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lundi, 02 avril 2007

Lip n' Nuit

    Valérie ? Valérie avait raison. En quittant la rue B. à sept heures et quart il valait mieux prendre le bus A puis rejoindre le quai en traversant le fleuve. Passer par les prés verts. J’étais arrivé rue B. à cinq pile, après avoir assisté à une émeute – jeunes squales black se foutant sur la gueule – qui s’est achevée, à ce que j’en ai perçu lointainement, par un déluge d’applaudissements. À cinq pile, LA FARNÉSINE, JARDINS dépassant de la poche droite du manteau, arrivé près de la porte d’entrée de l’immeuble j’ai vu Antoine du Parc et Zam Roche occupés à photographier un couple visible pour moi seulement de dos : aussitôt confronté à eux, je sus que c’était M. Kunda avec son épouse.

Le train a démarré, ça tangue, je me suis assis pour écrire ces lignes après avoir traversé le train à la recherche de Véronique, pas trouvée. Véronique ?

Pin lutin

    Onze heures du soir.

Me voici guetté par l’insomnie, ne sachant par où commencer – une des nombreuses notes de lecture projetées qui s’entassent ? – recopier au propre les billets jetés sur un bloc-notes Tulip Inn, samedi durant ? On ne devrait pas boire tant de thé, me glisse la petite voix fureteuse, avec un billet aller pour le Purgatoire. Ce soir c’était Solaris, celui de Soderbergh,  toute petite chose.

10:10 Publié dans 410/500 | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : Cinéma, écriture

mardi, 27 mars 2007

L'arbre Congo

    Les herbes vrombissent dans le sang discret de Juan-les-Pins, consolées de l'adversité malgré l'envers d'un sprint tant raté. Leur paillage se froisse d'un plissement venteux, mutique. Les premières herbes de fronde devaient bruisser de la même moisson.

20:40 Publié dans Xénides | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Poésie, écriture

lundi, 26 mars 2007

Cause halieutique

    Voici une coupelle d'olives au fenouil. La mariée était en noir. Vers la fin du mois d'août les orages venaient, toujours les mêmes, secs et terribles, toujours au moment des grandes... On peut considérer que le roi René n'a pas connu la Renaissance. Tu ne vas pas en faire tout un roman, quand même. On a les embêtements les plus divers. Fred Astaire tapote d'un doigt agacé sur le verre poli de la table, dans cette salle de conférences où pas un chat ne passe. Quand Nijinski entra, je n'étais plus moi-même. J'allais lentement, à pas de tortue. Elle m'a alors hameçonnée, alpaguée avec ses appâts.

dimanche, 25 mars 2007

Brocolis à la lune

    Les brocolis sont dans la cocotte. Avec on pourrait manger des pieds paquets (tant va la cruche à l’eau (en relisant Nana)). À la belote tu joues comme un gros naze. À douze ans je connaissais par cœur l’acte I de Cyrano. Il prend toute cette histoire d’usurpation d’identité très au sérieux. Tu joues comme un pied dès que c’est aux cartes. Elle n’avait pas voulu qu’on empêche son hamster de s’empiffrer. Après quelque temps, on décida de remplacer la lampe de chevet par une lampe d’architecte. Les plaques et tout ce qui est marbrerie, c’est ça qui pue la mort, me disais-je en descendant acheter les croissants et en passant devant la maison Cavey puis la maison Tourtault. Toi tu rêvassais à la lune.

Piste cyclable

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    Je lavais pendant qu'il m'avait su, ce vaisseau. Il a une rue transversale, même vent sous-argenté, il sait si vous avez des regards sur vous. Quand vous tintez devant lui, c'est peut-être si vous étiez entre les portiques qu'ils mettent dans les aéroports, sauf que lui, ça vous tient dans la gomme.

samedi, 24 mars 2007

Tap tap

    Blasé, je chevauchais dans Bordeaux, mais mon visage, pâle à ronger son frein, à galoper le fer aux mâchoires, se dissolvait. Un cauchemar... 

