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vendredi, 17 novembre 2006

L'Auribar

    Le Cap-Ouest était fermé (volets métalliques marron baissés). D'où ailleurs, autrement, sous les chaussettes dépareillées qui ne sèchent même plus. Nous avons parlé du chien noir, qui avait les pattes posées sur le comptoir. Sage, doux, le regard perçant, cinq mois seulement. (Un croisement de bas-rouge et de labrador, m'a-t-elle dit.) Entre la rue de Maillé et la rue des Carmes, le peintre, à la fenêtre ouverte d'un premier étage, avait l'air d'un trompe-l'oeil. Discute fervente canine.

mercredi, 15 novembre 2006

Ne manque le plaqueminier

    J'aurais peut-être dû ouvrir Le Livre des plaquemines, mais, même sans compter sur la beauté du nombre 44 (rencontré aussi hier dans le chapitre que Jared Diamond consacre aux Mayas), il me faut affirmer un principe de transversalité essentiel à l'écriture de ces carnets : la longue saga des kakis, ainsi, est transcatégorielle.

 medium_Kaki_1.jpg

 

 

 

sato furite

kaki no ki motanu

ie mo nashi *

 

 

 

(C'est se payer de grands mots.

Cet ancien hameau / le plaqueminier ne manque / à aucun foyer ! )

Se payer la tête des nombres, la fiole des fruits (qui passeront la promesse des pleurs, et la froideur des fesses, et...). Pile entre le tigre et la girafe, le camescope me laisse en carafe. Heureusement que je peux me rattraper avec l'appareil photographique, qui magnifiquement saisit, derrière les barreaux de sa cage, le sourire terrible du félin mûr, à point nommé.

 

* 77ème des Cent onze haïku de Basho, et traduction de Joan Titus-Carmel (Verdier, 1998).

Photographier les kakis, passe-temps de choix

    On trouve de tout, dans les kakis, maintenant, et même des vers. (Grouillez-vous, quoi, merde.) medium_Kaki_4.jpgMa série de photographies, honteusement interrompue, reprend le fil de son bonneteau, mais à cette réserve près que je ne vole pas l'âme des fruits.

 

" Comme je me réjouissais à l'avance d'aller avec toi voler des poires, expédition qui manque de charme quand on l'entreprend en solitaire, alors qu'à deux, c'est un passe-temps de choix."

 

(Robert Walser. "Lettre d'un peintre à un poète". In Vie de poète. Traduction de Marion Graf.

Zoé, 2006, p. 12.)

 

Variations véreuses, peut-être, mais, à tout prendre, versifier autour des kakis est aussi l'apanage des haïkistes (dont il n'a encore été question qu'indirectement).

lundi, 13 novembre 2006

Chiens de Langeais (version 834/1000)

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    Que regarde-t-il ? Rien. L’oreille tendue, aux aguets sur la tenture, il écoute.

Féru de chasse à courre et de ses fastes tonitruants, il écoute Wood Flute Song, par le quartette de William Parker (album Sound Unity, 2005).

Taïaut, semble lui lancer le saxophone endiablé. Faut-il  suivre les avis du Malin ? s’interroge, inquiet, le chien au port altier.

Ai-je déjà dit que le saxophone était un des instruments dont je ne joue jamais ? C’est sans doute pour cette seule raison que je me plais à imaginer ces chiens bruns ou blancs, langue pendante, et dont parfois certains se collent la truffe au feuillage, et qu’extirpant de mon manteau anthracite un saxophone baryton en piteux état, je commence à en jouer, ce qui ne manque pas d’alerter les surveillants de salle. Comme je respecte leurs remontrances, et puis j’ai une bonne tronche, ils m’écoutent béats. Pas de course folle, car je n’ai pas le temps de me payer la fiole d’honorables fonctionnaires. Les chiens aboient, on sous-entend Caravan.

Pont des soupirs

    Sans moi. Il n'est partout question que de Madame Bovary.

Who talks to saints. If they talk to Saints are they said to resemble Madame Bovary.

