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mercredi, 19 octobre 2016

Du gourbet

Untung-untung

    19 octobre 2015

Allongé dans les oyats, rêvant tête contre le milgru, mes courbatures à la brassée du gourbet.

 

19 octobre 2016

Pas près des dunes landaises, où fleurit l'oyat, ni à l'époque où il fleurit, je traîne sur le sable du Web :

Diverses espèces de convolvulacées rampent sur le sol et, fixant de distance en distance leurs vigoureux cordages, enveloppent parfois une dune entière dans leur réseau de feuilles et de fleurs. (Élisée Reclus)

18:01 Publié dans Droit de cité, MOTS, Untung-untung | Lien permanent | Commentaires (0)

mardi, 18 octobre 2016

Fourchage

Untung-untung

    18 octobre 2010

Brice Hortefeux gaffe (ou fourche) en parlant de « fichier des empreintes génitales ».

 

18 octobre 2016

Mes doigts se promènent sur le clavier, trop tôt, encore dans la nuit, le cadet s'étant — inexplicablement et pas trop silencieusement — levé à 3 h 30. Dans une semaine on ramassera les feuilles avec le grand balai à foin.

04:50 Publié dans Minimalistes, MOTS, Untung-untung | Lien permanent | Commentaires (0)

dimanche, 16 octobre 2016

Face à ce qui se dérobe

    Je n'avais jamais lu Face à ce qui se dérobe.

« Une fonction n'avait plus envie de fonctionner. »

Or, hier, hors de cour, j'ai enchaîné. Enchaîné, c'est difficile. Quel texte, quels textes. Comment Michaux donne, non l'envie d'avoir le bras cassé — ni les 27 os de la main ni rien d'autre, ce n'est pas là que ça se joue —, mais la perception de ce qui se trame dans un corps, ce qu'on ourdit, ce qu'un individu seul machine pour prendre corps, pour être aux prises avec sa propre machinerie.

On ne peut pas lire ça à la dérobée.

La musique si particulièrement échafaudée des pages sur la sanza (qu'il orthographie, même au singulier, avec un -s final) n'autorise aucune dérobade.

Peu importe que les microbes s'avancent en robe ; ce qui se joue n'est pas un jeu, mais telle musique, telle savante orchestration, exploration du trop-plein de sensations. Comment la langue de Michaux — comment quelque chose qu'il cherche à s'approprier et à nous jeter à la face, à regimber pour mieux nous balancer à la figure la cadence et la force des cinq sens — peut-elle encore nous surprendre ? (J'emploie ce nous comme lui, en majesté.)

« Musique, non comme langage, mais musique pour passer l'éponge sur les aspérités et les contrariétés de la vie quotidienne. »

Le sol se dérobe, bien sûr, mais le texte, qui se force, se fortifie, s'affermit, s'aplanit, s'agglutine, s'alunit, s'accroche et s'enroule, tout ça sur la langue, le texte qui se fortifie sur la langue avec la vigueur du corps en parole, ne peut se dérober. Le texte est là pour rempart. Le texte est là pour résistance.

Et toujours avec lui cette lumineuse impossibilité à croire qu'en tâtonnant, qu'en pariant sur le non délibéré, il ait pu tomber pile sur cette orchestration éblouissante (avec lui comme avec Dubuffet).

Et finir dans l'inachevé, sur « l'autre vie, la contre-vie ». Celle aussi que lui nous tend, comme un filet ou une corde.

 

09:19 Publié dans Les Murmures de Morminal, MAS, MOTS | Lien permanent | Commentaires (0)

dimanche, 25 septembre 2016

Pierre : Barrault ::: Tardigrade

    Des tardigrades, dont une très récente étude scientifique a démontré la résistance au vide spatial et fait miroiter d'étonnantes adaptations à l'être humain en condition extrême *, septembre nous a prodigué un échantillon littéraire, en l'espèce le petit recueil d'aphorismes — de notations, de récits brefs ? — de Pierre Barrault. “Tardigrade” est un mot qui a déja reçu ses lettres de noblesse, plus comme adjectif d'ailleurs (sous la plume d'About, de Hugo, de Michelet) que comme substantif (ainsi, encore pour Hugo, Sand ou le traducteur de Nietzsche en 1888, Henri Albert), et presque toujours sans rapport avec les singuliers animaux aussi nommés oursons d'eau, ce dont Barrault fait ses choux gras. Par un retour dont il ne faut être surpris, Barrault feint d'ailleurs, dès la couverture avec son dessin d'un tardigrade à chapeau melon, de concentrer ses forces sur la bestiole pour mieux faire oublier que le recueil est un éloge de la lenteur, de la marche pesante, de l'avancée alourdie... bref, de la tardigradité (if I may).

Il revient à chacun de se procurer ce livre et d'y trouver son compte — ou pas. Tardigrade appartient sans conteste à la lignée des textes incongrus dont Pierre Jourde a esquissé une généalogie dans Empailler le toréador. Dans l'esprit, il est cousin de Chevillard ; stylistiquement, il n'est pas loin (mais toujours à bonne distance (vertu de la tardigradité, sans doute)) de Michaux comme de Kafka ; dans la recherche quasi systématique du contre-pied, d'une vision du monde qui prend à revers, il lorgne plutôt vers Gripari...