Je me mets à tirer ma valise par sa poignée latérale et le vacarme des roulettes sur le trottoir inégal me paraît propre à réveiller la rue entière mais les façades fuligineuses restent mortes. J’ai chaussé mes bottines à talons hauts pour le voyage. Elles émettent sur le béton ce type de claquements qui annonce le crime. Ce tap-tap si féminin, si tentant. J’avance aussi vite que je le peux, la poitrine oppressée. Mais, alors, le martèlement précipité de mes talons dénonce ma peur et, du coup, l’accentue. (Marie Ndiaye. Mon cœur à l’étroit. Paris : Gallimard, 2007, p. 191)

 

... de mort n'arrive jamais seul.

La Sorcière Célèbes

    Le soleil a fini par se cacher, le vent frisquet par se lever. Je vois la figurine de Louis XIV, en plasticine. Nagui a une fâcheuse tendance à inviter tout le temps les mêmes tocards. Ce doit être au loto qu'on lance carton plein. Je ne goûte guère la poésie de Lord Alfred Tennyson. Quand l'extraterrestre poilu devient rouge de colère, zapper d'urgence. Pour Edvard Munch, dont l'on vient de retrouver une gravure volée, le rouge était plus qu'une couleur. Le cri que tu pousses ne réveillera personne. Laurent Evrard a trouvé presque aussitôt le volume d'essais de Mongo Beti que j'avais cherché en vain pendant plusieurs minutes dans la librairie. En vingt minutes, on a trouvé le temps d'ironiser sur les critiques qui ont écrit qu'Un roman russe était "le meilleur livre d'Emmanuel Carrère". Ce n'est pas à la roulette qu'on s'écrie carton plein. Quel petit vélo à guidon chromé au fond de la cour. Faire un roman seulement à partir de cartes postales et de chromos, je ne pourrais pas. Mais à quel jeu de cartes enfin peut-on s'écrier carton plein ? Bourré comme un coing, plein comme une outre, blindé comme le Clémenceau, il s'avançait vers moi en titubant. Des textes de De Quincey, le plus célèbre est aussi le moins bon. L'éléphant de Max Ernst s'avance aussi vers moi, peut-être suis-je ivre aussi. Face à la librairie Le Livre, le Monstre diminue, jour après jour.

jeudi, 15 mars 2007

Faux enfin

    Porté le deuil (comme un fardeau) il faut reprendre. Pas de virgules seulement des points. Peu écrit ces derniers temps ce dont je me suis aperçu en faisant enfin une sauvegarde de ces carnets (par catégories) mais l'essentiel est d'avoir continué par devers tout à écrire un peu ne pas laisser s'atténuer l'empreinte et se déshabituer. Le deuil ne passe pas on le porte avec soi. Il est bon de rester intoxiqué à écrire même sans écrire.

mercredi, 14 mars 2007

Bouster hors

    L'auteur du 2244ème commentaire gagnera un tapuscrit original de J'allaite le nouveau Kant, ainsi qu'une dédicace personnelle.

(1. Quelle est cette mégalomanie ?)

(2. Pas inspiré, le gars, en ce moment. C'est qu'il nage la nuit dans le pays des morts* (cette vieille traduction d'un poème de Jared Angira revenant me hanter).)

 

* Les doigts fourchant sur le clavier avaient écrit "le pays des mots", lapsus si faux. C'est un pays sans mots.

dimanche, 04 mars 2007

« semblable phrase en semblable situation »

    Une fois Dans la maison… écrit, il était six heures moins le ¼, et très vite je retrouve le texte en question, très long. Il se trouve dans un document Word, à la date du 19 juillet, s’intitule Méandres du mercredi, à l’aube, et je ne sais plus si je l’ai à la fin publié.