In talks to saints they are believed to be reminded of their times. The times when they were this. This and that and that and this and a bell and a bull. A bull and a bull. When they were this.

I planted I implanted in them a symbol of bees of bread of meat of figs of trees not of birds nor of cows nor of doors nor of rivers but of fountains and of water and of sheep and of size.

He sighs and she sighs.

 

Si je commence, si je ne me retiens pas, je vais tout recopier. Quand même, c'est. Talks to Saints Or Stories of Saint Remy. Comment c'est. Un texte (sublime, forcément sublime) de Gertrude Stein (Voice Lessons and Calligraphy 1915-1930. In Painted Lace and Other Pieces. NY : Books for Libraries Press, 1969, p. 108). Commencez quand même.

dimanche, 12 novembre 2006

Inachever jusqu'au bout

    Question inachèvement, le projet même des Eglogues de Renaud Camus (dont le prochain volume doit paraître au printemps prochain) se pose là. Voici ce que je trouve ce matin même dans la cinquième des Elégies pour quelques-uns (intitulée "Préface. La Mort.") :

"Aux Eglogues, enfin, il manque toujours trois volumes. Or, j'aimerais inachever jusqu'au bout cette entreprise, et de préférence avant trop longtemps." (p. 46)

 

Quelques lignes plus bas :

"Et puis, pour se livrer à l'art des églogues, il faut avoir tordu le coup, sans esprit de retour, à tout désir d'expression, s'être désencombré du sens, n'avoir vraiment plus rien à dire. Je n'en suis pas encore, hélas, à ce degré-là de sagesse." (ibid.)

 

L'ivre certes historié

    C'est très probablement le 12 novembre 1345 que mourut Jean de Vicktring, abbé de Victoria. La date en est confirmée par André Joris, dans son article "Le passé lorrain de Jean de Vicktring, abbé de Victoria (Carinthie)" (in Le Moyen-Âge, Vol. CXI, 2005, n° 3-4). Jean de Vicktring est aussi l'auteur d'un Liber certarum historiarum, dont je ne sais comment en comprendre le titre : recueil de certaines histoires ou recueil d'histoires certaines ? La première hypothèse paraît plus probable, mais allez savoir avec le bas latin.

***********

Par ailleurs, Jean-Michel Bonet est l'auteur d'un essai intitulé L’if ou l’olivier. Sagesse et perdition d’après le Conte du Graal de Chrétien de Troyes (Paris : L’Harmattan, 2003), dont je pressens, de par mon désir pressant, qu'il faudrait l'avoir lu.

Police de caractères (244/288)

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    Accaparé, affolé, crapahutant, l'alphabet rejoint les nombres. Des algues d'ombre sur le mur font ahaner l'artiste qui met les angles et d'autres abstractions en lumière.  Armez-vous d'ardeur au 26. Arrachez abruptement les masques des acteurs, qui se terrent adroitement au 18 de la rue.

Hubert : Antoine :: Introduction : à tout autre : chose

    Le poème de Bigongiari qui m'émerveilla jeudi soir s'intitule Con becco di sale ("Avec son bec de sel") et se trouve à la page 38 du choix de poèmes (traduits par Antoine Fongaro) publié dans la collection "Orphée" (Paris : La Différence, 1994). De façon générale, ces poèmes sont très beaux.

*********

Je n'ai pas pour coutume de parler d'un livre avant de l'avoir terminé, mais, en dix-huit mois, j'ai si souvent remis à la fin de la lecture pour finir par ne rien écrire du tout, que je me dis qu'un tiens vaut mieux que deux oiseaux dans le bosquet. Par ailleurs, dans le cas du livre de Hubert Antoine, il s'agit d'une suite de soixante introductions, et je postulerai donc, avec quelque légitimité, que c'est un ouvrage qui n'a pas de terme. (Pourtant, j'avouerai penaud que mon marque-pages est calé à la page 29.)

