mercredi, 05 novembre 2014
An Act with the Cat
“So what, you had an act with the cat?
Whenever you played a G, he puked a hairball?”
Cette phrase m'a fait rire, et rire encore en me la redisant, me la rejouant pour moi-même, longtemps après.
John Goodman est un excellent acteur, et Inside Llewyn Davis est un excellent film des frères Coen. La plupart du temps, je trouve les films vantés à droite et à gauche tout à fait lamentables. Là, j'avais eu l'impression, lors de sa sortie, que ce film était plutôt dénigré, donc bizarre effet d'inversion. Tout dans le film, le choix des chansons, la voix magnifique de l'acteur principal, Oscar Isaac, les dialogues superbes, les cadrages, la manière d'articuler sans excès le récit autour du double chat, tout est parfait.
09:35 Publié dans MAS, Narines enfarinées | Lien permanent | Commentaires (0)
samedi, 28 décembre 2013
des¶mes§vos↑
d e s d é s i r s
mes mésanges
vos Vosges
ma marinière
nos nostalgies
on ondule
t o n t o n i c
24.11.2013
22:50 Publié dans MAS, MOTS | Lien permanent | Commentaires (0)
mardi, 11 juin 2013
entends............
entends toujours
dans le vent de tes songeries
le coassement
glaireux des grenouilles
le raffût des merles
le labrador
angoissé
11:17 Publié dans Les Murmures de Morminal, MAS, Unissons | Lien permanent | Commentaires (0)
mercredi, 05 juin 2013
estoc pour le la
les pièges prennent le large
un coup d'estoc pour la marée
les poèmes sabordent à marge
tranche papier
le biiiiip inutile du
lave-vaisselle
les bonnets ne sont pas honnêtes
jurez
aurons-nous le choix
les poèmes prennent le large
le biiiiip donnera le la
11:13 Publié dans MAS | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 25 mars 2013
Brief an den alten Dichter (version française)
n'écris pas de sonnets – méfie-toi
des sestines – ne va pas
je t'en prie succomber au plaisir
puéril de pondre une série de haïku –
évite surtout de mettre au
goût du jour les ballades lyriques
(bordel de bleu, on est en 2013) –
laisse tomber ton amour des limericks –
et arrête de te complaire
dans ces contrepets que tu oses
nommer poèmes en prose – jette
au panier rondeaux et odes –
et surtout – je te jure
ce n'est pas un conseil facile –
écris pour un vrai lecteur pas
pour ces bribes guillemetées
Ce poème est une vraie première. Hier, dimanche, à sept heures du matin, j'ai composé un poème en anglais pour le nouveau recueil en cours, et, le relisant, recomptant, révisant, j'ai aussitôt eu envie de le traduire en français, ce que j'ai fait en quelques minutes. Les 16 vers ci-dessus sont donc ma première auto-traduction. Comme j'ai envie, depuis quelque temps, de traduire en plusieurs langues mes Douzains d'aise, voire d'autres textes plus anciens de ce carnétoile, ce n'est probablement pas la première.
09:25 Publié dans Aujourd'hier, Darts on a slate, MAS, Self-Be/Portrayal | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 11 mars 2013
On a retrouvé le livre égaré
Et donc plaid jaune, cadre avec chimères, visage semi-caché,
un lecteur poilu comme un grizzly.
06:00 Publié dans Brille de mille yeux, Ex abrupto, MAS | Lien permanent | Commentaires (2)
dimanche, 03 février 2013
Masqué
Mélancolie du mal.
Tristesse de la douceur.
Tangentes sur le vide.
Fariboles.
Désastre.
Mélancolie absolue, absolue noirceur.
08:24 Publié dans MAS | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 07 janvier 2013
Résolutions d'écriture pour 2013
Outre ce qu'il faudra(it) faire sur le plan professionnel (articles, traductions ?), je dois, en 2013, reprendre et surtout achever – au moins provisoirement – un certain nombre de chantiers d'écriture, certains ouverts depuis plusieurs années. Au vu des incises, points d'interrogations et ajouts de conditionnel de la phrase précédente, c'est mal barré. (Bien barré, en fait, ha ha.)