Ici, comme je l’écrivais alors, je me connecte rarement, un jour sur deux au plus, et je n’ai d’autre recours, que d’effectuer des recherches dans les archives de mes textes sous Word (dossier Writings, sous-dossier Blog, sous-sous-dossier MuMM), où ne trouve aucun des textes écrits en ligne, mais seulement ceux que je « prépare » sous traitement de texte. Aucun moyen, non plus, de vérifier les archives de MuMM en ligne, sauf à attendre la prochaine connexion.

Dois-je l’écrire enfin (en Palatino 12), ce texte de juillet, écrit aussi entre cinq et sept heures du matin, s’il ne raconte à peu près rien, m’a, à la relecture, beaucoup intéressé. Irai-je jusqu’à vous conseiller de le relire, intrépides mais fidèles lecteurs ?

Dans la maison…

Cinq heures vingt.

    Dans la maison morte, lourde de vie, de tant de moments vécus, d’instants à vivre, riche de rires lointains, il me faut le silence. Réapprendre à écrire, et pourquoi toujours se réveiller à cinq heures du matin, depuis deux semaines et demie, et peut-être même avant ? Les musiques, les paroles, les éclats qui habillent le silence, je les porte en moi.

Pour faire chauffer le café et le boire sans faire de bruit réveillant le reste de la maisonnée – j’ai le sentiment d’avoir écrit, l’été dernier, semblable phrase en semblable situation – je l’ai fait chauffer en m’éclairant d’une lampe de poche et me le suis servi dans cette timbale de plastique bleu qui sert aussi de couvercle à la bouteille Thermos du voyage.

Il y a, depuis ces dix-huit jours, des rêves si nombreux, si fréquents, que ce sont sans doute eux qui me réveillent. Venez-vous me parler la nuit ? Mon athéisme m’assure que non, depuis ces pleurs près de votre pierre ; des souvenirs de romantiques allemands me soufflent qu’après tout, oui, pourquoi pas…

Hors de question, dans tous les cas, de créer une crypte. Pas de chapitre à part, non plus : la vie reprend son cours dans la discontinuité. Nul dialogue avec les ombres. Sur le tourne-disques, avoir écouté Jeff Beck et Rod Stewart – deux chansons anciennes de Dylan – un disque plaisant de Ferrat – Captain Beefheart. Et à chaque seconde, chaque note, chaque grain dans la voix, vous entendre, vous imaginer.

Il reste qu’il y a des milliers de pages, des centaines de disques de jazz, des bouteilles, tous indécis à dessiner leurs contours, dans les fumées du futur, et dans la maison riche encore d’instants à vivre.

lundi, 12 février 2007

Sapin fausse neige

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    Hier, à Amboise, face aux murailles, caché derrière un tonneau, une poubelle et une de ces jardinières laides façon caisse où sont plantés des arbres rachitiques...

... un sapin recouvert de fausse neige s'apprêtait à finir ses jours à la benne.

(François Bon, dont j'ai déjà parlé ici, ou encore ailleurs, a photographié il y a un mois environ une vraie théorie de sapins livrés aux éboueurs. Rues de Paris et de Navarre, société de consommation...)

dimanche, 11 février 2007

Ciel clins coupés

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    On tarde un peu à voir, dans cette vue du ciel, les arceaux (clins, cils froncés, empreintes de cerfs dans la terre bleue peut-être) qui traversent l'azur, et traversent l'image de biais, à la parallèle des nuages effilochés, comme des parenthèses de brume qui seraient nées en bas à gauche, vol de grues dont la queue - sur la fin du thermique trop tôt abandonné - figure presque en haut, tout à droite. C'est que (est-ce la vitre sale) j'avais posé, conduisant, l'appareil photographique allumé, objectif vers le haut, dans le vide-poches qui occupe le milieu du tableau de bord, et que me prit (sait-on pourquoi) le caprice d'appuyer sur le déclencheur, à un feu rouge. Ciel bleu, nuées, parenthèses alors que j'attendais quelques bouts de bagnole.