Ces remarques ne portent donc, pour être honnête, que sur les neuf premières "introductions". Ces remarques d'ailleurs risquent de faire long feu. Ces remarques ne sont que des marques (de mon désarroi).

Mon désarroi allait grandissant, tandis que je lisais, jeudi soir, les neuf premières "introductions" du livre de Hubert Antoine. Je n'ai pas, depuis, repris l'ouvrage, sauf pour feuilletter les trente premières pages. Mon désarroi est dû, je pense, à la tonalité foncièrement illogique des fragments. On devine des règles de composition, peut-être du même ordre que celles qui président à mes Xénides, ou, qui sait, à mes chers 721. (Que je vienne de regarder les Bleus prendre la pilée face aux Blacks ne doit pas être tenu pour avoir une quelconque influence sur ce billet.)

Mon désarroi ouvre-t-il la voie aux réticences ? J'écrirai pourtant.

J'écrivais donc que les textes brefs d'Introduction à tout autre chose (Verticales, 2006) donnent l'impression d'avoir été écrits soit selon une technique d'écriture proche de l'automatisme surréaliste (et l'épigraphe d'Achille Chavée n'entre pas modérément dans cette hypothèse), soit selon des principes de composition syntaxiques et lexicaux plus retors (c'est-à-dire plus ouvragés). Peut-être, évidemment, y a-t-il une combinaison des deux. Toujours est-il que je me surprends à admirer les ressorts de l'écriture dans ses formes les plus réduites (à l'échelle d'une phrase, voire d'un simple groupe nominal) et à ne rien saisir d'une "introduction" dans son ensemble (à part, tout de même, pour l'"Introduction des Etats-Unis", plutôt transparente dans sa signifiance).

Hubert Antoine sait fort bien écrire. J'en trouverais, à chaque page, dix exemples. Mais à quoi cela mène-t-il, rime-t-il ? Je n'en ai pas la moindre idée. Alors, dois-je m'en tenir à l'admiration muette de certaines phrases par moi isolées, comme

Couve un de ces moments où le cerveau gratte. (p. 21)

 

ou de certains paragraphes savamment construits, et très efficaces, comme

Je sens la nuit comme un coulis pour ceux qui n'ont rien à croquer. J'y crève d'angoisse, ce froid sans degré. j'ai beau essayer de forniquer quelques aveugles séduites par mon désintéressement, d'obscures pensées me font haïr la sauce béchamel. (p. 25)

 

?

(Oui, le signe de la fin est bien ? .)

vendredi, 10 novembre 2006

Au ciel de sel

Jeudi 9 novembre, dix heures et demie du soir.

    Un poème bouleversant de beauté, de pudeur, et regorgeant de l'expression d'un monde, sous la plume de Pietro Bigongiari, a suivi, pour mon bonheur, la lecture de quatre fragments de Hubert Antoine, dont  – par delà son hommage – appuyé – à l’écriture automatique et fantaisiste telle que la pratiquait, par exemple, Benjamin Péret –  je ne sais trop que penser. Ne succombe-t-il pas à la facilité de l'exercice de style, pour ne rien avoir à dire ? (J'ai belle gueule d'écrire ça.) La poésie tellurique et terraquée de P.B. résonne plus longtemps dans le silence ; son envol lyrique pèse plus lourd dans la balance. (Il faut toujours lire douze livres en même temps. Nabokov achève de me décomplexer sur ce point (mais, à dire vrai, je ne l'avais pas attendu).)

Il y a que je ne sais toujours pas si orgones est une faute de frappe ou un hapax étrange ignoré des dictionnaires.