Je fixe donc ici la nécessité absolue de poursuivre/reprendre
- Album de limericks berrichons & autres limericks & tankas [1]
- Douzains d'aise [2]
- Entre Baule et Courbouzon
- Kleptomanies überurbaines
- Répétitions [3]
- Septains amphibies
et de reprendre/achever
- 732+366
- J'allaite le nouveau Kant, II
- Le Livre des mines
- Soixante-dix sept miniatures
- Un fouillis de vieilles vieilleries
Les formes poétiques brèves (quatrains & quintils, vénérales, sextiles, juno-lunaires, déroutantes&azalées, triolets) et d'autres projets (Un sang d'encre ? Sonnets doucement internationaux ?) suivront leur cours, cahin-caha, on peut l'espérer [4]. Du nerf !
[1] Malgré la facilité de composition, ce chantier tend à prendre l'eau ou à s'enfricher sans qu'on n'y prenne garde.
[2] Ceux-là s'écrivent très rapidement, sur smartphone souvent. Peu de risque que la pile ne grossisse pas.
[3] Me souviendrai-je des règles de composition ? rechercher dans mes dossiers le fichier Projet Perroquets
[4] La version initialement rédigée de ce billet comptait 1295 signes, mais j'ai fait quelques menus ajouts qui le font disparaître de la rubrique correspondante, ce qui est préférable, en fin de compte. Je n'ai choisi de citer, dans les deux listes ci-dessus que les projets pour lesquels je me fixe une obligation de résultat, en quelque sorte. D'autres, tout aussi amusants, sont pareillement en gestation permanente/différée/interrompue. Questions d'atelier.
09:33 Publié dans Clés du sol, Fièvre de nombres, MAS, MOTS | Lien permanent | Commentaires (3)
jeudi, 01 novembre 2012
Un micron, en classe de 4ème
Clément Rosset se trouva plongé dans un maelström d'hallucinations comme tombées de la plume d'un mauvais Lorca. Aussi se tenait-il à carreaux, face aux ballets spectraux dont l'art était consommé. Avoir manqué périr noyé ne lui avait toutefois pas fait fantasmer, sur le dos d'un vieux livre broché à couverture rouge, le nom affolant, grotesque, démoniaque : Robert Drowning.
ª¦¦¦ª
Petit salon, griffonnage, same old story.
Mais.
Mais, depuis, Aristotelis Valaoritis est entré dans ma vie, ever so slightly.
En tout cas, j'écris des Valaoritides sans jamais avoir lu une ligne de Valaoritis.
Dont acte : Santiago Amigorena dans les îles grecques — Clément Rosset aux Baléares.
ª¦¦¦ª
Il n'en demeure pas moins que, depuis mes premiers feuilletages du catalogue des éditions de Minuit, je me demandais si, avec un nom tel que le sien, on ne rêvait pas coups et blessures, plaies et bosses, Scapin tournant autour du sac, misères et galères, à moins qu'on ne préfère se ressouvenir de l'effet très curieux, de papier froissé, des emballages de bonbon de la marque Galéjade...