Autant donner la parole au texte lui-même :

Mes arbres sont volontairement sans feuille et sans écorce, si bien qu'ils n'ont rien à perdre ou pas grand-chose. Ainsi du moins va-t-on tout de suite à l'essentiel. Quelques fruits tout au plus qui ne font pas semblant de mûrir. Pourris d'emblée. On gagne un temps fou. Ni porte ni fenêtre à ma maison dont les murs jamais ne s'effondrent et ne s'érigent pas non plus. Pas de toit, mais je suis en sécurité chez moi : on a beau chercher, on y trouve rien à saccager. Il arrive parfois que ma compagne soit enceinte, cela pourrait être un véritable désastre sans doute. Par bonheur, elle ne met au monde que de petits vieillards séniles et rabougris. En fin de vie déjà, pour la plupart, on sait alors qu'il n'est pas question de s'y attacher. Ne nous en laissent pas le temps de toute façon, titubent en grommelant à peine arrivés, nous maudissent une bonne fois, s'étalent pour de bon.

Tardigrade, L'Arbre vengeur, 2016, p. 60

 

 

* À se plonger dans le dictionnaire de Littré, il semble que la recherche scientifique ait beaucoup avancé depuis, et c'est heureux.

09:57 Publié dans Les Murmures de Morminal, MAS, MOTS | Lien permanent | Commentaires (0)

samedi, 17 septembre 2016

Espadrilles sans arpenteur

Untung-untung

    17 septembre 2014

Il faudrait ne porter d'espadrilles qu'absolument neuves, telles qu'elles enserrent parfaitement le pied. La pointure, une ou deux en-dessous, souvent, de votre pointure habituelle. Après un ou deux jours, parfois moins, l'espadrille se relâche autour du pied.

Cette mollesse, me dira-t-on, c'est la vie. Mais un pied chaussé n'est pas la vie.

L'espadrille est très à part — ce que j'ai écrit ne vaut que pour l'espadrille.

Tiens, ça me donne envie de relire Chaussure de Quintane.

 

17 septembre 2016

Ce matin, je découvre l'existence d'un forum Facebook aussi hétéroclite que foisonnant, semble-t-il, “Sur les traces de Robert Walser”. Quelqu'un a-t-il étudié l'importance du pas — comme du soulier — chez Robert Walser ? L'an prochain, fêtera-t-on le centenaire de Der Spaziergang ? Me mettrai-je enfin un jour à reprendre Memory of Snow and of Dust pour y débusquer la figure de Walser (et les échos des microgrammes dans Mouroir) ?

07:19 Publié dans Fall in Love, MOTS, Untung-untung | Lien permanent | Commentaires (0)

samedi, 27 août 2016

[ sans titre ]

    bientôt

ou dans longtemps

 

on te verra

tu te verras

de haut comme pris par un drone

 

en train de quoi

de lire ou de jouer

 

de grelotter de froid ou crever en sueur

sous les tuiles béton

ton œil là dans la brise

à ne plus rien pouvoir écrire ni maudire

 

tous projets avortés

ébauches toutes laissées en chantier en perdition

 

de haut comme surpris

par le grand œil de rien

repère sans contrainte et visage sans forme

 

dans longtemps

ou bientôt

 

08:05 Publié dans La 42e Clandestine, Le terne XXIe, Les Murmures de Morminal, MAS, MOTS | Lien permanent | Commentaires (0)

mardi, 24 mai 2016

2660 — De nos frères blessés

    Les éditions Actes Sud ont publié tout récemment un bref roman d'un jeune écrivain encore inconnu, et qui publie, apparemment, sous pseudonyme. Ce roman s'intitule De nos frères blessés et il s'agit d'un portrait extrêmement minutieux, très documenté, lyrique et emporté, du seul condamné à mort français de la guerre d'Algérie, Fernand Iveton. Iveton n'est évidemment pas le seul Français à être mort au cours de la guerre d'Algérie, mais il a été guillotiné, et c'est son parcours que Joseph Andras retrace dans ce beau récit.

Sur les massacres perpétrés par l'armée française, sur le rôle plus que trouble joué par le gouvernement de la Quatrième République (dont une figure, celle de François Mitterrand, ponctue le texte dès l'épigraphe), sur les ambiguïtés du Parti communiste et de l'Humanité, le lecteur déjà au fait de ce qui s'est passé d'atrocités et de compromissions pendant la guerre d'Algérie n'apprendra pas grand-chose. Toutefois, comme avec tout bon roman, tout grand roman, il n'est pas seulement question d'apprendre mais de pénétrer, par la langue, dans certaines mentalités et dans le déroulement d'événements tels qu'ils ont pu être vécus par un témoin malheureux qui se retrouve aux premières loges.

Le roman alterne longues phrases narratives et brèves phrases nominales descriptives, notamment du ciel ou de tel moment de la journée, non sans rappeler Jean Sénac, auquel toute prose lyrique d'inspiration algérienne fait immanquablement penser. Le roman alterne aussi, dans ses brefs chapitres, le récit de l'arrestation et des différents épisodes qui conduisent à l'exécution de Fernand Iveton, et celui du bref séjour parisien de ce dernier, quelques années plus tôt, peu après la Libération, quand il rencontra son épouse.

De nos frères blessés est une grande œuvre littéraire, non seulement parce que la langue de Joseph Andras tente de redonner un sens, sinon plus pur, du moins plus habité, plus construit, plus profond aux mots de la grande généalogie littéraire de l'engagement et du bras-le-corps, mais surtout parce qu'il ne cesse d'y inscrire la parole du peuple, et de s'inscrire en faux contre la langue artificielle et factice de la politique et du révisionnisme historique. Dans un pays qui a tant de difficultés à admettre tout bonnement la réalité de ce qui s'est passé, dans un pays sans cesse tenté par la fiction nationale, c'est le roman qui se trouve, paradoxalement peut-être, investi du pouvoir de vérité.