Talés mais pas mûrs (les kakis)

    Là, comme de bien entendu, je n'ai pas les textes sous la main, donc ce n'est pas encore ce soir que je vous entretiendrai des plaqueminiers & plaquemines dans les haïku de Shiki et de Basho.

medium_Kaki_9.jpgCes alignements de kakis ont tout de ce jeu de mes années gamines, le Puissance 4, que mon fils a découvert cet été dans une version en bois, beaucoup plus solide. À cinq ans, il est difficile, apparemment, de fomenter une stratégie (surtout avec les terribles verticales), et plus encore de déjouer celle de l'adversaire. (En jouant contre un enfant, le plus difficile est de savoir tricher suffisamment subtilement pour qu'il ne gagne ni ne perde trop souvent. À la bataille, quand on s'ennuie, par exemple, regarder par en-dessous les quelques cartes qui restent, si on est en train de perdre, afin de bien donner sa dernière dame quand l'enfant vous sort, triomphalement, un roi ou un as. Vous voyez d'ici, si vous lui piquez un valet, avec votre dame : reparti comme en quarante !)

Bref, je ne sais plus trop pourquoi je dégoise ici en vous entretenant de Puissance 4 et de jeu de bataille, alors que j'aurais pu, tout aussi bien choisir le jeu de bonneteau, que ces quatre kakis, alignés sur fond de mur blanc que traverse un rai de soleil vertical, évoquent aussi, quoique, comme je crois le savoir, le jeu de bonneteau ne compte que trois gobelets et trois cartes. (Et d'ailleurs, j'ai appris tout récemment, pour l'oublier aussitôt, le nom anglais du jeu de bonneteau. Je me rappelle l'avoir découvert dans l'un des chapitres de Gallimaufry, le très distrayant (mais visiblement très oubliable) ouvrage du grand lexicographe britannique Michael Quinion.)

Enfin, les gallimâfrées de kakis, se bâfrer de ces fruits, ça ne lui réussit pas terrible, à notre masque musicien. S'il se laisse trop convaincre par Fire, il va finir à la rubrique Cuisinier casque de kakis.

07:25 Publié dans MAS | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Littérature

jeudi, 09 novembre 2006

7 Kap

    Vous menez le bal rondement, dites-moi.medium_Kaki_12.jpg

(Tout de même, si je veux écrire ce soir un texte de 703 mots, il va falloir que la petite histoire y mette du sien. Bah, nous verrons bien.)

Toujours est-il, disais-je à Fire, que de la vitre de l’officine naguère dévouée au piercing et désormais rebaptisée Lord Sandwich, on pourrait aisément, discrètement, photographier la plupart des collègues, ou des étudiants, ou des inconnus, qui déambulent d’un pas empressé.

Fire, elle, m’apprend que, grâce à moi (pourtant, MuMM est un autre), elle mange enfin les kakis proprement.                  Comme je m’étonne, car ma manière est épouvantablement insortable, elle me décrit sa façon de déguster ce fruit, qui est rien moins que débectante et que je tairai pour ne pas lui faire honte.

mercredi, 08 novembre 2006

Lundistes

    Voici les ouvrages que j'ai empruntés ce lundi à la Bibliothèque des Lettres et Sciences Humaines de l'Université François-Rabelais :

  • Basho. Cent onze haïku. Traduction de Joan Titus-Carmel. Verdier, 1998.
  • Quentin Bell. Mode et société. Essai sur la sociologie du vêtement. Traduction d'Isabelle Bour*. P.U.F., 1992.
  • René Berger. La mutation des signes. Denoël, 1972.
  • Martin Crimp. Plays 2. Faber & Faber, 2005.
  • Jean Favier. Louis XI. Fayard, 2001.
  • W.S. Merwin. The First Four Books of Poems. Atheneum, 1980.
  • Vladimir Nabokov. Lectures on Literature. Picador, 1980.
  • Vladimir Nabokov. Strong Opinions. Vintage, 1990.
  • Shiki. Cent sept haïku. Traduction de Joan Titus-Carmel. Verdier, 2002.

 

* De l'aveu même de la traductrice, le texte original est introuvable. Elle n'est même pas sûre de l'avoir encore, ni qu'il se trouve à la B.N.F. Sur le Web, il est inaccessible (éditions rarissimes à 170 livres sterling, dix fois trop chères, proportionnellement à mon intérêt a priori pour ce texte). Je verrai avec le prêt entre bibliothèques, tout de même.