mardi, 30 janvier 2007

Maritornes

    Sur le premier disque d'Albin de la Simone, le chanteur est grimé en panda. Mon fils a un panda en peluche qui se nomme Pistache. Au restaurant La Chope, je vous recommande la terrine de queue de boeuf avec foie gras aux pistaches. Ils servent aussi, à La Chope, une soupière de mousse au chocolat Valrhona. Passe-moi la soupière, et Jean-Marc Thibault.  De Roger Martin du Gard, je n'ai lu que Jean Barois. C'est à l'été 83 que j'ai vu, la seule fois de ma vie, le Pont du Gard. Quelle ne fut pas ma surprise de découvrir, un jour, sur une réédition en CD, un inédit de Manset (Le Pont). Il y aussi Pavillon sous la neige, du même Manset. Il m'arrive de penser que je deviens dur d'oreille.

dimanche, 28 janvier 2007

Ģŷpầếŧệş

    Samedi a passé la promesse des fleurs. Pourtant encore les tulipes, roses et crème, même si elles ploient un peu, quoique l'eau fût renouvelée, offrent au regard le trident à six pointes de leur pistil. Maintenant aussi ce sont les Klavierstücke op. 118 & 119 de Brahms, merveilleux, sous les doigts d'Idil Biret : les puristes disent, écrivent à qui mieux mieux qu'elle est nulle ; certes je n'y connais rien, mais ça me semble curieux.

Samedi a passé la promesse des fleurs, et encore une écoute éblouie de la Turangalila, comme une amarre à l'amour, comme la joie chamarrée, dans les brumes du soir naissant qui n'a cessé de se prolonger, aux vapeurs du café, du silence. Le chat noir reflets bruns a fait la fine bouche en passant près du plat avec restes copieux des maquereaux, l'air de dire qu'on ne l'y prendrait pas, à ces nourritures rustiques ou clochardes.

Le Scherzo op. 4 n'est pas mal non plus, un peu appuyé, orageux (mais il faut des orages).

A Flor do Mar : hier soir ; une autre fois.

lundi, 22 janvier 2007

Arrivederci

    Toujours il pleuvra des cordes. Que ça pince ou non. Comment sinon naîtrait ce son mat de la peau doucement frappée, dans l’arche de Noé, alouette d’écorce – orques – et requin dans l’obscurité ? Un train suit la voie ferrée sur des kilomètres de ponts, de banlieue, près d’échangeurs, à faire grincer sans cesse et sans ménagement les éclisses des traverses, puis une voix d’oiseau, un chant enfin émerge des brumes que traversait le train. En entendant ce chant, je me dis que cela fait deux semaines que je voulais prendre le temps nécessaire, ces 1956 secondes, pour traverser la France du nord au sud puis de nouveau du sud au nord, un road movie illustré à la clarinette, forme de moyen métrage pour tous trajets, sans aide à la navigation. Le regard suit le train, mais tout le corps danse, aux appels des peaux tannées, de la mélopée comme vocifération, et la danse n’a d’ailes qu’obscures. C’est tout comme un grand vol de corneilles heureuses dans l’aube d’hiver. C’est tout comme.

Loin du train, maintenant, et loin de l’arche, une corneille quitte les rangs pour aller houspiller des étourneaux querelleurs et piailleurs. Sous les cordes qui pleuvent, on ne le dira jamais assez, que ça pince ou non, il y a le bruissement des forêts dénudées, cette saveur exquise des étangs découverts au détour d’un bourbier, cette extase à se perdre, les bottes enfoncées dans l’argile noirci, tandis que planent, virent de bord encore les corneilles. Même au cœur, même au creux de ces forêts abandonnées aux bourbes de l’hiver, on ne s’empêche d’imaginer – quoi – les doigts de Léon Francioli qui tissent glissent, même en n’ayant jamais vu Léon Francioli ni de photographie de Léon Francioli. Perdu, les bottes crissant dans l’argile, on regarde l’étang où aucun cincle ne plonge, et c’est encore une autre hallucination : Michel Portal nous emmène à l’autre bout de la France, en Camargue bien sûr, ou en Bretagne – c’est pareil. Égaré, les mains accrochées à l’écorce du vergne, on regarde l’étang, on tapote contre l’écorce, doucement, tout en contemplant l’eau morte sans clapotement, et, sans quitter l’ombre proche du vergne, on imite, malgré soi, les mains de Pierre Favre sur les peaux tannées. Je sais désormais que je suis seul au milieu de la forêt, que le road movie s’achèvera, peut-être sur l’aire de repos déserte, à part un semi-remorque en travers et pas la moindre silhouette visible dans la cabine. Je sais que j’aurai dit au revoir et que jamais pression de la main droite sur la main gauche n’aura été plus douce, ni plus mesurée, dosée. La peau pas ne frissonne, elle résonne, et je ne reviens pas sur mes pas, j’avance, dis adieu au vergne. C’est sans sens caché, sans cachotteries, le train s’emballe, oh ne chantez pas là.

