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mercredi, 15 janvier 2020

17–Gruzman–Piano

 

    Les beaux jours reviendront. Pour le moment, c’est la nasse grise qui triomphe. Nommer n’est pas nominer, et si on prend le temps d’attraper le Gaffiot d’un auriculaire discret on verra que nos ongles n’avaient pas de raison d’écorcher le soleil. Dévaler, ahanant, la chair nue de l’arbre.

 

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dimanche, 12 janvier 2020

16–De Luca–Clavecin

 

    Le soir est tombé, la nuit tomba. Vos respirations n’avaient plus d’écho, dans le furètement interminable des chiens, sous la lune immense qui éclairait le parking du garage et les mégots, les canettes cabossées qu’on ramasse tous les dix ou trente mètres.

L’obscurité n’était pas à même de vous envelopper car il y avait toujours un lampadaire, un éclair de lune, des phares de voiture, dans cette banlieue vague où ramasser des mégots pour les flanquer à la benne était une occupation comme une autre, en attendant l’effondrement.

Savez-vous que j’avais sué sang et eau, savez-vous que j’avais pleuré, mais que l’angoisse sous la lune immense avait fini par refluer, perdue dans un recoin de la mémoire ?

Vous ne le savez pas, vous ne l’avez pas su. La nuit s’est rabattue comme une poignée de terre géante puis comme un couvercle de pierre.

 

19:05 Publié dans lactations : déSastre | Lien permanent | Commentaires (0)

15–Weigel–Piano–Souter–Clavecin

 

    Trois catalogues, donc trois combinaisons différentes de nombres et d’attributions, donc trois ordres différents, donc trois possibilités différentes d’articuler et même d’écrire, de composer, trois compositions  radicalement différentes à partir des 555 pièces, soit 1665 textes virtuels, et même, avec les interprétations, les trois types de clavier et ça sans compter les transcriptions, on pourrait même aboutir à 4995 textes, un livre de deux millions et demi de signes, je ne vois même pas ce que ça donne imprimé ou relié.

 

16:44 Publié dans lactations : déSastre | Lien permanent | Commentaires (0)

14–Ross–Clavecin

 

    Bondir, puis rebondir, tressauter puis ressauter, bondir puis tressaillir, infinir, ne pas finir, reprendre, bondir rebondir bondir et sauter tressauter, infinir, ne pas savoir où finir, pas comment finir, aller gaiement doucement, légèrement, primesautièrement, primesautier, primesauter, primebondir, rebondir, tressauter puis Cléombrote con(mp)te tressaillir

 

14:43 Publié dans lactations : déSastre | Lien permanent | Commentaires (0)

13–Little[1]–Virginal

 

    Quand le ciel bleu pétrole s’était strié de rose, je me dirigeais à l’aveuglette vers la rue jonchée de fragments de polystyrène, signe qu’on ne pourra jamais faire changer les choses ni les gens et qu’on mourra dans pas si longtemps engloutis sous nos saloperies, et nos pyrocumulonimbus.

 

[1] David Clark Little.
https://www.youtube.com/channel/UCZE_-n_f5Fs615Vh_u2ZZ7A

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12–Colombo–Clavecin

 

    Ce fantasme des journées de 72 heures, ces appels constants – en-dedans – au surnaturel, qu’est-ce que cela peut bien signifier ? L’insatisfaction n’est pourtant pas le mot qui désignerait le mieux l’état d’âme du coureur arrêté. La main court sur le clavier, mais jamais aussi vite que celle du claveciniste. Presto, ce mot choisi aussi pour traduire soon, il y a bientôt vingt ans, non, il y a plus de vingt ans, dans un poème de Kojo Laing. Le coureur arrêté pourrait se dire preste, se décrire ainsi, au moins virtuellement, il aura fallu tracer ces signes en moins de trois minutes, alors ce n’est pas d’arrêt qu’il faudrait parler, de vol façon faucon crécerelle peut-être, on en a tant vu à Toussaint au retour du Poitou. Ou le rouge-gorge écrasé coincé dans la grille. Partir dans tous les sens, si fabuleuses journées de 108 heures…