20:20 Publié dans MOTS | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : Littérature, Ligérienne

Passablement fourmillant

    D'après le Robert culturel, l'adverbe passablement a deux sens principaux, l'un qualitatif ("pas trop mal") et l'autre quantitatif, plus courant ("plus qu'un peu, assez").

" À Santa Barbara, j'ai dîné seul dans un restaurant tranquille aux tons pâles, rendez-vous feutré d'habitués amoureux. Chaque table était ornée d'un minuscule bouquet. Je me sentais passablement déplacé, mais ce n'était pas un sentiment désagréable ; du moins n'en gardé-je pas un mauvais souvenir aujourd'hui. "  (Renaud Camus. Elégies pour quelques-uns. I. (NOWHERE, U.S.A.). Paris : P.O.L., 1988, p. 18)

 

De mon côté, il y eut ce dîner en solitaire dans un restaurant italien de Summertown, à Oxford, à l'hiver de mes vingt-et-un ans, et, l'année d'avant, un restaurant tunisien du boulevard de Port-Royal, déjeuner printanier resté dans les annales à cause de l'épisode du vin gris foumillant. J'ai dû, bien sûr, manger d'autres fois seul au restaurant, mais ce sont ces deux-là qui ressortent.

mardi, 07 novembre 2006

Kakis soleils coupés

    Je ne suis pas au bout de mes peines. Il y a quelques heures encore, j'ignorais que Mexmine fût un prénom féminin. Il y a quelques minutes, j'ignorais encore qu'il y eût une mine à Cananea, dans la province de Sonora, au Mexique (ce qui m'a remis en mémoire les Détectives sauvages). Hier matin, je ne m'étais jamais aperçu que kakis & plaqueminiers étaient des motifs récurrents de l'esthétique des haïku. (Basho en a écrit un fabuleux, que je relis en écoutant la Composition n° 141 d'Anthony Braxton, dans la version enregistrée avec son ensemble en public à Victoriaville, en 1988.)

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Que l'adjectif hindi kaki, qui signifie "couleur de poussière", ait pu donner son nom au fruit orangé tirant sur le rouge signifie-t-il que le fruit a reçu son nom à un stade plus précoce de maturation, ou est-ce par référence à la poussière plus ocre des pays asiatiques ? Il faudrait cesser de tourner en rond, autour du pot, et écrire quelques poèmes en l'honneur des kakis et des plaqueminiers. Je ne suis pas au bout de mes peines.

18:25 Publié dans Unissons | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : Littérature

Stephen Romer siffle un air mort

    Il s'évente avec quelques phrases, que, l'air de rien, l'air lui dérobe pour les emporter par-dessus les montagnes. Il s'offre une valse avec l'azur, mais c'est pour mieux nier qu'il y a des nuages. À la nue insolente soubrette il réplique par un non sequitur. Toutes proportions gardées.

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Groupe & ombres (version 249/294, et dernière)

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    Votre regard se farde d'ombre, votre épaule aimée s’illumine, et la griffe du félin accroche le ciel. Le souvenir de l'universelle araigne se perpétue sur ce promontoire, belvédère où les dernières lueurs du soir virent au noir lumineux.

N'oubliez pas de vous garder parfois des phrases creuses.

lundi, 06 novembre 2006

Groupe & ombres, version 547/656

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    Comme le ciel parfois se nourrit d’avoine, votre regard se charge d'ombre, la mêlée du temps sur l'épaule, et la griffe de l'histoire sur le fond drapé du ciel. L'universelle araigne n'est peut-être pas passée par ici, mais son souvenir s'y perpétue, de ce balcon, belvédère où les derniers instants du jour virent au bleu. (Son fils voudrait s’envoler vers les forêts, au-dessus de la Loire, et retrouver ses fauconniers, qui, déjà, malgré les ombres noires de l’aube, font des merveilles.)

Arbre, ce n'est pas la peine d'ouvrir ainsi la gueule. Lion, ce n'est pas la peine d'effacer la trace de tes pas. N’oubliez jamais, non, jamais, le fard des phrases.