La prose de Joseph Andras pourrait être qualifiée de classique, au sens d'un classicisme nourri de nombreux auteurs contemporains ou presque tels (Gracq, Jauffret, Ndiaye) et non d'un académisme de pacotille. Entendre classique au sens d'un refus d'expérimentations qui paraîtraient peut-être, à leur auteur, gratuites. Il est à signaler, toutefois, que la dernière phrase du livre est inachevée et que le roman se clôt sur une virgule, quoi que je laisse à ceux qui liront ce livre la découverte de ce dispositif et de son sens, au bord de l'abîme.

11:23 Publié dans MOTS | Lien permanent | Commentaires (0)

mardi, 10 mai 2016

10052016 / 1222

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    Pas atteint au moment où, descendu chercher le courrier, j'ai fait un léger détour pour aller humer encore le lilas blanc du fond du jardin, lui dont la pluie, depuis hier soir, défleurit le parfum.

(Occasion de rappeler que, même en remettant à l'honneur le décasyllabe, Coppée — qui a partout ses noms de rue, et même à Tours un arrêt de tramway — fut vraiment un des pires poètes du dix-neuvième siècle.)

12:40 Publié dans 1177 pas, MOTS | Lien permanent | Commentaires (0)

mercredi, 13 avril 2016

Poème des rives

Hier, vers midi moins le quart.

    Ils sont rares, ceux qui marchent sur l'herbe. Ceux qui se promènent en foulant le gazon. Il y a, dans cette pelouse qui longe le tramway, des traces de vélos, peut-être de motocyclettes, va savoir même si des rodéos de voitures n'y ont pas été improvisés.

Mais moi, au mépris des trottoirs, je foule le gazon, avec les pâquerettes et les boutons d'or, les brindilles tombées à terre, les branches des conifères, le long des rails. Il fait un grand soleil, et pourquoi ne pas fouler le gazon ? Le promeneur observe nécessairement les façades, les pigeons, les vieux champignons qu'a épargnés la tondeuse. Le promeneur pense à de nombreuses choses. Sa démarche ne peut pas être vide, c'est-à-dire qu'on ne sait jamais quelles pensées il roule.

On voit bien quel gazon il foule, mais sa pensée est inaccessible.

C'est un grand soleil d'avril, le soleil des trottoirs, des gazons, le soleil des conifères, le grand soleil des longues marches au soleil. Demain, tu prendras peut-être ton appareil photo, mais tes pas ne connaîtront pas le même balancement. Demain, ton pas connaîtra peut-être un même balancement — mais les boutons d'or, les plumes échappées aux pigeons ne seront pas les mêmes. Les brindilles auront changé de place. Les branches seront moins blanches.

Il est impossible que tu croises la même camionnette de la poste, ou les mêmes scooters, ce vigile grisonnant avec son dogue au même endroit. Ta marche se fera peut-être sous un soleil égal, mais des corbeaux se seront approchés, par un jour de plus, de l'été.

Et toi, le gazon, le verras-tu comme une étoile ?

09:47 Publié dans Aujourd'hier, Élugubrations, MOTS | Lien permanent | Commentaires (0)

vendredi, 22 mai 2015

Santiago : Amigorena ::: Mes : derniers : mots

    Mes derniers mots — livre moins fort que les autres livres d'Amigorena. Finalement, avec inquiétude on se dit que le sommet de son œuvre, ce sera peut-être la trilogie, les trois premiers livres. On peut décroître, ou décliner. (Le Premier amour était très bien.)

Au moins, il prend le risque d'un virage, sur le sujet (roman d'anticipation, récit d'apocalypse ou du dernier survivant) comme pour la langue, la forme très sérielle.

Justement, pour le déclin, Mes derniers mots souffre, pour moi, de la comparaison avec Wittgenstein's Mistress, qui traite du même sujet — mais livre, pour le coup, génialissime. Amigorena a le mérite d'imaginer, et d'envisager des hypothèses. Il le fait en romancier, en imaginant un narrateur qui est le dépositaire de ces ultimes années, et en poussant un aspect paradoxalement utopique (reconstitution d'une utopie ultime à Athènes).

Dans un premier temps, ces générations obscures d'avant le dépeuplement ont fait succéder à la croissance une drôle d'idée qui prit plusieurs noms, parmi lesquels celui de « développement durable ». Il fallait croître encore, mais en faisant attention. (ch. XCV, p. 133)

 

Qu'adviendra-t-il lors de la conférence de Paris ?

Qu'adviendra-t-il ?

11:46 Publié dans MOTS | Lien permanent | Commentaires (0)

vendredi, 23 janvier 2015

Marge dans la voix

    Sur l'œuvre d'Ananda Devi, il faudrait écrire transversalement — je veux dire, reprendre les romans que je connais, lire ceux que je ne connais pas, tracer un itinéraire. En l'espèce, son dernier, Les Jours vivants, que j'ai lu à sa sortie, il y a plus d'un an, est sur l'énorme pile des livres que je n'ose pas encore ranger des fois que au cas où. J'en avais laissé passer facilement quatre ou cinq, et j'ai retrouvé son écriture mûrie, moins baroque, moins âpre, moins cruelle, plus classique peut-être.