 

11:15 Publié dans lactations : déSastre | Lien permanent | Commentaires (0)

11–Michelangeli–Piano

 

    Se recueillir, de sorte que le temps passe moins vite que l’espace autour de soi, c’est ainsi qu’en levant les yeux ou en faisant trop souvent, rapidement, l’effort de pencher la nuque vers l’arrière – afin d’étendre du linge par exemple – ma vue s’obscurcit et je suis pris de ce que je nomme, faute de mieux, des vertiges. Je dois ralentir l’activité déjà poussive, mais je continue d’étendre le linge, par exemple, à moins que je ne sois obligé de m’asseoir par terre ou de me plaquer contre le mur, impression de fin de tout.

 

10:09 Publié dans lactations : déSastre | Lien permanent | Commentaires (0)

10–Jandó–Piano

 

    On dirait que je courais, on dirait que je courrais, on aurait dit que je courais et je cours, et je cours si vite que je risque de manquer de souffle, et jamais pourtant je ne manque de souffle, il faudrait toujours que je sois au-delà du but à atteindre mais ça ne se passe pas ainsi, on ne dirait jamais que je cours, je me traîne, tel.

Le bruit s'en répandit

 

09:00 Publié dans lactations : déSastre | Lien permanent | Commentaires (0)

9–Barenboïm–Piano

    Difficile de s’y tenir, d’y tenir, de se tenir à l’écriture et de tenir à la vie. Le chat, bientôt dix-huit ans, qui règne sur le rond-point, passe nonchalamment d’une haie à l’autre, ne se soucie pas de sortir les griffes pour rien quoique son œil s’avive soudain au vol bas d’un moineau.

 

07:46 Publié dans lactations : déSastre | Lien permanent | Commentaires (0)

vendredi, 03 janvier 2020

8–Hantaï–Clavecin [1]

 

    Volets ouverts enfin, pourtant neuf heures vingt, maison encore sans bruit, maisonnée endormie, même grisaille grise que les jours précédents, l’année commence sous ces auspices gris, ces déboires d’une grisaille sans partage. Décrire les troènes. Non. Décrire le prunier couvert de lierre, déplumé de ses feuilles. Non. Décrire la tourterelle qui trottine sur la terrasse grise. Non. Tout cela ennuie, n’enlève rien aux images cauchemardesques qui ne cessent de peupler les heures de veille. Humeur sombre, tonalité obscure des jours gris. Quand écrire ni décrire n’a plus de sens, de direction, et on écrit quand même impuissant à subir seul cette grisaille, jusqu’à la minute, qui ne change rien au fond, où le soleil apparaît entre les cheminées par-dessus les tuiles, offre un fond de ciel jaune pâle aux dernières feuilles du cerisier.

 

[1] Texte écrit pendant les 3’44’’ de la sonate, sauf la première phrase, qui avait été ébauchée lors d’une première écoute flottante de Hantaï. Interruption par le lever de C*, justement. La minute où le soleil apparaît, c’est 9 h 37, quelques instants après. Après la fin des 3’44’’, juste retranché un ou deux mots brefs et 2 virgules (qui facilitaient pourtant la compréhension), astuce trop habituelle pour « descendre » au nombre de signes requis, ici 29 au carré donc.

(Cette note a été aussi rédigée pendant 3’44’’, troisième écoute de cette même sonate dans cette même interprétation captée par une chaîne de télévision espagnole, trouvée sur la chaîne YouTube Felices Cantus.)

12:47 Publié dans lactations : déSastre | Lien permanent | Commentaires (0)

7–Guitares–Roldan

 

    Volets encore fermés, il ne faudrait pas réveiller la maisonnée, et d’où vient que ce mot de maisonnée toujours triomphe sur maison, par affèterie ou par recherche du terme juste, et d’où vient que ce mot d’affèterie si souvent s’impose, et d’où vient ce flux continuel de mots, comme de notes, volets fermés, d’où vient mon désarroi autant que l’impulsion d’écrire. C’est bien vilain, l’impulsion d’écrire. Pas d’italiques, vous ne saurez pas si c’est l’expression ou ce qu’elle désigne.

