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samedi, 16 avril 2016

Cousu

    Le samedi, la circulation est ininterrompue. Les noisetiers, ciblés par la pollution, résistent bien que mal. Les chatons, allongés, hésitant entre le vert jaune et l'ocre, tapissent le trottoir défoncé. La musique qui s'élève est définie par le bruit, le fracas, métallique, est par nature insupportable. La musique qui s'élève des villes, métallique, est par nature insupportable.

Ce n'est pas toujours le sol fastidieux que je regarde. Dès que je regarde autre chose que le sol, on peut dire que je contemple que je scrute. Le sol, il faut faire preuve de beaucoup d'attention, au fond, pour le scruter, pour dire qu'on le scrute. Peut-on dire également d'un trottoir qu'il est cabossé ? Peut-on dire d'un chat tricolore qui s'échappe au loin dans un fourré, quand on se trouve sur la butte d'herbe au-dessus des petites maisonnettes, que sa vision furtive suffit à donner une autre valeur, une autre ampleur au sol ?

Sol. Sol.

Écrire un texte est décousu, c'est amplifier la métaphore de l'étymologie. Pourquoi faudrait-il qu'un texte soit cousu ? Un texte cousu, un poème cousu n'est-il pas forcément cousu de fil blanc ? Se payer de mots, c'est déjà se payer la tête de celui qui lit, par-dessus votre épaule, avec les saules fastigiés, le sol fastidieux, cela calembredaines, calembour, se payer de mots, se farcir la tête vainement, se payer la tête du lecteur.

Pourquoi un poème devrait t-il être poétique ?

18:36 Publié dans Élugubrations | Lien permanent | Commentaires (1)

Hérissons

Untung-untung

 

    16 avril 2014

Je voyage par les cartes.

Même les cascades du Hérisson me piquent.

 

16 avril 2016

Ces fameuses cascades, c'était en août 2013.

Mercredi soir, nous avons encore vu le hérisson, si tant est que ce soit toujours le même (repu, bien nourri, vif), s'arrêter au milieu de la chaussée, puis rebrousser chemin, se faufiler sous le portail de la maison d'en face, au 7. (Nos voisins, du 1 de l'impasse, nourrissaient un temps une pleine famille de hérissons, au point que G. avait apporté un ou deux de ces animaux aux responsables d'un refuge, car deux étaient mal en point.)

Being John Malkovich : encore meilleur que dans mon souvenir.

14:26 Publié dans Untung-untung | Lien permanent | Commentaires (0)

→35←

    sampangs déposés

posés ou plaqués

ratures d'accords

impossible souvenir torride

note d'aleph sous la bride

guetteur posté devant le tunnel du Somport

 

(Explication du projet ici.)

03:33 Publié dans Le terne XXIe | Lien permanent | Commentaires (0)

vendredi, 15 avril 2016

Mais ■ moire

Untung-untung

 

    15 avril 2012

Goz, Ion et Samaha Sam, vraiment, on n'en peut mais.

 

15 avril 2016

En ce moment, c'est plutôt Raphaël qu'écoute mon fils aîné, au point que je lui ai même emprunté, avant-hier, un live au Châtelet dans lequel se trouve une reprise d'Élégie funèbre si maniérée qu'il réussit à chanter nettement moins bien que Manset dans l'original (un comble).

La Mort d'Orion, “repiqué” (comme on disait alors) par ma tante pour la Noël 1991 à partir de son vinyle (on disait alors “33 tours”), n'est pas l'album qui a scellé mon admiration et ma fascination pour Manset, le mal était déjà fait (grâce aux Rendez-vous d'automne et Mauvais karma, dirons-nous pour simplifier), mais quelque chose d'y est ajouté, une palette supplémentaire à l'arc-en-ciel.

08:06 Publié dans MUS, Untung-untung | Lien permanent | Commentaires (0)

Ajardinir poisons

    Réveillé par une atroce envie de pisser.

(Je peux l’écrire c’est la vérité.)

Réveillé par une atroce envie de pisser, tout de même passé d’abord par la cuisine pour y mettre le café à chauffer. La gelée de framboises, le pot qui m’est réservé… on ne sait jamais, s’il était empoisonné… Le quignon en dame de Brassempouy, sacré, intouchable.