L'histoire est très forte, par l'empathie du narrateur pour ce personnage de vieille dame murée dans sa mémoire, aveugle et sourde au monde extérieur, et qui se prend progressivement d'une amitié subreptice, qu'elle ne comprend pas elle-même, pour un jeune paumé des quartiers sensibles. Le basculement dans une sorte de fantastique très charnel, pas du tout “mystique” au sens où cet adjectif peut ressortir d'un kitsch rebattu, est savamment, lentement préparé par les premiers chapitres ; c'est aussi un très beau livre sur Londres. Au fil de son œuvre, Ananda Devi nous propose, mieux encore que Marie Ndiaye, un modèle paradoxal, car par force sans émules possibles, de récit marginal : récits sur des personnages rejetés, ou déjetés, écartés ou à l'écart, dont la voix narrative s'empare et se dépossède, dont le caractère insaisissable reste comme lancé.

Le sens de la marge est dans la voix même.

05:25 Publié dans Aujourd'hier, MOTS | Lien permanent | Commentaires (0)

samedi, 06 décembre 2014

2200 ▬ Terminus radieux (Volodine)

    Titre trompeur, ou équivoque : on se dit bien vite que l'adjectif « radieux » évoque les radiations nucléaires — avant de s'interroger de nouveau : n'est-ce pas plutôt l'extase du faux couple infernal, Soloviev et la mémé Oudgoul ? Terminus : errance ferroviaire, oui, et le kolkhoze comme point final de l'Histoire, oui. Mais peut-être autre chose ?

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À part Des anges mineurs (qui est très bon), j'avoue que tous les Volodine que j'avais lus m'étaient peu ou prou tombés des mains. Mon ami J*** me l'a offert, et je ne regrette pas ce périple. Texte qui réussit à mêler la réflexion sur les formes expérimentales de la poésie, le futur apocalyptique, le réalisme magique (avec l'hypothèse d'une immortalité malheureuse, dégénérescente, douloureuse et subie).

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Roman en 49 chapitres, les 22 premiers, plutôt longs, constituant les 3 premières parties, et les 27 “narrats” de la 4e partie n'occupant qu'un petit tiers du livre.

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Dans une Russie d'après l'apocalypse, après la fin de l'Histoire (des combats ont eu lieu, dont on ne peut même être sûr qu'ils opposèrent vraiment les tenants du bolchevisme rénové à des forces extérieures (il n'y a plus d'extérieur, plus de dehors — c'est un des traits de force du roman)), errent des morts-vivants. Dans un kolkhoze dominé par une figure de patriarche omnipotent, capable de pénétrer dans les rêves et les corps de ses affidés, mais surtout de ses trois filles, un de ces errants, échappé à de mystérieux combats, échoue. Kronauer semble être, un moment, le protagoniste ; de fait, le dernier narrat s'achève sur un concert interminable donné par Aldolaï Schulhoff, le barde à la mémoire arrachée et récitant, et Kronauer, qui tape contre la carcasse d'un train bousillé en guise d'accompagnement.

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Figures du corbeau. Soloviev a le pouvoir de se transformer en d'immenses corbeaux, superbement décrits, écrits par Volodine. Dans la 4e partie, on comprend que ces corbeaux (selon une ligne Baudelaire-Lautréamont-Rimbaud) sont partout, qu'ils vont recouvrir le monde, en s'effondrant notamment sur la forêt où, après des siècles d'errance, les trois sœurs ont fini par — aléatoirement ? — se rejoindre.

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Les radiations avaient rendu immortels autant qu'inhumains les quelques survivants ; même cette chronologie post-apocalyptique finit par se dissoudre. C'est là ce que j'ai trouvé de particulièrement beau dans ce texte, la façon dont les repères habituels en matière de personnage et de chronologie sont déconstruits dans les trois premières parties, avant que la nouvelle construction inhérente au roman lui-même vole elle-même en éclats. Les 27 “narrats” réussissent le tour de force de confirmer et nier simultanément la structuration logique, la teneur des 22 premiers chapitres.

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D'une noirceur absolue, terriblement déprimante, l'écriture de Volodine est aussi très belle. Le tout tient la route. Si je devais noter ici les références de quelques passages emblématiques à même de retenir un lecteur, je citerais la description du feu à la page 272, la métamorphose de Samiya Schmidt au chapitre 17, l'affranchissement de Kronauer au chapitre 29 (la page 502, singulièrement), le poème du 32e narrat.

 

11:04 Publié dans Brun socle déformation, MOTS | Lien permanent | Commentaires (0)

mardi, 02 décembre 2014

Divagations

    Odeur de brume et de brûlé

près des troènes lourds de bruine

 

Le merle encore s'est nourri, tout le mardi,

des indéchiffrables fruits rouges

 

Sur le porte-serviettes près d'un des six lavabos,

j'ai remis, pointe vers le bas,

les vieux sabots.

 

Ces sabots, comme tout soulier, comme toute paire de souliers, ont une histoire. Je les ai achetés une bouchée de pain, l'été 2009, à Dax, les ai ensuite portés, même à l'Université mais jamais pour faire cours. Ils se sont très lentement, progressivement usés, abîmés... toutefois increvables.

 

Odeur d'oreillers parfumés,

trop plats, on les rejette, on n'en veut pas.

 

Le pied se rappelle

la forme du sabot, que la prose

convoque, obsolète autant qu'oblique.

 

Contre les lattes de lambris

de cette chambre, j'éclate

mon regard qui n'a plus âme qui vive.

