevelé où se perdent les voix. Rédemptions valent sacrifice. Il faut écarquiller les yeux.

22:06 Publié dans Narines enfarinées | Lien permanent | Commentaires (0)

Visions d’avril, 3

    Un monde gris, fait des tourbillons de fumée, des volutes de poussière que ne suscite même pas un Dieu vengeur. Voilà ce que je vois.

J’entends les heurts des embrasements, le jeune homme fou se cogne aux encoignures, une musique lente et pénétrante, douce, finit par fendre les tympans de ces ruines aperçues. Longue errance noire au milieu des pas pressés porte aux nues ta déchéance, si la syntaxe encore s’abîme, fruit talé par la grisaille.

Soudain, comme le corpulent barbu te violente au milieu du flux des passants masques de carnaval posés sur de tristes gouttières de poussière, me revient en mémoire cette scène répétitive et sans nulle musique d’un film de Sharunas Bartas.

Le grabat est-il battu par les vents dans la prison de l’âme, ou dicte-t-il ses confessions à de subalternes ombres ? Un manteau trop serré qui pétrit la silhouette défait l’espoir du fou. Le fou a chanté dix-sept fois. Il ne faut pas faire grincer sa plume, même pour la plus grinçante confession. Je me cache le visage avec un journal jauni, comme ça on ne me fera pas passer par le Pont des Soupirs. Notez six objets. On meurt pour moins que ça, dans le bourdonnement des mouches. Les yeux fous n’ont pas de paupières, à n’être glabres qu’au grabat. Ce n’est pas grave (dira-t-on).

Ce l'est.

21:48 Publié dans YYY | Lien permanent | Commentaires (0)

Visions d’avril, 2

    Folles et commis en tablier parlent russe.

De la fête frénétique asile de fous, la fille hystérique se jette dans le vide. À en attraper la jaunisse.

Je ne comprends pas ce que je vois.

Assis sur le grabat, le spectre oscille au rythme du pendule (sa douleur) ?

Elle, défunte nue, arrive au visage miroir lunaire, sans que l’éclipse totale du jour ne vienne émonder sa face. Je viendrai, bien sûr, je viendrai… Les voix se voilent, l’une à l’autre soustraites, comme si la trouée de lumière suffisait aux âmes pour s’invoquer.

Par l’oubli fermée, dans le cadre se fixe une longue suite de travées, ou de voûtes, ou de trouées de jour, de pourritures aqueuses qui dansent superfinement sur le fil tendu, funambule, de la toile.

21:34 Publié dans 721 | Lien permanent | Commentaires (0)

Visions d’avril, 1

    Murs gris, échelle, impression de pellicule d’avant-guerre (au sens large).

Colonnades, inondations, silhouette assise sur un escalier au bord de l’eau. Lent déplacement le long des arcades (je sourcille). Une voix dans l’obscurité, spectrale, fait figure de proue, appelle, invoque, donne un sens profond aux mystères de l’ombre. Tout s’échappe comme en un cauchemar les réverbérations du son contre l’ardoise.

Les voix ne sont pas les potences, avec lesquelles jouent les ombres.

Un masque s'éloigne de rien.

21:14 Publié dans Soixante dix-sept miniatures | Lien permanent | Commentaires (3)

Avant les visions d’avril, 0

    Après un repas sommaire mais succulent, composé d’une salade de riz complexe, de quelques tranches de pain tartinées des excellentes rillettes de Grégory Brion, avec, à l’arrosade, deux fières lampées de Marsannay Domaine Nicolas Theuriet, il faut bien perpétuer ou tenter de poursuivre les rites, d’où cette atmosphère de fer, ce silence de velours, cette langue qui s’éprend d’elle-même.

20:45 Publié dans 59 | Lien permanent | Commentaires (3)

Napoléon et l'étiquette (...)

Paris, 2 avril 1803

Au citoyen Marescalchi, ministre des relations extérieures de la république italienne

Vous pouvez écrire, Citoyen Ministre, au citoyen Melzi que la 16e de ligne se rend à Alexandrie, et que la 42e se rend en Italie, en place d'une demi-brigade que le général en chef enverra également à Alexandrie; cette réunion est nécessitée par les travaux extraordinaires qu'on fait aux fortifications de cette place ; que, quant à la désignation Milan, c'est une manière de s'exprimer du ministre Berthier, qui a désigné Milan comme point central de l'armée française ; il a voulu dire par là en Italie. Des ordres ont été donnés pour que cette demi-brigade soit employée dans les différents points de la République.

Comme la quantité d'occupations que j'ai dans ce moment ne me permet pas d'écrire à Milan, et qu'au milieu des grandes affaires que j'ai, toutes ces petites discussions d'étiquette et de querelles me fatiguent plus que l'on ne peut penser, je vous prie de lui dire confidentiellement que je suis toujours le même pour la République et pour lui, et que, s'il y avait eu un changement aussi notable que celui de mettre deux régiments en garnison dans la capitale, cela ne se serait fait que de concert avec les autorités. Mais, par Dieu ! recommandez-leur de bien vivre avec les agents français et avec Murat, qui vivra bien avec Melzi. L'union est nécessaire à tous ; et, s'ils ont le moindre attachement pour moi, chacun fera la moitié du chemin.