Démarré aussi l’ordinateur, la mise en charge du téléphone et de la batterie du Lumix (pour cette journée, à Chambord ?). Après avoir déchargé ma vessie, retour au bureau. Volets ouverts, les feuilles du néflier – elles doivent faire trois ou quatre centimètres maintenant, poussent sur chaque effloraison par paquets de quatre, cinq ou sept – innombrables me rappellent ce texte de 2014 laissé en plan, ou plutôt au repos, jamais repris, comme tant d’autres.

Le café n’est pas bon mais la gelée de framboise ne m’aura pas encore tué ce matin.

Hier, O*** m’a demandé, en lisant ou devant la télé, la signification des mots âcre et ajardinir. Pas d’autre souvenir, mais il y a eu d’autres demandes. Rhinocéros, ainsi que je m’en souvenais (étudié en seconde, pas vu depuis je pense (mais j’ai subi Délire à deux, par exemple, côté coulisses), est, comme tout Ionesco, trop long, dilué, surtout l’insupportablement interminable acte III.

Vendredi peut commencer.

07:09 Publié dans 1295 | Lien permanent | Commentaires (0)

jeudi, 14 avril 2016

Pluie

15 h 50

    Quand la pluie dévoile les vitres, elle les illustre. Quand la pluie dévale la pente, ce n'est pas nécessairement un torrent. Quand la pluie dévide l'écheveau, les fileuses de laine ont du souci à se faire.

Les palissades d'acier blanc composent une toile de fond artificielle à nos souvenirs. Le ballet des essuie-glace, monotone, monocorde, monochrome, ennuie même les piétons sur les trottoirs. La passacaille des marteaux-piqueurs, quand le soir est venu, on l'entend moins que les débroussailleuses et les tondeuses des voisins. On roule sur des rails, on file sur des fleuves, la crête de l'eau n'a jamais été aussi souveraine qu'avec cette pluie qui dévale.

Les parapluies ont des couleurs de plasma, l'évidence règne partout en maîtresse.

Ces tartines de pluie tarabustent la danse des tramways, aussi monotone et monocorde que celle des essuie-glaces, de sorte que l'on se prend à espérer l'été, à attendre la chaleur, quand la pluie même sera à l'orage.

Peut-on dire des tramways qu'ils sont monochromes puisqu'ils sont noirs, gris et blancs ? Les chicanes de l'avenue de la Tranchée sont moins perverses que celles d'un lecteur en embuscade. Le lierre n'en finit pas de dégouliner des pierres, et la pluie dévisage les passants. La pluie devise gaiement dans sa tristesse coutumière. La pluie défigure la ville en lui donnant l'allure, la silhouette d'un nouveau paysage.

La pluie n'est pas le lierre, elle qui dévoile de nouvelles facettes comme autant de nouvelles façades.

22:42 Publié dans Élugubrations | Lien permanent | Commentaires (0)

Loups

Untung-untung

    14 avril 2014

Les habitants de Cirey-sur-Vezouze s'appellent les Loups.

 

14 avril 2016

« Le général Moustache fait le beau dans quelque petite ville d’Allemagne ; il se pavane avec des femmes ; il prononce des discours. »

Le colonel Moutarde est passé par la véranda.

 

10:31 Publié dans Droit de cité, Untung-untung | Lien permanent | Commentaires (0)

mercredi, 13 avril 2016

What About Meera

Untung-untung

    13 avril 2015

Je vous avais parlé il y a quelque temps de ZP Dala, cette écrivaine tabassée en Afrique du Sud pour avoir dit du bien de Salman Rushdie la veille lors d'un festival littéraire à Durban. Visiblement, tout le monde en France s'en contrefout : elle n'écrit pas en français et ce n'est pas dans une ancienne colonie. (Idem les étudiants kényans massacrés à Garissa.)

Figurez-vous que j'apprends ce matin — et j'ai toutes les peines du monde à ne pas croire à un atroce canular — qu'elle a été internée dans un hôpital psychiatrique suite à son refus de retirer son hommage à Rushdie.

ON SE RÉVEILLE, LES GENS ! Nous vivons une époque absolument tragique.