Essayer d’écrire un texte que je chanterais dans la lumière du tumulte, en collant de très près à ces rails, à ces routes, à cette fine pellicule de souvenirs – est-ce possible ? Longé l’étang, il y a un long talus. Personne n’y a laissé de feu, personne construit de cabane, personne en moi ne frissonne. La peau encore résonne. De quoi ? des cris des corneilles, du chant de la cognée, des voix intérieures. Tout ça des foutaises. Longé l’étang, je sais que je pourrais passer deux heures à compter les strobiles sur cette branche, puis les écailles à peine ouvertes des strobiles, puis les imaginer dessinés, les imaginer photographiés, les imaginer dans la lumière du tumulte, passer plus de temps encore à enlever puis remettre puis enlever puis remettre cette virgule entre ça et des. Au début elle y était puis elle n’y est plus. Longé l’étang, il y a un baradeau, et les corneilles au-dessus de ma tête maintenant s’éloignent puis reviennent, comme dans les noirs d’Odilon Redon ce terrible jeu de bonneteau. Signes de ponctuation, swing des cordes qui pleuvent, et la chanson qui trouve son refrain, à peine a-t-on longé l’étang. Je sais que j’aurais pu passer tout ce temps, ces secondes égrenées strobiles, à écrire un texte que je chanterais tous les jours jour après jour dans la lumière du tumulte – mais si le cœur l’âme la peau je ne sais pas moi si cela si ça ne veut pas chanter, on reprend seulement la route, longe l’étang, tire sur la bride, remonte dans le train ou mieux traîne dans la corbeautière, une fois longé l’étang. Finir sur lourdes portes.

dimanche, 21 janvier 2007

Fini d'y croire

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    Entre les lectures poussées de Michaux, depuis un mois, et les journées hantées davantage chaque journée, j'avais peut-être oublié d'ouvrir, parfois, les yeux. Aujourd'hui, j'ai photographié, sur un mur du quartier où je réside, une fissure mescalinienne qui est aussi, dans mes souvenirs, l'image des lignes de vie et des délires enfantins, dans la cour de l'école primaire, quand nous nous imaginions tous vivre entre quatre-vingts et cent quarante ans. Prêter aussi l'oreille à la Rhapsodie roumaine d'Enesco n'y changera rien ; même sursauts et virevoltes s'inscrivent au long de l'échelle effilée, dont les répétitions sans fin n'entretiennent qu'un lointain rapport, finalement, avec le peyotl.

jeudi, 18 janvier 2007

Eau douce glacée

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    C'était le dernier décembre, face à l'enfilade et aux dômes. Je t'offre un verre d'eau glacée Même d'autres rumeurs montent, des champs de maïs coupés à ras. Ne le bois pas distraitement Quelle âme ne vibrerait pas, à ces tristesses sourdes. Il est le fruit d'une pensée Terreurs sourdes, aussi, comme une eau lourde qui s'échappe vers l'océan, renversent les désespoirs. Sans ornement il ne faut pas résister c'est inutile. C'était décembre, face au clocher, à l'enfilade.