 

 

Plaqueminiers, suite

    La pénultième n’est pas morte, non, et cette brève prose en cinq paragraphes, publiée ce matin entre deux images de la série des statuaires, a tout pour me hanter et longtemps me désorienter. Son titre, tout d’abord, est issu d’un jeu de mots translinguistique passablement alambiqué, puisque, lorsque j’écris, dans ces carnets, ne serait-ce que quelques phrases inspirées par le jazz, je songe bien évidemment à Simon, et puisque le fruit du plaqueminier, le kaki (dont je me gorge ces jours-ci, en ayant récupéré, de mes parents, trois cageots pleins), se dit en anglais persimmon, ce qui se prononce « peur-si-meun » *  et, quoique sans rapport aucun avec l’anglais for Simon (« fort-saï-meun »*), n’est pas très éloigné de la forme française « pour Simon ».

La chair des kakis est orangée, tirant sur le rouge, proche ainsi (et aussi) des cuivres coloratures des orchestres hard-bop.

Hier matin, je me suis éreinté, échiné même à peler une citrouille : la chair de la citrouille mûre est ferme, de même couleur que celle du kaki quand il n’est pas blet et que, par conséquent, il faut encore se retenir de le consommer, de crainte de garder longtemps, au palais, la poussière râpeuse du fruit.

Poussière ? In pulverem reverteris… ? Pas exactement. En hindi, kaki signifie « couleur de poussière », et de là vient le nom du fruit. En revanche, le terme « plaquemine » aurait été emprunté à l'algonquin piakimin. Voilà ce que nous apprend la Wikipedia francophone (je n’ai pas vérifié ailleurs).

 

* Cette notation ne respecte pas l'A.P.I. (Alphabet Phonétique International).

14:25 Publié dans MOTS | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : Littérature

Groupe & ombres, version 405/491

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    Comme la vie se nourrit d’avoine, dans les lieux attristés, votre regard se charge d'ombre, la mêlée du temps sur l'épaule, et la griffe de l'histoire sur le fond drapé du ciel. L'universelle araigne n'est peut-être pas passée par ici, mais son souvenir s'y perpétue, de ce balcon, belvédère où les derniers instants du jour virent au bleu.

Arbre, ce n'est pas la peine d'ouvrir ainsi la gueule. Lion, ce n'est pas la peine d'effacer la trace de tes pas. On n’oublie pas le fard des phrases.

 

Plaqueminiers de Virginie

    La boîte de Pandore s'ouvre. C'est une besace, un tunnel, une beauty-case.

De cette malle aux trésors s'échappe ESP dans l'interprétation du Vanguard Jazz Orchestra.

Puis, éblouissement post-hard-bop (ces étiquettes ont-elles encore un sens pour tout autre que celui qui en use?), Bulldog's Chicken Run : Renée Rosnes (qui a notamment accompagné l'un de mes musiciens préférés, l'immense et regretté tromboniste J.J. Johnson) & the Danish Big Band. Qu'il est dommage de ne pas connaître le nom des musiciens et solistes.

De la valise de Pandore s'écoulent de longs fleuves que l'on pourra toujours rattraper, avec le filet à papillons de la mémoire.

Flux et reflux de la prose post-hard-bop.

10:25 Publié dans MUS | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Littérature, Jazz

Groupe & ombres, version 361/437

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    Votre regard se charge d'ombre, la mêlée du temps sur l'épaule, et la griffe de l'histoire sur le fond drapé du ciel. L'universelle araigne n'est peut-être pas passée par ici, mais son souvenir s'y perpétue, de ce balcon, belvédère où les derniers instants du jour virent au bleu.

Arbre, ce n'est pas la peine d'ouvrir ainsi la gueule. Lion, ce n'est pas la peine d'effacer la trace de tes pas. N'oubliez pas le fard des phrases creuses.

vendredi, 03 novembre 2006

Amaryllis granité

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    Huit jours, soit le temps d'une glaciation. Je ne prends pas d'anisette avec mon amaryllis. Les murs ont des oreilles.