22:19 Publié dans 721, Diableries manuelles, MAS | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 01 octobre 2012
201-1000-1206
Il avait du mal à soupeser ces premiers mots d’octobre, ces premières heures du mois signant, au moins théoriquement, la fin de l’été. La voix qu’il écoutait, là, pourtant, était printanière, et le soleil contre la vitre sale de son bureau – lui aussi : printanier. Avoir commencé ce mois dont il souhaitait qu’il infléchît le cours de son travail – et peut-être, de ses projets d’écriture – en apprenant trois mots aussi rares qu’utiles (obèle, cotice et contre-cotice) n’était pas même un signe. Fallait-il les écrire en italiques, ici ? La très jolie et très élégante jeune femme qui, au moment où il était entré dans le parking souterrain des bords de Loire, attachait son vélo en frôlant de la main sa très élégante et très jolie jupe pourpre ne lui avait pas évoqué sans raison ce nom d’oiseau quelque peu mystérieux et cocasse, le Cordon-bleu à joues rouges. On n’en trouvait plus, dans la péninsule. Avoir achevé, aux derniers feux de septembre (onze heures du soir, le feu était une lampe de chevet), La Première défaite de Santiago Amigorena ne l’empêcherait pas de n’en rien dire encore, et de placer plutôt son premier texte d’octobre sous le haut patronage d’une autre plume : Fabienne Raphoz.
09:40 Publié dans MAS, Pêle-mêle | Lien permanent | Commentaires (0)
mercredi, 26 septembre 2012
Au bal
Squamate aglyphe, il se glisse dans une nouvelle journée à pas feutrés, craintif - craignant de se faire remarquer. Et à chaque nouveau bond perçu dans le mirage, le fouette-queue réinvente la roue. Ainsi vont les âmes, sans mal. Sur une banquette, assoupi, squamate aglyphe, il subit une existence qui a achevé de le recouvrir à la façon d'un habit collant, gluant, d'une coulée de miel, ou d'un masque dont le rétrécissement fit qu'il se substitua au visage. Au prochain tour de vis, au prochain arrêt, cet inoffensif squamate aglyphe passera sa langue sur ses lèves, se lèvera, cherchera sur l'écran de son portable le reflet de cette mèche étrange - le seul signe à échapper au masque, le seul croc effilé qui puisse le bercer, momentanément, de l'illusion qu'il est autre chose qu'un squamate aglyphe.
08:00 Publié dans Aujourd'hier, Diableries manuelles, MAS | Lien permanent | Commentaires (0)
samedi, 08 septembre 2012
À vélo
Tandis que j'achevais, avant-hier, la lecture d'Echappée, livre dans lequel Agnès Dargent imagine, à plusieurs reprises, de manière assez cliniquement morbide, comment elle pourrait périr sur la route, décrochée de son guidon, l'assassin de Chevaline flinguait le malheureux cycliste qui s'était simplement trouvé au mauvais endroit au mauvais moment, et ne s'appelle pas Fabrice.
09:29 Publié dans MAS | Lien permanent | Commentaires (0)
dimanche, 13 mai 2012
Mercredi après-midi
16:00 Publié dans MAS | Lien permanent | Commentaires (0)
jeudi, 29 mars 2012
Travail(ler) des images
« La marge d’image questionnée par Clément Chéroux n’est-elle pas emblématique de cette marge d’indétermination à laquelle toute recherche se confronte nécessairement dans son étude des vestiges de l’histoire ? On ne saurait clore la question en projetant toute l’histoire dans un absolu inimaginable. On ne saurait la clore en rejetant l’archive du côté de la « moindre image », ou de l’« image sans imagination ». Une image sans imagination, c’est tout simplement une image sur laquelle on ne s’est pas donné le temps de travailler. Car l’imagination est travail, ce temps de travail des images sans cesse agissant les unes sur les autres par collisions ou par fusions, par ruptures ou par métamorphoses… Tout cela agissant sur notre propre activité de savoir et de pensée. Pour savoir, il faut donc bien s’imaginer : la table de travail spéculative ne va pas sans une table de montage imaginative. »
Georges Didi-Huberman. Images malgré tout.