lundi, 15 janvier 2007

Hope Ring True

    Des monceaux de poussière et des amas de boîtes de conserve traînent dans mes rêves, y mêlent leurs sales odeurs, comme je sens venir à moi la nuit le long de la voie ferrée, comme un nuage passe dans les yeux de l’enfant puni, et le miroir encore se ternit de poussière, et d’odeurs rances, de tristes rancœurs, comme la nuit nous environne d’un châle ténébreux, vertigineuse absinthe, à effleurer de tous bouquets la saveur, et encore les mouflons descendent en cascade aux yeux de promeneurs perdus dans les alpages, les isards prennent la tangente sans tambour ni trompette, comme alors que j’écris deux puis trois cordes pincées tourmentent le crépuscule, et dans les yeux des ténèbres je me retrouve, déraille, pour qu’enfin surgisse, jaillisse peinturlurée la montagne nauséabonde et poreuse qui troue le ciel comme un désert de neige, et à force de percer le ciel de cuivre tabac, la pointe du pic découvre d’autres paysages, d’autres rivages, des mers abandonnées, au creux même des alpages.

 

[13 janvier, prima hora, dans le TGV]

10:10 Publié dans Pêle-mêle | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Poésie, Jazz, écriture

dimanche, 14 janvier 2007

Dans son bec un fromage

    Jardin du Ranelagh, deux heures moins le quart.

Flot ininterrompu de voitures, et pourtant enfants qui jouent au ballon, jusque sur la rue. Sur une rue où ne passe aucun véhicule, un bambin tape dans un ballon orange fluorescent que lui renvoie son père (grand-père), qui doit, sous son imperméable beige, avoir le bras en écharpe (forme protubérante et manche droite vide).

J’écris ceci sur l’une des places de l’hémicycle de pierre qui borde la statue de La Fontaine par Correia (1983). Il faudrait avoir un appareil photo avec soi, et puis non puisque je trouverai des reproductions de cette statue – pas très réussie d’ailleurs mais émouvante – sur la Toile. De la place où je suis installé, je vois le profil du renard qui se pourlèche et, si le corbeau penché vers lui m’est nettement visible, seul le quart supérieur du camembert (car c’est un camembert !) n’est pas caché par le socle. La statue a été fondue en Italie (références au dos du socle en italien, pour ceux que cela intéresse).

Une vieille gitane trimbale ses trois poneys délabrés dans la partie nord du parc, sans qu’aucun enfant ne se préoccupe d’eux ni d’elle. De l’autre côté, une cabane fermée, rayée de blanc et de vert, aux couleurs des marionnettes du Ranelagh, annonce qu’il s’agit de la fermeture saisonnière d’hiver.

Gorilla Biscuits / Dance and Grow

    Vingt minutes avant le départ du train, il monte dans le TGV et, à peine a-t-il posé ses affaires à une place dans le sens de la marche (car la sienne, la 64, se situe contre le sens de la marche et cela procure migraines et nausées dès qu’il veut lire ou tapoter sur le clavier de son ordinateur) que la seule autre passagère s’approche de lui, et, le regardant de travers, lui fait comprendre que cette place qu’il s’arroge, la 44, est la sienne. Il recule de deux sièges en espérant ne pas avoir à déménager quatre ou cinq fois. Pendant ce temps, à Mogadiscio, les habitants de la capitale dévastée par quinze ans d’anarchie et de guerre civile ont vu leur ville débarrassée des islamistes et de la charia grâce aux Éthiopiens, contre qui les Somaliens ont perdu deux guerres atroces, et aux Américains, qui ont beaucoup contribué au bordel des années 1990. Faut pas s’étonner si al-Qaida… Il se dit et se répète & se répète encore je suis un monstre je suis un monstre je suis un monstre je suis un monstre je suis un monstre je suis un monstre je suis un monstre je suis un monstre mais c’est pire encore, c’est, il est un homme, et le voilà condamné à cela, et le pire est qu’il espère être condamné à subir sa propre monstruosité humaine trop humaine encore des décennies pour profiter des regards des soleils des vins des jambes et des sourires des femmes des poèmes des mots et de la joie de vivre avec ceux qu’il aime. Sur le banc de mauvais zinc avoir lu le chapitre 3 puis le début du chapitre 4 de The Demon et avoir observé ce sinistre individu, cet olibrius de pacotille sur tous les écrans, aux unes de tous les magazines et journaux, et s’être dix fois dit ce n’est pas possible ce type est un monstre. Mais si c’est vous, quand même, que ferez-vous ? Faut pas s’étonner si…