Source : Correspondance de Napoléon en ligne

19:00 Publié dans Hystéries historiées | Lien permanent | Commentaires (1)

Poissons d'avril à La Péniche

    La Péniche, où se tenait hier et aujourd'hui, dans une atmosphère de patronage bon enfant, l'exposition "Poissons d'avril", n'est pas un lieu très facile à trouver, car le portail se trouve dans un renfoncement de la rue du Docteur Fournier. Toutefois, le dit portail étant surplombé, pour l'occasion, d'un immense espadon rouge, je me dis que je vis en aveugle, d'être ainsi passé devant le lieu sans le voir.

La "Péniche" en question est une sorte de bâtisse rectangulaire en bois, de trente mètres carrés, assez semblable à un préfabriqué d'école primaire. Diverses œuvres piscicoles occupaient la cour et la petite pelouse ; les murs intérieurs de la "péniche" proprement dite étaient ornés de peintures, toiles, mobiles, objets, sans compter un grand carton à dessin avec diverses lithographies, et le petit film de Renaud Lagorce, dont le titre, déjà oublié, consistait en un jeu de mots sur "l'amer" /"l'amer". Le film, qui dure moins de quatre minutes, compte d'ailleurs parmi les réussites de cette mini-manifestation, avec sa mise en scène glaciale, son petit retournement prévisible mais digne dans sa cruauté. Il se trouve que je l'ai regardé en conversant avec l'acteur himself, qui m'a confirmé que la bouillie de poisson rouge qu'il sauçait dans la dernière scène était bel et bien de la soupe de tomates froide. L'acteur, dans le film, n'était pas sans me rappeler certains autoportraits de Man Ray des années 1925-26, alors que l'être en chair et en os debout à mes côtés n'entretenait en rien cette illusion. (Peut-être en raison de l'absence de noir et blanc dans la vie réelle ?)

Il y avait d'autres réussites, mais assez peu, somme toute, l'essentiel se réduisant à de gentils clins d'œil humoristiques, comme les billes qui, accrochées dans un arbre, devaient être scrutées au moyen de loupes sur lesquelles était écrite, au feutre, la formule "Poisson d'avril". Je n'ai pas retenu, ni pu noter, les noms des deux ou trois artistes dont le travail m'a paru plus intéressant, mais il faut dire que rien, là, ne respirait de quelconque prétention. Cela s'entend positivement, en ce sens qu'aucun de ces artistes ne prétend à lui seul réinventer l'art moderne et la philosophie occidentale, à l'inverse des jean-foutre du C.C.C. (voir note d'hier), mais aussi de manière plus dubitative : comment, si l'on ne vise pas plus haut, espérer construire une œuvre vraiment digne de passer à la postérité, ou de susciter l'intérêt par delà sa paroisse ?

Dans la rue du Docteur Fournier, plus loin, il y a un trompe-l'oeil assez réussi, dont je publierai prochainement une photographie, en nouvel hommage au site des Dessins muraux de Tinou. Il sert de décoration murale, mais aussi, en cela, d'enseigne particulière pour l'atelier d'un charpentier (mais je peux avoir mal compris, car je suis vraiment épuisé, ou lent du cerveau, en ce moment).

Nous avons aussi remarqué, à l'orée du domaine privé de la S.N.C.F., un curieux pigeonnier de bois, flambant neuf. D'après mon père, ces pigeonniers sont construits afin d'abriter les pigeons, de les y attirer, puis d'y récolter les œufs afin d'éviter que ne pullulent les bisets. Cela semble d'un machiavélisme bien dérisoire, mais, depuis que l'on a achevé d'exterminer la plupart des rapaces diurnes, en particulier les faucons pèlerins ou les autours, qui sont de grands chasseurs de colombidés, l'équilibre entre proies et prédateurs a été réduit à néant.

De retour à la maison, après un passage par la gare de Saint Pierre des Corps, où nous raccompagnions mes parents (et où leur train était finalement annoncé avec un retard d'une demi-heure), mon fils a aussitôt insisté pour que soit dûment découpé et accroché au mur son poisson bleu de Béatrice Ronfaut. (J'entretiens délibérément l'énigme.)

Entre quatre et cinq, même sans m'envier de thé, profitant du soleil qui donnait sur les cabriolets, quel plaisir j'eus à jouer, pour mon fils, le rôle du pilote d'avion... un pilote d'avion avachi et lisant les journées d'octobre du journal 2003 de Renaud Camus en écoutant l'Alceste de Haendel (une déception).

18:03 Publié dans YYY | Lien permanent | Commentaires (2)

An

    En avril, il faut promener le mandrill.

11:50 Publié dans Quel mois... | Lien permanent | Commentaires (2)