Minuit, 2003, p. 149
10:58 Publié dans Droit de cité, MAS | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 19 mars 2012
╚ Daddy gonna sing you a lullaby ╩
Avant de sombrer dans la langue de Peter Reading (qui est mort, pas en taule – pas à l’ombre, enseveli), j’avais – quoi ? Dévalé la pente, trouvé dans la boîte à lettres un paquet en carton, gigantesque (disproportionné), dans lequel se trouvaient, enveloppés de semblable carton, deux livres. Avant de remonter et de commencer à couper, à la table du salon, et au canif portugais, les pages de ces deux livres, déposé le carton d’emballage dans le conteneur du recyclage – ce juste avant le passage des éboueurs (il était cinq heures, ils sont passés à cinq heures et demie). ╚ Puis j’ai coupé, au canif portugais, et en lisant les poèmes au fur et à mesure, les pages d’Ingrès (qui doit son titre à un nom de même formation que progrès), laissant, du coup, Aa, pour plus tard. (Mais, dimanche, c’était déjà ça, et autre chose : Æ – dont je ne sais où trouver les deux romans, The Interpreters et The Avatars.)
↓ Ingrès de Wateau : le poète n’a pas pu ne pas faire exprès. (Inprès ?)
↑ Le conteneur du recyclage : ۩ (mais jaune)
19:36 Publié dans MAS | Lien permanent | Commentaires (0)
mardi, 24 janvier 2012
Karel Čapek : L’année du jardinier
Ce petit livre, que j’ai lu l’été dernier après l’avoir acheté – me semble-t-il – à Montolieu – sur la foi du nom de son auteur mais aussi des dessins très « anglais » qui l’illustraient, est un almanach parodique, un traité de jardinage à l’usage des bêcheurs amateurs, mais surtout des ironistes ou de leurs frères ennemis les nonsensicalistes (ainsi qu’on pourrait appeler la grande caste des limerickiens et autres pythonistes). Le lecteur risque de se lasser, car Karel Čapek abuse des mêmes formes rhétoriques (antiphrase, accumulation, prétérition) pour constituer ses répertoires saisonniers ; en l’occurrence, ce qui m’a le plus frappé, c’est que cet ouvrage donne l’impression d’avoir été publié sous forme de feuilleton, mais qu’à le lire d’un trait, le trait, justement, se renforce – au lieu de rester léger, à fleur de papier – et le charme s’évanouit quelque peu.
Comme j’étais à Cagnotte, chez mes parents, quand j’ai lu ce petit livre, je n’ai pas manqué d’y trouver de savoureux parallèles avec la folie potagère de mon père, ou avec la ferveur botaniste de mes deux géniteurs. Pour ma part, je n’ai hérité d’eux que le véritable amour des arbres fruitiers, donc des vergers. Même si c’est un hasard, je suis heureux d’avoir acheté il y a trois ans un pavillon de banlieue qu’entourent, tels de faméliques mais solides dieux tutélaires, deux néfliers, deux cognassiers et un prunier (d’ente). J’espère que, si creux soit ce billet (mais comment ne pas être creux, avec un texte de terreau ?), on me reconnaîtra le mérite d’avoir pris le temps de chercher, dans mon logiciel de traitement de texte, la majuscule Č, que je reproduis à l’envi maintenant que je l’ai dénichée (ČČČČ) et qui forme, outre la première lettre du patronyme de Karel Čapek, une sorte de silhouette rondouillarde évasée, jardinier dont le béret va jusqu’à s’involuer sous l’effet du soleil, du vent ou de la pluie, ces trois bienfaits calamiteux du jardinage.
Il sied de terminer cette brève notule par une phrase tout à fait séante, et qui forme, à l’ensemble, une temporaire conclusion :
« Il va de soi qu’au premier coup d’œil vous ne voyez du jardinier autre chose que son derrière : tout le reste, tête, mains et pieds, se trouve au-dessous. » (L’année du jardinier [1929], traduction de Joseph Gagnaire, 10/18, 2000, pp. 54-5)
15:35 Publié dans MAS | Lien permanent | Commentaires (2)
samedi, 05 novembre 2011
Aux yeux de Frumence
Ta moustache nous ensemence
Frêle maréchal des logis,
Quoique tu aies pour nom Frumence
Et si depuis longtemps tu gis
Hors du vaste décor lunaire
Où Henri Rousseau te dressa
Pour séduire celle qu'une aire
Aux bêtes fauves ne pressa.