 

13 avril 2016

Entre-temps, j'ai lu le roman de ZP Dala, What About Meera, qui est un bon roman, de facture un peu classique, très évidemment inspiré par Naipaul et Rushdie, peut-être, dans une moindre mesure, par le premier Ngugi.

 

(Ce billet devrait être publié dans Affres extatiques.)

16:36 Publié dans Pong-ping, Untung-untung | Lien permanent | Commentaires (2)

Poème des rives

Hier, vers midi moins le quart.

    Ils sont rares, ceux qui marchent sur l'herbe. Ceux qui se promènent en foulant le gazon. Il y a, dans cette pelouse qui longe le tramway, des traces de vélos, peut-être de motocyclettes, va savoir même si des rodéos de voitures n'y ont pas été improvisés.

Mais moi, au mépris des trottoirs, je foule le gazon, avec les pâquerettes et les boutons d'or, les brindilles tombées à terre, les branches des conifères, le long des rails. Il fait un grand soleil, et pourquoi ne pas fouler le gazon ? Le promeneur observe nécessairement les façades, les pigeons, les vieux champignons qu'a épargnés la tondeuse. Le promeneur pense à de nombreuses choses. Sa démarche ne peut pas être vide, c'est-à-dire qu'on ne sait jamais quelles pensées il roule.

On voit bien quel gazon il foule, mais sa pensée est inaccessible.

C'est un grand soleil d'avril, le soleil des trottoirs, des gazons, le soleil des conifères, le grand soleil des longues marches au soleil. Demain, tu prendras peut-être ton appareil photo, mais tes pas ne connaîtront pas le même balancement. Demain, ton pas connaîtra peut-être un même balancement — mais les boutons d'or, les plumes échappées aux pigeons ne seront pas les mêmes. Les brindilles auront changé de place. Les branches seront moins blanches.

Il est impossible que tu croises la même camionnette de la poste, ou les mêmes scooters, ce vigile grisonnant avec son dogue au même endroit. Ta marche se fera peut-être sous un soleil égal, mais des corbeaux se seront approchés, par un jour de plus, de l'été.

Et toi, le gazon, le verras-tu comme une étoile ?

09:47 Publié dans Aujourd'hier, Élugubrations, MOTS | Lien permanent | Commentaires (0)

→32←

    style (si c'est l'homme

pourquoi la ph

rase est-elle rase ?)

il règne un secret bouldegomme

naïade en pantalon pat'd'eph'

guère trop court, poème abrase

 

(Explication du projet ici.)

09:32 Publié dans Le terne XXIe | Lien permanent | Commentaires (0)

mardi, 12 avril 2016

Poème de la canette abandonnée

 9 h 10

Cette canette n'est pas cabossée. L'objet semble intact, vierge.

Elle a été abandonnée, la canette, à la lisière d'un carré d'herbe et d'un pan de bitume défoncé. Elle aurait pu avoir pour compagnie tel couvercle de bouteille de lait ou tel paquet de Philip Morris vide et écrasé, mais le destin stupide, ou le hasard, armé par le bras de quelque automobiliste dénué de conscience, en a décidé autrement. Elle gît donc près d'un grand portail de bois, qui ne me semble jamais être utilisé par qui que ce soit, et risque de demeurer là encore quelques jours, à moins qu'une âme charitable ne la ramasse pour sa collection de canettes de bière, encore qu'il s'agisse là d'un modèle tout à fait banal, ou pour la flanquer dans une benne, et ce sera peut-être moi.

 

18:15 Publié dans Élugubrations | Lien permanent | Commentaires (0)

→31←

    sac à manières difficiles

petit tas d'ordures

respecte au moins les

imbéciles

naïfs dandys, allez, oins-les

gâteux de tanguys-laverdures

 

(Explication du projet ici.)

09:32 Publié dans Le terne XXIe | Lien permanent | Commentaires (0)

Flingues

Untung-untung

    12 avril 2013

Quel est le point commun entre Sándor Márai, Hemingway, Goebbels, Nino Ferrer, Alice de Janzé, Patrick Dewaere et Potocki ?