 

 

22:11 Publié dans Fall in Love, MOTS | Lien permanent | Commentaires (0)

dimanche, 30 novembre 2014

2195 - Au bord de décembre (211/1128)

   Au bord de décembre

à la toute fin de novembre

le mois neuf le tout brun orangé du renouveau

au bord de décembre me

voilà pour la première fois

(pourtant

nous habitons ici depuis bientôt 6 ans)

à coucher au sous-sol

dans la “chambre d'amis”

pas terriblement accueillante

terne mais pas spartiate

je crois j'ai beau chercher

je crois bien que jamais

une ou deux pour s'isoler

une ou deux fois pour lire en paix

mais dormi ici jamais c'est

la chambre de mes parents et c'était

la chambre d'Éric

qui ne vient plus il venait

ici tous les mercredis et parfois davantage

donc quand j'étais souffrant je m'installais plutôt

(depuis 6 ans) au salon au petit salon

d'en haut près des garçons

bref jamais ici au spartiate

cabinet boisé lattes

affiches miroirs chaises cannées

placards 1 pile de feuilles & sur

les tables de chevet des boîtes avec des remèdes

1 verre d'eau

et 5 bouquins, pourquoi autant je vous demande

ça n'a pas de sens, c'est juste

comme les remèdes au cas où

pioche un poème ici finis ce roman là

lis quelques pages de l'essai

butiner peut-être au creux de l'insomnie

et donc dans cette chambre

à coucher bois pour une fois

se coucher au bord de décembre

.

20:34 Publié dans 410/500, MOTS | Lien permanent | Commentaires (0)

mardi, 28 octobre 2014

... beaucoup de pommes d'or....

• • On dorera la chapelle du portique à l'autel, avec beaucoup de pommes d'or, de grenades d'or, de raisins d'or, pour les guirlandes des entrecolonnemens. • • •

 

    Ornette.

Sornettes inévitables sur les envols fous d'Ornette.

YES ORNETTE !

Et si on commençait à redécouper le langage ? OR...

OR NETT E (le métal poli) (gentil abus de langage▬▬▬)

ORNE t TE → tu vis dans ta bagnole, cloche de bois, oie grise dans l'église

MAIS QUAND ÇA FUT ÉCRIT ON S'EN COGNE

cognée → hache

Le mort-né, morne plaine. Un plein bol d'athanor, repassez demain.

 

11:39 Publié dans Droit de cité, J'Aurai Zig-Zagué, Knobs & thorns, MOTS, Un sang d'encre | Lien permanent | Commentaires (0)

lundi, 02 juin 2014

Three Times Around The Bird Bush (11’21”)

Toxvӕrd/Jacquemyn/Jørgensen, 2013

    Raffût, persiennes ouvertes.

De secrètes luxures, passe une bétaillère.

Au loin les cloches bringuebalantes d'une église fourgonnette.

Depuis tant de départs, une balle rose vous invita au bal, une balle rose posée sur un tissu à motifs africains, grège rêche le plus doux qui fût. On entend la mélopée dans la canopée, nous voici au bord de renaître, différemment, sous un soleil de plomb.

On arrête le pas, presque on en oublierait de respirer.

Devant nous, dans le lointain, la mangrove – mais ici, des millions de plumages multicolores, qui nous rendent muets. Les pneus de l'église crissent, plus près, désormais. Elle écrase un zèbre, se rapproche toujours davantage.

Suggestions de quoi — de phrases ?

L'archet invincible, invaincu, a stoppé net la course folle de la fourgonnette. Il nous présente des vierges barbues, fait apparaître dans le ciel, entre les ramures, d'étranges colifichets étincelants. Maldoror se réveille dans un éclat de rire qui suffit à glacer le sang des blaireaux occupés à fouailler, non loin. Rassemblant le peu de forces qu'il leur reste, les blaireaux s'enfuient ; leur douceur ne peut rien contre les maléfices de Maldoror. Bien heureux encore si l'église endiablée de Maldoror ne les écrase pas.

Traces, lignes, zigzags, dérapages de mine de plomb sur la feuille, mine crissante dans la mine, traces et lignes comme des soldats prêts à crever.

L'archange blond, diabolique, esseulé et heureux, travaille et fouaille le sol de son groin.

Sortent des lombrics, qui se collent à l'archet, éclaboussent la caisse en bois. Pour qui est ce cercueil ? Maldoror a souri, n'a pas répondu. Voyez comme il sourit. Oh ce sourire. Il en a fait pâlir. L'église est embourbée dans le bitume chaud, bouillant, lave de millions de lombrics.

Les lombrics desséchés tombent sur la feuille de papier, découpe au plomb fondu.

Maldoror s'interroge à haute voix, se demande quel crâne ouvrir en deux pour en faire sortir les fertiles arguments qui pourriront le monde comme un fumier. Quel terreau corrompre de son sourire infect. La contagion gagne, mais l'archet a repris le dessus.

 

Abandonnés sous la canopée, nous dormons.