La danse en trois actes n’a rien épuisé.

[1] De temps à autre, on s’autorisera une petite sortie de piste, avec des adaptations. Aussi écouté la version de Scott Ross, deux autres pour clavecin, pas convaincantes.

11:45 Publié dans lactations : déSastre, Les Murmures de Morminal, MOTS, MUS | Lien permanent | Commentaires (0)

6–Larrocha–Piano  

 

   Dans les yeux du dedans les oiseaux et les insectes calcinés d’Australie. Intenable, invivable, épouvantable. Le brasier qui crame et s’élève en cendres plus nocif que jadis le volcan islandais. Une idée inimaginable, insupportable. Aligner des adjectifs ne changera rien. C’est pour tout ça qu’on avait cessé d’écrire, qu’on cessera d’écrire 2 fois sans répondre. Plantes grillées.

 

10:43 Publié dans lactations : déSastre | Lien permanent | Commentaires (0)

5–Ross–Clavecin

 

    Volets encore fermés, il ne faudrait pas réveiller la maisonnée, donc pas voir ni la grisaille ni le jour qui a dû se lever, pas voir la terrasse grise ou blanc sale, ni la haie ni la maison voisine, pas la mangeoire qu’il faudrait réapprovisionner, d’où vient qu’on craindrait la pénurie.

 

09:43 Publié dans lactations : déSastre | Lien permanent | Commentaires (0)

jeudi, 02 janvier 2020

4-Long-Piano

 

    Le jour se lève, et avec lui la grisaille des journées. Toujours cette douceur sure, ce goût de n’y-revenez-pas, sans que ce soit non plus la saveur du fruit défendu, à enchaîner les minutes, à égrener les pages ou les pattes-de-mouche, comme quand soudain se lève une infirme : elle voudrait marcher, s’élance et parvient de fait à passer le seuil.

Malgré ses œils-de-perdrix, comme elle y va !

Elle fait le tour du miroir d’eau, elle gambade, elle file le long des statues de style gréco-romain, et comme elle est loin déjà ! Méfiez-vous de ces mourants qui n’ont pas expiré, de cette terre brûlée, de ces essences cramoisies (quel bonheur d’employer l’adjectif dans le sens que je croyais être le sien quand j’avais huit ans), et de la fuite des ans comme du travail de couturière des nombres.

Et l’infirme a même fait se lever le soleil.

 

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mercredi, 01 janvier 2020

3–Pletnev–Piano

 

    Le vent se lève, vient en aide quand il ne détruit pas.

Faire un pas de côté, deux pas encore, et la danse se poursuit dans les ombres. La danse se poursuit dans les nombres. Le vent danse des nombres au creux des ombres. Et le creux se creuse, encore, en cavatine.

Est-ce que tu auras fini l’année en mai, à ce rythme ?

Oui, à ce rythme, ce serait déjà le 19 mai qu’on entendrait – dans le vent, avec les reprises, les ombres, les nombres – la dernière sonate.

Au loin le désert, les larmes de pierre.

Le vent se lève, à point nommé.

(429/529)

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2–Ross–Clavecin

 

    Il pleut, il pleuviote, temps grisouillard, tristounet, de quoi ne pas se débarrasser de son humeur grise, triste. Pourtant la main bondit sur le clavier, allègre. On embarque pour un voyage en nacelle, à simplement observer les tourterelles. Pourquoi faudrait-il que quiconque le sache, vous admire d’en bas ?

Le vent cessa tout à fait

Et la chaise gît renversée sur le ciment gris.

 

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1–Pogorelich–Piano

 

    Ce matin le chat des voisins est entré, à mon invitation, dans le salon. Je lui ai souhaité une bonne année. Il a dix-huit ans, soit dix de plus que Séhune, la nôtre, qui est morte il y a huit semaines.

Le chat a fait un tour, est ressorti sans mot dire.

Il restait à former quarante signes.

 

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