 

12 avril 2016

Sans mauvais jeu de mots, faut avoir du cran, quand même, pour se foutre en l'air à l'arme à feu.

08:11 Publié dans Untung-untung | Lien permanent | Commentaires (0)

lundi, 11 avril 2016

L'oral nous a dépecés (?)

10 h 47 – 11 h 07

Écrire prend de nouveaux détours. Quand je passe près du portail vert, qui est entouré de trois poubelles différentes le lundi matin, je m'interroge aussi sur les raisons d'un vert aussi artificiel, quand tout autour bourgeonne, y compris les prétendus mauvaises herbes entre les murailles. Écrire donc est une nouvelle aventure. C'est une aventure aussi indéfinissable qu'infinie et interminable, comme ces myriades de déchets minuscules sur la chaussée, ces graines sur le trottoir, ces blocs séparant la chaussée du trottoir, les feuilles rouges des pyracanthas, tant d'autres d'arbustes et d'autres fleurs que je suis incapable de reconnaître. Écrire prend des allures plus ridicules que jamais, comme ces petits toutous imbéciles en ciment placés de chaque côté d'un portail.

Il faudra beaucoup corriger, beaucoup reprendre.

Losange jaune sur losange blanc, l'écriture n'est plus jamais prioritaire. Nous avons inventé de nouvelles formes d'écriture. L'oral nous a déplacés, nous a dépecés. Je passe près de l'arrêt de bus d'Alembert, et je sais pertinemment qu'écrire plus jamais ne pourra être encyclopédique

Tout ce qu'il va falloir reprendre. C'est vertigineux. Même devant l'usine Sanofi, il y a un emplacement pour taxi. Et un garage à scooters. Des garages à vélos. Des places pour handicapés dont la peinture est quasiment effacée. Je marche sous un ciel de traîne, sous un ciel gris, selon où mes pas m'entraînent.

Il va tout falloir reprendre, vaine entreprise. Deviner ce qui se trame. Loin de l'entrée principale, toujours à l'usine Sanofi, des dizaines et des dizaines de places vides. Ils auraient mieux fait de replanter une forêt.

Par un détour, je suis arrivé au trottoir cabossé, trame centrale de mon itinéraire. Je dois essayer de rester insensible à ce que je vois. Ou plutôt le garder en moi, le taire, tenter de parler d'autre chose. Tenter d'écrire autre chose. Écrire au fond, ce n'est pas une aventure. Si d'aventure je me projette dans un autre temps, je pourrais m'imaginer recevoir un télégramme d'Australie, par exemple. Les phrases qui n'auront pas de sens pourraient être effacées, ou complètement réécrites. L'écriture n'est pas la grammaire. Des lapins qui gambadent tristement sous un ciel de traîne. Je marche sous un ciel de traîne. Tous les mots sont, à un moment, confisqués à l'avance. Je croise des rues dont les plaques ne me disent rien, ou, plus précisément, dont je ne connais pas du tout celui ou de celle qui leur donne son nom.

Une ferme au milieu de la ville. Aussitôt on est tenté par l'allégorie. Il faut savoir résister à l'allégorie. Si écrire est une aventure, ça doit être l'aventure de cette résistance à l'allégorie. Peut-on prononcer le mot allégorie pour se défaire de ce fantasme, de cette tentative repoussante, peut-on répéter le mot allégorie encore et encore, presque comme un mantra, dans l'espoir de chasser loin de soi l'allégorie ?

Je reviens à la ferme isolée au centre de la ville ; je reviens à cette ferme étrange, insolite, inquiétante. Depuis des années que je passe devant, je n'arrive pas du tout à imaginer ce qui se trame dans cette ferme, et je n'ai jamais vu d'activité extérieure. Par extérieure je veux signifier une activité qui se passe en dehors de l'enceinte de la ferme elle-même, bien sûr.