10:31 Publié dans J'Aurai Zig-Zagué, MOTS | Lien permanent | Commentaires (0)

samedi, 28 décembre 2013

des¶mes§vos↑

d e s    d é s i r s 

mes mésanges 

vos Vosges 

ma marinière 

nos nostalgies 

on ondule 

t   o   n         t   o   n   i   c

 

24.11.2013

22:50 Publié dans MAS, MOTS | Lien permanent | Commentaires (0)

lundi, 18 mars 2013

Mater dolorosa

    La branche sciée du cognassier

tremble sous la grêle

¨ ¨ ¨ ¨ ¨ ¨ 

Sur les trottoirs les trémas blancs

 

chantent dansent à tire-d’ailes

oiseaux de ce printemps

qui ne viendra jamais

 

comme s’enfuit la sève à la branche coupée

16:44 Publié dans MOTS | Lien permanent | Commentaires (0)

vendredi, 08 mars 2013

VOUS dans la montagne : Franck Doyen

    Ouvrage de poésie, ouvrage étrange, comme on parlerait de boîte à ouvrage, archaïque trésor en bois d’où s’échappent bobines dépareillées etc. On a lu ce poème comme texte triple. La traduction de Laura Vazquez n’est pas donnée en regard, mais juxtaposée, proposée avec les fragments du poème français. Le travail graphique de Karim Blanc est lui aussi un texte. — « Altitude de bleu » — Donc, même moi dont la compétence en castillan est limitée, je me surprenais à commencer parfois par la traduction (j’avais d’ailleurs cru, en l’achetant, qu’il s’agissait d’un texte bilingue de Doyen lui-même). Glossolalie, récit escarpé et repris d’un périple jamais naufrage, le poème est (peut-être) allégorie de ce qu’on endure, tragiquement et prosaïquement, de nos jours au Mexique (la dédicace aux femmes de Ciudad Juarez ?).

05:27 Publié dans 721, MOTS | Lien permanent | Commentaires (0)

mercredi, 09 janvier 2013

Liqueur d'ON

    Les Sonates de Bach par Gould et Laredo. Hésiter plus de dix secondes avant de ranger Robin Eubanks entre E.S.T. et le coffret Bill Evans. La 30ème de Beethoven par Brendel. On n'est pas original en ce début d'année. Consulter pour sénilité, il est sans doute trop tôt, même si j'ai dû me faire un pense-bête “poisson oseille et riz” hier soir, et malgré la confection complexe de mon propre emploi du temps d'écriture pour ce semestre (mercredi). Emil Orlik n'ouvrira pas la voie, name-dropping or not.

11:42 Publié dans MOTS, Onagre 87, Unissons | Lien permanent | Commentaires (0)

lundi, 07 janvier 2013

Résolutions d'écriture pour 2013

    Outre ce qu'il faudra(it) faire sur le plan professionnel (articles, traductions ?), je dois, en 2013, reprendre et surtout achever – au moins provisoirement – un certain nombre de chantiers d'écriture,     certains ouverts depuis plusieurs années. Au vu des incises, points d'interrogations et ajouts de conditionnel de la phrase précédente, c'est mal barré. (Bien barré, en fait, ha ha.)

Je fixe donc ici la nécessité absolue de poursuivre/reprendre

 

et de reprendre/achever

 

Les formes poétiques brèves (quatrains & quintils, vénérales, sextiles, juno-lunaires, déroutantes&azalées, triolets) et d'autres projets (Un sang d'encre ? Sonnets doucement internationaux ?) suivront leur cours, cahin-caha, on peut l'espérer [4]. Du nerf !

 

 

 

[1] Malgré la facilité de composition, ce chantier tend à prendre l'eau ou à s'enfricher sans qu'on n'y prenne garde.

[2] Ceux-là s'écrivent très rapidement, sur smartphone souvent. Peu de risque que la pile ne grossisse pas.

[3] Me souviendrai-je des règles de composition ? rechercher dans mes dossiers le fichier Projet Perroquets

[4] La version initialement rédigée de ce billet comptait 1295 signes, mais j'ai fait quelques menus ajouts qui le font disparaître de la rubrique correspondante, ce qui est préférable, en fin de compte. Je n'ai choisi de citer, dans les deux listes ci-dessus que les projets pour lesquels je me fixe une obligation de résultat, en quelque sorte. D'autres, tout aussi amusants, sont pareillement en gestation permanente/différée/interrompue. Questions d'atelier.

09:33 Publié dans Clés du sol, Fièvre de nombres, MAS, MOTS | Lien permanent | Commentaires (3)

mardi, 20 novembre 2012

Ruine de ruisseau

    Tout a rattrapé la boue la bourbe

Tout a noyé le souffle coupé tout la tourbe

Tout s'emprunte et se vend le monde creuse

Pelles bêches

J'écoute sidéré le Râga Jaunpuri

Ce n'est pas le matin a-t-on le droit

Vous errez dans les collines Vous Tout Tout vous

rattrape Tout a racheté la boue la bourbe

Les collines dansent la courbe

Creusez

Belles mûries

Un squelette encore chante sous la tourbe 

14:38 Publié dans MOTS | Lien permanent | Commentaires (0)

jeudi, 27 septembre 2012

Schubertauster

    Tout de même. Un sentiment furtif s'immisce.

Clés du sol, clefs de voûte, devant la lourde porte ouvrant sur la grotte je ne peux mettre la main sur la clé, sur la clef. L'astre s'épanche, et m'interdit les adjectifs. Je craque pour, j'ai un faible pour, je suis emballé par, ça m'attire, j'attige ---- l'astre se rétracte, m'interdit désormais les verbes.

L'astre désormais les verbes.

Alors, on fait moins le malin ?

Me voici de nouveau (du moins une partie de me, un fragment de moi) dans la salle, à Capbreton.

Le vent des soufflets, la brise des gifles. Dilate mes narines. C'est un soudain rigodon.