C'en est ainsi, pauvre Frumence
Au prénom tantôt oublié
Inactif à toute romance,
Et sans rendre mon tablier
Que ma plumine trubliée
Ton souvenir réensemence !
16:16 Publié dans Aujourd'hier, Diableries manuelles, MAS, Sonnets de juin et d'après | Lien permanent | Commentaires (0)
jeudi, 15 septembre 2011
Râg
Chaque disque de Julien Jacob a, pour moi, de fortes connotations chronotopiques. Exaltante, la musique de Julien Jacob marque, frappe, dure.
Ainsi, la plupart des chansons du second album, Cotonou, sont associées, pour moi, au printemps 2006, lorsque je trimais avec bonheur sur ma traduction de Links tout en écrivant parfois jusqu’à quinze textes quotidiens pour/dans ces carnets. Râg, par exemple, évoque immédiatement le séjour de notre ancienne maison, rue Guillaume Apollinaire, pièce où je travaillais durant les journées où je me trouvais seul à la maison, mais aussi les textes que j’écrivais, le roman de Nuruddin que je traduisais, les trottoirs que j’arpentais pour aller chercher Alpha à l’école maternelle (il était, comme Oméga désormais, en moyenne section). À l’époque, j’ai écrit plusieurs textes directement inspirés de cet album (entre autres : un acrostiche).
Un album, la blancheur. Blancheur des jours passés, blanchis ou recolorés par le souvenir ? Toujours mon silence sera ponctué par l’exaltation (l’extase ?) bricolée (forcenée ?) que je ressens en écoutant, aujourd’hui encore, Râg. D'où l'hommage bancal, noir, heurté, fébrile. Encore une énième trace d'extase.
15:30 Publié dans MAS | Lien permanent | Commentaires (0)
C'est une piste (version 1000/1219)
Quartier de l’Europe, puis l’écran : Rien n’est sÛr, mais c’est une piste. Du simple mal de nuque, douleur ou friction comme un torticolis, on évolue vers la vraie migraine, et ce n’est pas le nouveau lit qui a empêché quoi que ce soit (pas non plus le réveil, avec lever à la clé, à 4 h 30). Un jeudi en demi-teinte, perdu pour le travail, mais on s’instruit quand même, ici et ailleurs — j’imagine simultanément une salle de classe, une scène de théâtre et une séance sur divan. Après avoir tenu le rythme quotidien, les pages grises ont subi interruption, journée lourde et de traviole. Rien n’est sûr, mais c’est une piste. (Ce texte, devenu toujours-déjà trop long, aurait dû figurer dans la rubrique Onagre 87. Du coup tout fout le camp ma brave dame.) De traviole, donc — comme il n’y a plus de limite, autant y aller franco —, la journée a permis d’assister à l’irruption, sur la scène, d’un espion qui n’était pas (encore ?) un dictateur. Il s’interroge. On lui répond : « rien n’est sûr ». Il s’agace. La migraine est impuissante à calmer sa paranoïa. Crossbones est arrivé, en trois exemplaires — c’est déjà ça. Sans le décompte de l’espace (murs gris éteints du quartier de l’Europe), on tape dans le mille.
12:00 Publié dans MAS, Pêle-mêle | Lien permanent | Commentaires (0)
mardi, 10 mai 2011
La Vézère, jamais jaune
Nous fûmes – extrêmement – déçus par la maison forte de Reignac. Pourtant, du haut des terrasses aménagées dans le roc, on voyait les lignes des peupliers que baigne la sèche Vézère.