17:15 Publié dans YYY | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : Afrique, écriture

samedi, 13 janvier 2007

Rue froide

    Est-ce que c'est la présence d'appareils électriques, ou des lumières, le canapé, ou alors le café pris trop tard chez Philip (chez qui je travaillais) ? Toujours est-il que j'ai dû dormir trois heures, mal, par saccades, et que, pour le coup, je vais maintenant avoir besoin d'une bonne mug de café, pour tenir le coup. Peur que le percolateur, bruyant, réveille la maisonnée. Extirpé l'ordinateur, qui va voyager avec moi, de sa mallette ; réflexe de drogué consumériste ridicule.

La vie est variable, et elle se compose de lanières, s'arrache aux barrières, refroidit aussi. Tout comme la pluie qui tombe, refroidit. Peur d'un monde refroidi, miroir terni. Chialeur.

jeudi, 11 janvier 2007

« une allure raide »

    Cette jeune fille est très jolie, des yeux remarquables, et de très beaux cheveux, mais il lui manque juste l’once de distinction qui la rendrait vraiment et définitivement séduisante. Aucune hirondelle, en janvier, ne vient cogner au carreau, ni se poser sur l’une des rambardes de la passerelle de béton gris, aussi je préfère observer discrètement cette jeune fille, dont la voix pleine de douceur dément l’allure moins distinguée. Trois magnolias dont les branches frissonnent ferment le regard avant l’étroite venelle qui mène au mûrier magnifique, et le flot incessant, ininterrompu, des voitures continue son crincrin assourdissant d’être aussi sourd et bourdonnant. La jeune fille s’est évanouie, bien sûr. Il reste à attendre avril, le retour des hirondelles dangereusement proches du carreau ou posées furtivement – le temps d’être dérangées par un sac à dos, une secrétaire ou un professeur chenu – sur l’une des rambardes de la passerelle de béton gris. Un fantôme furtif fait se lever le soleil, et s’éloigne d’un air emprunté, mal assuré.

dimanche, 07 janvier 2007

Toges prolixes

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    Ne pas finir fou. Vivre cette formidable transe, qui perce le silence et emporte les viscères.

Si ma force finit ici, pense-t-elle, il reste encore le halo, près du lac où s'exténuent d'autres rides. Triangles ou pignons, peu importe, il faut bien relever le pli immaculé de la toge prétexte.

Tous ces pigments, à l'instant, se placent au devant de paragraphes terrifiants, et exigent la page protexte, sous les pavés bien sûr.

Vous aurez toujours la migraine. Ne pas finir fou.

 

 

 

 

Vitrail de Sainte Anne, église d'Amou (2 janvier 2007).

vendredi, 05 janvier 2007

Sept espaces avant 777

    Une incantation monte – les flèches trouvent l’âme, trouent l’âme, ce sont maintenant des flammèches ; toujours conscient, livré à mes doigts autant qu’à ces visions toujours, je fais par acquit de conscience le décompte, et découvre que ces deux brèves incantations comptent chacune        777 signes, alors surgit l’admiration du hasard – alors me saisit le dégoût de la contingence, toujours toujours toujours affreusement conscient. Mais quel masque s’est trouvé troué d’yeux sans âme ?