Oui, on vole, s'envole, clabote, cliquète, dansote, qu'il est doux avec vous en ce soir de mourir, et la mort est belle, et la mort danse, on danse, oui, comme doux, qu'il est doux votre pas de danse.

Rigodon, puis rideau. 

08:43 Publié dans J'Aurai Zig-Zagué, MOTS, Narines enfarinées | Lien permanent | Commentaires (0)

samedi, 10 décembre 2011

Six Variations sur le nom d'Iris Clert

    Les barbillons pèsent. Cirri lest.

Remuez les reliques. Stir relic.

Le crieur des rues la gorge tranchée. Crier slit.

Presse-purée éclairés. Ricers lit.

Monsieur, enregistrez votre littérature. Rec Lit Sir.

Erreurs autorisées. Licit errs.

 

16:04 Publié dans Aujourd'hier, Ex abrupto, Minimalistes, MOTS | Lien permanent | Commentaires (0)

samedi, 01 octobre 2011

Diérèse / diarrhée

(14 juillet 2011) 

 

Hier soir, en poursuivant ma lecture de Malone Dies (que je mène simultanément aux Demeures 7, à Mes deux mondes de Sergio Chejfec commencé hier matin, et au bûcheronnage intensif dans le parc), je me suis demandé – toujours sans pouvoir vérifier – si diaeresis et diarrhoea étaient phonologiquement voisins (paronomase ?). Je pense que oui. Par ailleurs, pour vérifier l’hypothèse de mon hypothèse, il me faudrait, entre autres, le texte français, Malone meurt.

Il s’agit du passage suivant :

« And if ever I succeed in breathing my last it will not be in the street, or in a hospital, but here, in the midst of my possessions, beside this window that sometimes looks as if it were painted on the wall, like Tiepolo’s ceiling at Würzburg, what a tourist I must have been, I even remember the diaeresis, if it is one. » (Malone Dies (1958), Calder & Boyars, 1975, p. 64)


En effet, il me faudrait vérifier tout d’abord d’où vient cette allusion à Tiepolo, et si la diérèse n’est pas – par exemple – une référence à un poème de Robert Browning. Le nom de Tiepolo, en anglais, se prête à l’hésitation entre synérèse et diérèse sur Ti-e. (Par ailleurs, qu’est-ce que ça peut bien être dans le texte français ?)

Si je me suis interrogé sur la possible paronomase diaeresis / diarrhoea, ce n’est pas pure fantaisie scatologique, mais en raison d’une phrase de la page précédente sur la chute des crottes aux antipodes. Lorsque le narrateur, Malone, sent que ses membres sont très loin, et même distincts de lui, il commence par les pieds et finit par son cul : « For my arse, for example, which can hardly be accused to be the end of anything, if my arse suddenly started to shit at the present moment, which God forbid, I firmly believe the lumps would fall out in Australia. » (p. 63) De manière caractéristique, le récit, qui consiste à brouiller tous les repères topologiques en insistant de manière récurrente sur un narrateur non situé, à la position géographique aussi incertaine que son statut existentiel, précise ici, comme par hasard, au détour censément fortuit d’une image (qui n’en est pas vraiment une d’ailleurs), le contexte spatial d’énonciation : Malone, seul, allongé dans une chambre à la localisation indéterminée, a recours à l’Australie pour évoquer les antipodes. Il se trouve donc de l’autre côté du continent que les Britanniques surnomment Down Under. (Et là encore, je m’interroge : qu’est-ce que cela donne, à l’origine, dans le texte français ? Est-ce également l’Australie ? Si tel est le cas, alors l’Australie joue, en français, un rôle de signifiant géographique pur, en quelque sorte, alors que, dans un (con)texte anglophone, le signifiant se charge de connotations plus complexes. Si le narrateur de Beckett parle aussi de la chute des crottes en Australie dans le texte français, n’est-ce pas la voix anglophone de Beckett qui lui fait choisir, par en-dessous, si j’ose dire, cette image, tout autant que la logique géographique ?)

Il y a aussi, pour en revenir à l’hypothèse de la paronomase diaeresis / diarrhoea, une extension du trope rabelaisien du haut et du bas à la configuration planétaire : le haut figuratif du globe (irlandais ? français ? européen, à coup sûr) se vide par le bas (l’Australie). Plus loin, la métamorphose imaginaire/référentielle en plafond peint (ceiling) d’une fenêtre en trompe-l’œil (window) suggère un prolongement de la diarrhée planétaire en diérèse géométrique. (Tout cela, une fois encore, se colorera différemment selon que diaeresis / diarrhoea est bien une paronomase, selon la structure sémiotique du texte français, mais aussi en fonction de l’origine de cette référence à Tiepolo. L’interprétation crypto-rabelaisienne que j’ai esquissée plus haut paraît plus convaincante en anglais : en effet, si la fenêtre est dans une situation similaire à celle du cul (au milieu du corps : it can hardly be accused to be the end of anything), le signifiant window double et même triple la mise, tant avec wind (le vent, avec sa connotation scatologique) qu’avec la terminaison en –ow (objet de nombreux jeux sémiotiques, à l’époque élisabéthaine, tant par allusion au vagin qu’à l’anus).

18:11 Publié dans MOTS | Lien permanent | Commentaires (0)

mardi, 20 septembre 2011

Trois grains de riz

    Du café, du thé maintenant (l’ordinateur vrombit à fond), et le travail avance malgré tout, entre distractions d’ordre lexicologique et fous rires culinaires au second degré (en particulier tout ce qui touche aux falafels, désormais).