« Il y avait là de grands prés, des noyers obscurs à la sortie du village, et plus loin des bois parcourus de multiples sentiers conduisant à des hameaux ; tout cela suivait la lèvre de la falaise, ça grimpait fort parfois, et il y avait des caches derrière des éboulis, des combes où rien ne se voyait que le ciel, des haltes secrètes sous des hêtres. »
En revanche, sur le petit chemin qui conduit à la double bouche de Font-de-Gaume, tout semblait en harmonie, dans la verdure escarpée, et nos âmes en apesanteur.
« C’était Lascaux au moment où les célibataires accroupis épousent leur pensée, conçoivent, brisent les bâtons d’ocre… »
Dans d’autres mondes, impossibles, on sentirait le vent souffler au fond du crâne.
« La blessure n’apparaissait pas ; le cou blanc pendait de ce côté-ci, le bec s’allongeait comme pour le vol, à col étendu. »
Et la craie épouse les contours d’un vol de grues, dans les nuages.
La Grande Beune, pp. 27, 70 et 36.
14:48 Publié dans MAS, Tropographies | Lien permanent | Commentaires (0)
dimanche, 01 mai 2011
Le Mât noir, dialogue
– Tu as lu ça ? tu as vu ça ?
– Et toi ? tu as vu ta tête ? qu’est-ce qui t’arrive ?
– Des blagues. Du blafard. Violent.
– Quoi ?
– Une pièce. De théâtre. Dans le petit manoir de Stanislaw Witkiewicz.
– Ah oui…
– Figure-toi qu’on y apprend que « toutes les chiennes sont castorisées », puis que « nous allons nous gaver comme des castors », et enfin, à l’acte III, un cocu veuf pardonne à un complice du cocuage « parce qu’il n’y a que vous pour sauver mes chiennes de la castorisation ».
– Castoriser ? castorisé ? castorisation ?
– Non, je ne sais pas.
– Sinon ?
– Sinon, quoi ?
– Sinon, quoi ? quoi ?
– C’est un drame spectral.
– Hein ?
– Une histoire de fantômes, de mort. Une sorte de Lorca tchekhovien en plus burlesque, assez Crommelynck quoi.
– Ah, je vois. Du Witkiewicz, donc.
– Oui. Très fin.
– Sinon ?
– Sinon, à l’acte II, « on aperçoit le manoir entre les arbres », puis Kozdron, un brave type qui prétend ne pas avoir trompé le cocu veuf alors qu’en fait il était bel et bien l’amant du fantôme (de la fantômesse si tu veux), lance que « le soleil brille, il fait beau, et j’ai l’impression que tout est recouvert d’un duvet noir », avant de dire, de manière dédoublée, figurée mais redondante : « j’ai un torchon noir devant les yeux ».
– Ah. Curieux, pour une histoire de fantômes. Ça me rappelle le dernier album de Fersen, spectres et loups-garous partout.
– C’est la mode.
– Non, mais lui, justement, se détache totalement du côté citationnel, post-moderne etc. pour assumer totalement le côté littéraire, presque littéral, de ce fonds de commerce.
– Ah ?
– Oui – et toi, tu comptes jouer la pièce ?
– Moi ? non ! pourquoi dis-tu ça ?
– Tu en connais pas mal par cœur, déjà.
– Oh, j’ai pris des notes. Et tu sais, ce qui me frappe…
– Quoi ?
– Par delà ce que tu disais, qui fait qu’à l’époque contemporaine les histoires de fantômes sont toujours des motifs, une spectralité au cube…
– Oui ?
– Les passages que je t’ai cités tout à l’heure, les citations de Kozdron… Ces phrases ponctuées de noir, pour une pièce dont le titre et le lieu d’action sont un manoir…
– Oui, quoi ?
– Eh bien, c’est en polonais. C’est forcément un hasard de la traduction.
– Oui.
– Ou un fantôme polyglotte qui joue des tours.
– Oh, dis donc, ça, c’est du théâtre !
– Oui.