Je croise des gens qui promènent leur chien comme je promène mon écriture. Marcher, c'est donc écrire, sous le ciel de traîne ou pas, en gardant les yeux ouverts, et en essayant d'écrire sur autre chose que ce que l'on voit. Si je vois sur un trottoir un morceau d'écorce arraché particulièrement beau dans sa forme, je résiste à l'envie de le photographier, mais je résiste aussi à l'envie de le photographier par l'écriture, je résiste totalement à tenter de conserver cette écorce autrement que dans une vision fugitive, ou peut-être dans ma mémoire, et c'est ce travail-là que je dois tenter de faire, et donc ce texte n'est qu'une sorte de premier brouillon, de premier jet, de préambule, de prologue théorique peut-être. L'écorce ne doit pas devenir un symbole, un signal, un signe, aucune allégorie permise. À force de marcher tout droit, après avoir fait quelques détours, que je ne connaissais pas, l'écorce reste quelque part dans mon regard, dans la mémoire de mon regard, et elle restera malheureusement inscrite dans ce texte, même si ce que je voulais faire était le contraire. L'écriture n'est pas la grammaire.

Viens de passer tout près d'un poids lourd arrêté dans une cour, et je note ici avec quelque réticence ce qui est inscrit sur ce poids lourd. Transports Guillemet. On comprend désormais ma réticence. Là encore guette le risque d'allégorie de je-ne-sais-quoi. Mais je préfère justement donner cette piste afin d'effacer très explicitement l'idée qu'il puisse y avoir ici une tentation de métaphorisation de ce qui s'écrit par ce que voit le promeneur, et afin de noter que c'est là pur hasard, ce poids lourd est un poids lourd garé dans une cour.



11 h 07 – 11 h 11

Il s'est mis à pleuvoir. Pleuvioter plutôt. Je suis passé près de la rue de Reims, et n'ai pu m'empêcher, les turbines tournant en permanence, d'envisager que je pourrais me filmer en train de traduire un extrait de Retour à Reims. Il suffisait de se dire qu'il fallait tenter l'expérience de la promenade quotidienne pour enfin s'y résoudre, après de longues années à tergiverser, à ne pas le faire pour rester en famille, lire, vaquer, écouter de la musique ou tout autre prétexte stupide. J'ai tout de même fait quelques entorses à la règle de ne pas prendre de photographie, quand j'ai décidé de sauvegarder mon texte, et alors je me suis trouvé devant le centre de formation des apprentis, où j'ai pris deux photos de très mauvaise qualité, avec le smartphone, outil grâce auquel je dicte également ces textes.

 

11 h 11 – 11 h 15

Nouvelle entorse. Photographié rue de Picardie un transformateur avec une banderole danger de mort — rouge, bien entendu. Je ne m'étais pas avisé que je verrais autant de poubelles à couvercle jaune dans cette promenade. Je dis tout ça en vrac. Écrire est un vrac. Des thuyas formant une haie à moitié morte montant en une sorte de porche au-dessus d'un portail finissent par dévoiler une maison bien modeste. Autrefois on voyait régulièrement dans les villes, ou on croisait des fous qui parlaient tout seuls, qui beuglaient, qui vociféraient, et maintenant la nouvelle forme de folie consiste à parler à son smartphone, soit avec un interlocuteur absent, comme cela se voit (s'entend) souvent dans les transports en commun, ou, dans le cas qui est le mien, je dicte un texte à voix intelligible afin de le sauvegarder, ce qui est une bien plus grande folie, comme ne doivent pas manquer de le penser les gens qui m'entendraient, par exemple ceux de la résidence près de laquelle je passe en traversant un square que j'ai souvent vu depuis la voiture, mais où je ne m'étais jamais promené.

Il pleuviote toujours. J'ai renoncé pour l'instant à ce qui était le premier projet, à savoir marcher en énumérant tous les déchets rencontrés. Là, l'idéal serait bien entendu de tenter cette description exhaustive tout en ramassant la totalité des déchets, mais à ce moment-là ce ne serait plus du tout une promenade, mais une sorte de parcours du combattant en miniature.

 

11 h 22 – 11 h 27

Nouvelle interruption de quelques minutes. Il pleuviote de plus en plus fort. C'est plus de la bruine ou du crachin. J'ai voulu un petit peu voir comment fonctionnait mon podomètre. J'ai pu constater que j'avais fait mon 4000e pas en face d'une boîte aux lettres avec le nom Pompeigne.