... 25 octobre ...

 

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... 2 novembre ...

Cette nuit, il a peut-être pris un méchant coup de gel. Les kakis, dans le garage, mûrissent gentiment, lentement, et je songe que Madame de Véhesse, la reine des amaryllis en quelque sorte, a peut-être laissé passer (ce qui ne lui est aucunement reproché) une note à l'unisson qui lui était principalement destinée.

 

(Cela dit, de mon côté, je ne réponds pas aux commentaires, en l'espèce parce que je n'ai pas de réponse.)

 

Ah, la voix de son maître (en double stéréo) !

10:53 Publié dans Unissons | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : Littérature

mardi, 31 octobre 2006

Délicatesses du dialogisme

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    C'est toujours la même histoire. (C'est une phrase banale : c'est toujours la même histoire qui commence toujours par la même phrase banale : c'était toujours la même histoire.) On grimpe les escaliers, on dévale la pente.

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Que des terreurs inopportunes, finalement. Le vieux bal infini des stations balnéaires. Il prit son flingue, Julien , ras-le-bol de ces courges, ces vieilles bourges. Ouais, je vais me la faire, sur son vélo. Tout de même, calme-toi, on n’a pas vu le bout du tunnel (ni la fin de tes conneries). Onaniste, va.

vendredi, 27 octobre 2006

Les maîtresses de T.S. Eliot

    Taste : au premier étage de cette cantine branchée et citadine, j'évoquai, la semaine dernière, les nombreuses fautes de grammaire de V.W., dans sa correspondance. Elle n'en est, évidemment, pas moins attachante, ni moins grande styliste. 

Talking of death and bullets, have you heard that Mrs Eliot is on the war path, said to have a carving knife with which first to skin Tom; then Ottoline; finally me? For she says Ott and I are Tom's mistresses; now as I never had a favour from that man its rather hard to give my life on the pavement. (Lettre à Quentin Bell du 26 juillet 1933. In The Sickle Side of the Moon, p. 207)

 

Le canard au caramel, réchauffé dans sa gamelle en plastique amélioré, n'était rien de fameux, pas goûtu ni goûteux. Non toujours non. Pas besoin d'un quelconque couteau pour le découper, et pas une once de sang sur le tarmac du trottoir, devant Taste.

jeudi, 26 octobre 2006

V/B

    À l'aller, dans l'Aqualys, près la brume :

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" Je fermai précipitamment mes cahiers et détournai la conversation sur autre chose. C'est-à-dire que je lui demandai s'il jouait au diabolo. Nous étions en pleine mode de ce jeu-là en 1908. J'y étais assez adroit, et quand le "nouveau" m'eut avoué qu'il n'arrivait pas à être bien brillant à cet exercice, et tu parles ! il était d'une maladresse... je sortis mes baguettes et ma bobine et lui fis une telle démonstration qu'il me demanda de lui donner des leçons de ce nouveau sport. Du coup, les rapports entre nous changèrent de nature, je devenais le professeur de ce Monsieur, en cachette bien entendu, je l'éblouissais à rattraper la bobine cent, cent cinquante fois à la volée, c'est-à-dire sur le fil tendu, d'un coup de bras, sans retricoter... mais plus personne ne sait de quoi je parle. Et ce n'est qu'au bout de deux ou trois jours que je découvris à qui j'avais affaire : mon élève s'appelait Miguel Zamacoïs."