21:09 Publié dans Les Murmures de Morminal, MAS | Lien permanent | Commentaires (1)
vendredi, 08 février 2008
Vendredimmolés
* All the Pretty Horses
* Carpenter’s Gothic
* Child of God
* Dr. Sax
* Outer Dark
* The Madonna of Excelsior
* White Teeth
* Wittgenstein’s Mistress
Huit groupes nominaux, dont un titre honorifique, deux cas possessifs et deux compléments du nom. Trois de ces livres j’ai lu (il y a longtemps, pour certains). Je ne les ai pas empruntés pour moi. La roue tourne.
11:35 Publié dans MAS | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : Ligérienne, Littérature
mercredi, 24 octobre 2007
Un franc succès
Quand la terreur trouve son rythme de croisière, que les emportements du rouquin prennent le dessus, la barque dévie de sa juste route, et vous voici ainsi englouti, comme si de rien n'était, à l'automne du corail, pour ne pas déflorer encore le peu de mystère qui reste.
Alors, dans le miroir, que voir ?
Parfois je suis face au miroir et ce type me hurle à la face You stand in my way / With nothing to say
En plus il est teint en brune .......... ........ ...... .... ..
Alors, que voir dans le miroir ?
11:00 Publié dans MAS | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : Poésie, Fiction, écriture
mardi, 09 octobre 2007
Outrages
Est-ce le signe d’une mentalité torturée, ou encline, du moins, aux aspects les plus douloureux de la foi ? Les Bretons nourrissent une vraie passion – sans jeu de mots – pour les figures de Christ aux outrages et de Saint Sébastien transpercé de flèches. Comme tout ne saurait être simple, Saint Jean-Baptiste est, lui aussi, très représenté, mais presque toujours en gai triomphateur portant l’enfant Jésus dans ses bras ; les statues de décollation, qui feraient pourtant écho au Christ ligoté, n’abondent pas.
Ainsi, même dans une basilique dédiée à la Vierge, comme Notre-Dame du Folgoët, et où foisonnent les statues de la Vierge, on ne manque pas de distinguer, à quelques pas l’un de l’autre, deux Christ aux outrages, l’un robuste et serein, l’autre contrit et fruste. Les Piéta sont également plus nombreuses que les Vierge à l’enfant.
[21.08.2007.]
18:46 Publié dans MAS | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Bretagne, Photographie, écriture
mercredi, 03 octobre 2007
Sabbat des sorciers
Shelley hors de sa coquille
Gulliver chassé par les mouettes
& Joyce au comble de l'extase
Dickens guetté par l'épaisseur
Beckett sourd aux injonctions
Roderick dur comme une trique
& moi perdu dans mes pensées
(29 septembre)
10:30 Publié dans MAS | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Poésie, Littérature, Ligérienne
samedi, 08 septembre 2007
Le Prédateur des blogs
Quand il a coupé le contact de sa Clio, Matthieu Mesplède-Morandini a entendu que la Nouvelle-Zélande menait 14 à 0 contre l'Italie au bout de huit minutes de jeu. Le temps qu'il achète diverses fournitures scolaires pour son fils aîné au supermercado et de reprendre le volant, les All Blacks avaient ajouté vingt-neuf points à l'addition. Pourtant, les courses n'avaient duré qu'à peine un quart d'heure.
À la caisse, Matthieu Mesplède-Morandini suivait un couple qui, songeant sans doute que la foule compacte du samedi après-midi autorise ce genre de fantaisie, avait eu la très bonne idée de vouloir payer ses achats en trois blocs distincts ; la jeune femme laissa tomber un cahier dont la première page était une sorte de C.V.. Matthieu Mesplède-Morandini vit alors qu'elle se nommait Marianne Martin et habitait à Monnaie. Il eut même le temps de mémoriser l'adresse électronique de l'imprudente.
Imprudente ? Oui, assurément, d'ignorer que Matthieu Mesplède-Morandini sert de modèle au psychopathe violeur du Prédateur des blogs...