 

 

Il est temps de citer ici un passage d’une grande valeur épigraphique :

« J’écris sans savoir vraiment ce que je veux dire. Sans préméditation. Pour reprendre pied. »

 

C’est dans le très beau petit livre de Thomas Vinau, Nos cheveux blanchiront avec nos yeux (Alma, 2011, p. 81). Il est essentiel de mettre partout son grain de sel. La cuisine n’attend pas, aussi celle des mots. Laissé trop longtemps tout en plan, comme une paillasse où pourriraient des épluchures. Nettoyer, trier, classer, ordonner è mettre aux ordures (aussi).

 

 

Penser/classer : les nombreuses rubriques dans lesquelles s’accumulent ces billets, courts chapitres, sont, on a du mal à le croire, à l’admettre, un premier pas. Et je dois ajouter ici (pour reprendre pied ?) que je sais seulement depuis deux jours, après avoir regardé avec Oméga le globe lumineux (offert il y a longtemps à son frère aîné et) où se trouvent dessinés et répertoriés pas moins de 263 animaux, et lu la mini-encyclopédie qui sert de guide d’accompagnement du globe en question, que l’onagre est « une hémione qui ne vit plus qu’en Iran ». Je continue de citer : « Ces animaux se situent entre les ânes et les chevaux. L’onagre a un pelage jaune-brun ; son signe distinctif sont ses sabots aux bords noirs. Sa raie va jusqu’à l’extrémité de sa queue. »

C’est à regret que je dois noter que cet animal porte le n° 60 (ni 59, ni 77, ni 87), et que le koulan, animal voisin auquel la notice du guide renvoie également, porte le n° 38.

 

 

Amplification. Toute cette digression ouvre des horizons, notamment un nouveau départ pour la rubrique avortée Zoozéro. Le nombre 263 permet d’envisager l’écriture d’une nouvelle série d’onzains (2-6-3). Entre autres. Et sans oublier d’aller de l’avant, avancer toujours, penser/classer sans penser classer.

16:17 Publié dans MOTS | Lien permanent | Commentaires (0)

vendredi, 10 juin 2011

Aérien, non

    Traces.

Personne n'a contrarié mes désirs.

Il faut aérer la prose. (Oui, mais la fragmentation elle-même est étouffante.)

Aujourd'hui : autoréférentialité ; squiffy ; je ne comprends rien à ne suis pas d'accord avec ce que mon collègue a expliqué aux étudiants sur le caractère précurseur/postmoderne de Tristram Shandy.

Alpha monte se coucher.

Aérer le coucher de soleil, bleu pétrole.

Mais pourquoi ?

22:01 Publié dans MOTS | Lien permanent | Commentaires (2)

lundi, 02 mai 2011

Gyubal Velleÿtar, de Stanislaw Witkiewicz

    Hier soir, quelques heures avant l’opération militaire qui a permis de « libérer le monde » d’Osama bin Laden (ce que d’aucuns semblent interpréter comme la fin, ou du moins la mise à mal, du terrorisme international), je lisais l’acte I de Gyubal Velleÿtar. Ce matin, je poursuis avec l’acte II, quelques heures à peine après que le cadavre de n’ennemi public n°1 ait été « enterré en mer » (largué ? amerri ? inhumarré ?) – procédure, qui garantit, je pense, des soupçons sur sa mort pour les années à venir, et des pèlerinages soit sur le lieu où il avait trouvé refuge, se planquait, soit à un point donné de la côte d’où fidèles et forcenés jugeront qu’ils sont le plus proches de la dépouille d’Osama le martyr.

Pour en revenir à Gyubal Velleÿtar, il s’agit d’une pièce frappante – un peu comme si (je poursuis le name-dropping acharné commencé hier dans le dialogue noir) Aristophane ressuscitait et croisait la route d’Alfred Jarry. Arturo Ui a pâle figure après cela. Il s’est décidément passé quelque chose de fondamental, du point de vue du langage, et du langage poétique singulièrement, entre 1910 et 1930 (pour faire bref).

« Je voudrais forger un formidable château de porphyre, et comme matériau je n’ai qu’une bouillie de tripes bourbeuses. »

Pourquoi cette langue, outrancière et dramatique, dans cette pièce écrite en 1921, me fait-elle penser à la langue si peu romanesque de Perrudja ?

11:11 Publié dans MOTS | Lien permanent | Commentaires (0)

mardi, 12 avril 2011

Cimaises

    Depuis une semaine, je lis House of Leaves. Hier, toute la journée, à côté de mon bureau à l’université, un roman inconnu de moi (The Birthing House) est resté posé sur la tablette, dans le couloir d’attente. Ajoutez à cela que j’ai reçu, samedi par la Poste, le dernier roman de Tariq Goddard (je caresse le projet de relancer quelques éditeurs que ne devraient pas manquer d’intéresser les textes de ce romancier inédit en français), dont la 4ème de couverture indique qu’il y est question, peu ou prou, de maison hantée.

Il y eut aussi, dimanche, ce bref récit de Kafka, que je lus dans un moment d’intervalle, chez moi, et dans lequel le signifiant Haus joue un rôle d’inquiétant trouble-fête. Existe-t-il une langue dans lequel le mot maison s’écrit en trois ou sept lettres ? Cette question fibonaccienne me hante.

 

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Ajout de 11 h 50 : ev en turc, hus en danois/suédois/norvégien.

10:30 Publié dans MOTS | Lien permanent | Commentaires (0)