(Louis Aragon. Je n'ai jamais appris à écrire ou Les Incipit (1969). Repris en "Champs-Flammarion", 1981, p. 29)

 

Au retour, dans le TGV, à la brune :

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" En cet Eden laborieux serpentent les routes étroites, montant sans cesse et descendant, et jouant avec l'horizon comme si c'était un diavolo, que l'on sait bien qu'on rattrapera toujours." (Renaud Camus. Le Département du Gers. § 186. P.O.L., 1997, pp. 93-4)

 

09:05 Publié dans Unissons | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : Littérature

mercredi, 25 octobre 2006

Vertes voltes

    Entre le premier et le deuxième but de l'A.S. Saint-Etienne, dans le huitième de finale qui oppose cette équipe à l'Olympique de Marseille, j'ai trouvé pas moins de douze très beaux portraits de dames en vert, dont aucun ne correspond à ce que V.W. écrivait, il y a 88 ans, à Vanessa :

I feel more and more convinced that advanced views are purely a matter of physiognomy. For instance the lady in green, with check trimmings in her hat and a face like a ruddy but diseased apple - one cleft asunder by a brown growth - had nother [sic] excuse for existence.

The Question of Things Happening. The Letters of Virginia Woolf 1912-1922. Londres : Hogarth Press, 1976, p. 286

17:54 Publié dans Vertes voltes | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : Littérature, Art

Starps, du sport

    Souhaitant évoquer de nouveau Sprats, le petit texte (entre science-fiction et parabole kafkaïenne) de David Bessis, je dois toutefois ronger mon frein, car j'ai prêté mon exemplaire à un ami très cher, mais pourrais bien signaler que j'ai échangé quelques courriels courtois et instructifs avec l'auteur lui-même, qui ne manquera pas de tomber encore sur cette page-ci, vu qu'il se tient au courant de ce qui se publie sur la Toile par le truchement des alertes de Dame Google. (Il n'a pourtant pas dû lire l'acrostiche que je lui ai dédié, vu que son nom n'y apparaît pas de manière suivie !)

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Or, je suis tombé, dernièrement, dans le petit livre de R.L. Brett, Fancy and Imagination (Methuen, The Critical Idiom), sur le nom d'un théologien anglais du dix-septième siècle, Thomas Sprat, qui préconisait, dans son History of the Royal Society, un style éloigné des embellissements et des fioritures de l'époque élisabéthaine. Cela est patent dans la citation suivante, qui donne la mesure de ce qu'était, pour lui, la réussite des académiciens de la Société Royale :

They have therefore been most rigorous in putting in execution, the only Remedy, that can be found for this extravagance: and that has been, a constant Resolution, to reject all the amplifications, digressions, and swellings of style: to return back to the primitive purity, and shortness, when men deliver'd so many things, almost in an equal number of words. They have exacted from all their members, a close, naked, natural way of speaking; positive expressions; clear senses; a native easiness: bringing all things as near the Mathematical plainness, as they can: and preferring the language of Artizans, Countrymen, and Merchants, before that, of Wits, or Scholars. (Thomas Sprat. History of the Royal Society. Section XX: "Their manner of Discourse".)

 

Enflures, digressions, amplifications : voici une esthétique résolument tournée contre les poètes précieux et les écrivains baroques. Que sont donc, à cette aune, les tentacules du narrateur de Sprats ? Sprats est-il un livre qui s'interroge sur l'amputation des tentacules, comme Paulhan jadis sur l'arrachage des fleurs de Tarbes ? Que dire de la symétrie entre les onze lettres qui forment le nom de David Bessis (5+6) et les onze qui forment celui de Thomas Sprat (6+5) ? Irai-je un jour manger des toasts aux sprats à Onzain ? Et surtout, par quel miracle ai-je réussi à composer cette note dans le délai imparti (la durée de Paranoid android, par Brad Mehldau) ?

 

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Further reading :

Dans la cité enfouie

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    Il était question de ce livre hier... Mais j'illustre toujours à côté...

 

" Sa grande fierté : la Chupicuaro. Comme si l'exact pendant du travail fragile de Ghertman sur le papier Canson était cette statuette venue du fond des âges, maintenant l'emblème célèbre des arts dits primitifs à Paris."

 

(François Bon. Peint sur le cul du diable, § 52. Textes en regard de portraits de Guy Joussemet par Alain Ghertman. Cercle d'art, 2004, p. 33.)

 

 

 

Je ne fais pas figurer la photographie de la Chupicuaro vue de dos, le pendant aussi, pourtant, et inévitable, essentiel, de cette vue de face.