À présent, je suis sur la voie de Narvik, sur laquelle je longe de longues barres d'immeubles blancs et gris, assez sobres et plutôt réussis ; j'ai fini par marcher sur la chaussée, par me décider à marcher sur la chaussée, car sur la droite il n'y a pas de trottoir, ou plus exactement le trottoir est entièrement herbeux, ce qui est d'ailleurs tout à fait de bon aloi, la raison en est un que je me mouillais pas mal les chaussures qui ne sont pas très adaptées, mais aussi que cette partie-là du trottoir est un véritable cimetière à merdes. C'est une bonne raison, je pense, de marcher sur la chaussée, quitte à faire très attention quand un engin de tonte passe, comme c'était le cas il y a quelques secondes. Écrire, est-ce cela ?

Si écrire est le mimétisme de nos actions, cela n'a pas grand sens, peut-être, d'autant que cela est très difficile. Grâce à cette vieille veste à capuche grise, que je ne mets jamais, je suis bien protégé de la pluie, il faut croire, étant donné que c'est dans les flaques d'eau que je m'aperçois qu'il pleut pas mal, en fait. La voie de Narvik devient désormais la rue de Narvik. Dans la transition de l'une à l'autre il y a un petit passage très étroit pour les piétons, ceint de hauts murs, bardé d'escargots sur le bitume, et c'est ici que je m'engage, et même que j'en suis déjà sorti, le temps de dicter ces quelques mots. J'ai donc quitté la voie de Narvik, pour rejoindre les maisons basses, que surplombe une grue en mouvement, jaune, comme les couvercles des bennes à recyclage, et je croise la rue Ferdinand-Fabre, un écrivain à ce qu'il paraît. Encore des tonnelles, des arbustes taillés de sorte à faire une tonnelle au-dessus du portail.

 

11 h 35 – 11 h 38

Je ne peux m'empêcher de me demander combien nous sommes, de par le monde, à faire précisément cela, à savoir écrire sans aucune fonction utilitaire directe, au moyen d'un logiciel de dictée, en marchant, ou peut-être pour certains en conduisant avec un kit mains-libres, que sais-je. Je me demande aussi comment je peux sortir de ce que je suis en train de pratiquer en ce moment même, assavoir une écriture tâtonnante, qui n'est pas une écriture bien sûr, et de ce fait même tâtonnante, brouillonne, imprécise, et tout à fait disproportionnée, par sa quantité, à son intérêt réel. Je me demande donc, ou devrais-je dire, je me suis demandé cela pendant l'interruption de cinq minutes peut-être, et j'en ai conclu que ce que je devrais faire, c'est la seule chose que je sais faire, au fond pour l'écriture, à savoir des textes que l'on va dire, par commodité, poétiques. Des poèmes, donc.

Je me suis aussi décidé à publier ce genre de texte, qu'il faudra nécessairement remanier un tout petit peu, ne serait-ce que pour corriger les erreurs ou les scories du logiciel, dans une nouvelle rubrique d'un de mes blogs, et qui s'appellera Élugubrations.

18:18 Publié dans Élugubrations | Lien permanent | Commentaires (0)

→30←

    saisissant le moment

parti marcher avec le nouvel outil d'éc

r

iture (

nouvel : tout est relatif)

gare au trop-plein d'erreurs

 

(Explication du projet ici.)

12:03 Publié dans Le terne XXIe | Lien permanent | Commentaires (0)

Hovhaness zébré

Untung-untung

    11 avril 2014

Vendredi, c'est matinée Hovhaness, et l'imprimante du bureau 45 se met en mode zèbre.

 

11 avril 2016

Alan Hovhaness a, très entre autres, composé une musique de ballet pour une adaptation de la nouvelle de Faulkner que j'enseigne au premier semestre en L1, soixante-sept symphonies, un poème symphonique pour orchestre et chants de baleines, un concerto pour harmonica dans lequel on peut remplacer l'instrument soliste par un hautbois (opus 114).

« Le zèbre, dans la crevasse, creuse un pavé de ses dents, les amours jaunes. » (2 juin 2006)

Ce matin, j'ai lancé un nettoyage de disque sur l'ordinateur de bureau qu'utilise surtout mon épouse : 2,96 gigaoctets.