(Un double Ricard, et vite !)
15:00 Publié dans MAS | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : Fiction, Ligérienne
mercredi, 05 septembre 2007
Histoire d’un livre à couverture rose
Le petit livre à couverture rose – comme tant d’autres du même auteur – aura été lu par trois personnes au cours de ce seul mois de juillet : tout d’abord la mère, qui l’aura choisi par désoeuvrement, par défaut en quelque sorte, avant que le type ne le lise, lui, car il l’avait acheté en mars, avec toute une pile, et aime bien, de temps à autre, lire un texte d’Inoué Yasushi, cette prose plutôt classique, académique même, avec ses tons retenus, ses éclats soudains mais jamais plus vifs que le soleil ou le miroitement de l’eau après le plongeon d’un grèbe, et la grand-mère elle-même avait fini par se rabattre sur cette Histoire de ma mère (en fait, le récit de la sénilité gâteuse de la mère d’Inoué), car l’exemplaire, lu depuis trois jours déjà par le type (le pauvre type), avait été laissé là, sur les briques près de l’âtre, comme abandonné par une main nonchalante au bord d’être en proie au désordre, et donc, en moins de trois semaines, la couverture rose était passée de main en main, et le petit livre avait été lu par l’épouse, le mari et la grand-mère, successivement, ce qui avait pu alimenter quelques conversations, et d’autant mieux que le sujet en est universel. J’écris cela, et l’ordinateur repose sur la table basse en verre, où figurent seulement un livre (plus épais que l’Histoire de ma mère) et un ticket rose Zoo d’Asson Parc aux kangourous qui pourrait servir, un autre jour, une autre fois, de marque-pages à un autre exemplaire de la « Bibliothèque cosmopolite ».
[29.07.07.]
08:00 Publié dans MAS | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Littérature, écriture
mercredi, 16 mai 2007
Rue des masques
Il y avait si longtemps que rues, plaques, places, gouttières, bribes de murs avaient échappé à leurs regards que soudain ils se dirent que ça n'en valait plus la peine, la coupe était pleine, et du coup à quoi bon chercher encore la pierre philosophale sous les noms, les signes, les affiches, aux balcons, sous les mots qu'embrase le vent ?
16:40 Publié dans J'allaite le nouveau Kant, II, MAS, Rues, plaques, places | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : Photographie, écriture
mardi, 03 avril 2007
23 autoportraits au bord du gouffre
Il nous défie.
Il s’efface, son manteau d’encre fait écran.
Deux visages spectraux hantent le fond de cette fière stature.
L’œil noir, les traits se diluent.
Orbites enfoncés font lunettes.
Placé debout dans une salle il épie.
La fine moustache de celui qui dessine sculpte un visage harassé.
De sa silhouette à contre-jour, toujours il guette notre regard.
C’est à regret qu’il se détache outremer.
Les manteaux accrochés, le fauteuil pour chevalet, la canne dans la ligne de l’aquarelle au mur, tout converge vers ces yeux profonds.
Épiant, il peint.
L’air mauvais, pianiste phtisique aux doigts endoloris, crache le sang de sa palette.
Un spectre en soutane tenant un chapeau rouge.
La lune rouge voue ce balcon à la folie.
――― Les rectangles glissent du ciel. ―――
――― C’est un linceul recouvrant les rêves. ―――
Un crâne agité succombe au succube hallucination.
Cadavre furieux toujours il nous défie.
Le voici revenu ; il reprend des couleurs.
De la casquette comme un masque.
Avec le sépia qui dégouline la tête semble arrachée au col et au manteau toujours noir d’encre.
Flottent couleurs lumière noyée les veines vibrent.
Respectable, en onze ans il a comme rajeuni, mais son regard foudroyé plus que jamais emprisonne le nôtre.
04:40 Publié dans MAS | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : Art, Autoportraits, Peinture, écriture, Poésie, Musées