08:06 Publié dans MUS, Unissons, Untung-untung | Lien permanent | Commentaires (0)

dimanche, 10 avril 2016

→29←

    sfumato naissant du jour

perlé d'avril dans la rencontre,

ramasse-miettes de l'aurore

illusoire pour quel amour,

nèfles devinées déjà mortes,

gambade ton squelette aux ordres

 

(Explication du projet ici.)

09:10 Publié dans Le terne XXIe | Lien permanent | Commentaires (0)

samedi, 09 avril 2016

←28→

    stationnée une semaine au même em

placement elle attendait

rencognée dans la pierre grise

il ne pleuvait pas mêmement

n'est-ce pas cette pluie de lait

guimbarde sur ton pare-brise

 

(Explication du projet ici.)

13:31 Publié dans Le terne XXIe | Lien permanent | Commentaires (0)

vendredi, 08 avril 2016

←27→

    si tu te rappelles

parfaitement ces années-là

raturant des pages, lisant

intensément Pepetela

noirs poèmes en asphodèles,

gamin et vieillard s'infusant

 

(Explication du projet ici.)

07:27 Publié dans Le terne XXIe | Lien permanent | Commentaires (0)

jeudi, 07 avril 2016

←26→

    sausage bassoon, j'en ap

prends le nom et aussi

résolument l'ex

istence — c'est comme en ap

née fumant ces gros ci

gares (mal au cortex)

 

(Explication du projet ici.)

08:24 Publié dans Le terne XXIe | Lien permanent | Commentaires (0)

mercredi, 06 avril 2016

←25→

    sous l'averse et déjà le froid

peut-être Baudelai

re ou Beckett 

immiscent dans l'œil bordelais

ni mémoire ni effroi

gueuloir à naviguer entre caveaux, rackett

 

(Explication du projet ici.)

21:21 Publié dans Le terne XXIe | Lien permanent | Commentaires (0)

mardi, 05 avril 2016

←24→

    souvent dans ce

planétarium

reste une danse

ineffable parfum d'arum

narthex aussi et caldarium

gueules d'étoiles en cadence

 

(Explication du projet ici.)

18:18 Publié dans Le terne XXIe | Lien permanent | Commentaires (0)

lundi, 04 avril 2016

←23→

    sautez, babouins et babouines

perdus dans vos épouillages

rarement dans nos villages

il fit de telles combines

nuages, vent et puis bruine

gamineries de passages

 

(Explication du projet ici.)

15:15 Publié dans Le terne XXIe | Lien permanent | Commentaires (0)

dimanche, 03 avril 2016

←22→

    soleil plein cette cour

perdue sous le ciel parisien

rien

il y a dans l'air qu'on se sent bien

neutre, sourd

guettant peu de choses, même rien

 

(Explication du projet ici.)

08:13 Publié dans Le terne XXIe | Lien permanent | Commentaires (0)

samedi, 02 avril 2016

→21←

    sporadique on part

pour Paris vous c'est vôtre

raison d'être

ignifuge à bon port

narguilé des boulevards

gares, tickets et rencards

 

(Explication du projet ici.)

10:45 Publié dans Le terne XXIe | Lien permanent | Commentaires (0)

Harms

Untung-untung

   2 avril 2013

« Ce ventriloque ( dans la figure. ) a inventé le coeur artificiel , invisible porte-jarretelles , a grandi tilapia pour les Africains et pour les 30 ans, la voix du cavalier gay. »

Bon, si je veux lire la WP en russe, je vais devoir apprendre le russe.

 

2 avril 2016

Cela n'a qu'un rapport assez ténu, si ce n'est par l'association d'idées, mais je note ici que, parmi la multitude d'écrivains encore pas lus, figure Daniil Harms.

Il faudrait que je me secoue.

07:43 Publié dans Untung-untung | Lien permanent | Commentaires (0)

vendredi, 01 avril 2016

→20←

    street-cred pour et par personne

poisson d'avril cinq à sept 

reste épinglé à ton set

intrinsèque sans tunnel

navigue le saxophone

guitare tais-toi bordel

 

(Explication du projet ici.)

07:48 Publié dans Le terne XXIe | Lien permanent | Commentaires (0)