mercredi, 03 janvier 2007

Sec negur

    Terribles rougeurs au milieu de la farine. Ustensiles d’éternité, quelques casseroles sales tachées de mort. Le jour qui baisse sue la sève par tous les pores, avec un soleil faible, tanguant au milieu des brisants. Les nuages épais furieux et cotonneux prennent l’eau. Six points de suture. L’océan plus blanc que la baleine d’écume ! Sous les muqueuses, une bosse neigeuse grandit, grandit, grandit, oh grandit intolérablement, grandit et grandit jusqu’à s’éparpiller. Océans plus blancs que le nuage blanc, dans la nasse des secondes qui passent – éparpillements, solutions de continuité. D’autres frileux embruns, rouges, pierres comme des caillots, prennent le large. À bord de l’esquif casserole, aller à l’assaut des montagnes cotonneuses d’écume. Soif, suture et pépie.

21:05 Publié dans 410/500 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Poésie, écriture

lundi, 01 janvier 2007

Vol d’aronde

    Des oronges à seize euros le kilo, un rêve. Charles Chaplin mange un citron, tout aussi facétieusement procède au montage. Je plaçai ma caméra au haut de la colline, sans dispositif de travelling ni autre, de sorte que les acteurs fussent obligés de se plier à mes ordres quant à leurs déplacements. Cela donnait à leurs mouvements une allure raide, qui était ce que je recherchais. Le tournage dura deux heures, pour douze minutes de film ; je finis par en couper près de la moitié au montage, et la scène reste l’une des plus célèbres, par ces années-là. Après le tournage, toujours je le voyais peler une orange, la découper en six quartiers et la manger mi-goulûment et aussi avec une grande componction dans les gestes. Rêve.

 

(Liens ajoutés le 11.01.2007.)

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Soulville / Only Yesterday

    Faudra-t-il confesser (mais si oui, où ?) que j’écoutais en fait Horace Is Blue en écrivant le texte intitulé Ecaroh I et II. Il pousse le vice, la discrépance jusqu’à la malhonnêteté. Isidore réclame son onzain, puisqu’il a longtemps vécu dans ce petit village du Loiret où se trouve l’une des rares églises construites sur ordre de Charlemagne et dont certaines parties sont en effet mieux que millénaires. Isidore voudrait qu’enfin j’écrive un onzain pour lui, en son honneur, et trouve que je ne pousse pas assez loin cette histoire de discrépance. Par exemple, ai-je jamais, dans la vraie vie, raconté ma première masturbation à une jeune fille prude en jonglant avec des balles de ping-pong tandis que la jeune fille donnait des gifles à un hamster ? Non, je l’avoue. Tout à l’heure, un triporteur expliquait en long, en ligue, et même en procession, pourquoi la prononciation de gageure n’était en rien une exception aux règles de la langue française. Il a raison, mais c’est par trop évident. J’avoue aussi que j’ai quelque difficulté avec ce concept de « vraie vie », et donc j’imagine que le spectre qui me rend visite et se fait passer pour Isidore n’est pas du tout lui, incontestablement, car jamais Isidore ne se serait abaissé à d’aussi plates, aussi banales, aussi insignifiantes (surtout) formules. (Mais les gifles au hamster sont une belle trouvaille.) Faute de lamproies, dînons d’aloses. Une hirondelle traverse le ciel d’Afrique, et les haruspices se déhanchent pour trouver, en observant ses piqués farouches, un nouveau titre pour le texte fauteusement, pampousement, trompivement appelé Ecaroh I et II. Ne vous en faites pas, laissez l’hirondelle aller bon train, car j’ai trouvé un nouveau titre, grâce à la méth od e C+1 : Yvetaj I uy II. Le lettriste, fâché, me traite de faux frère rallié à la cause oulipienne. Je n’en ai cure. Et même en faisant badaboum, je vais présenter à mes lecteurs (c’est vous, peut-être) mes meilleurs vœux pour l’année qui commence. (2007, je pense, même si j’écris ces lignes en écoutant les ultimes rubati d’Only Yesterday, le 30 décembre à cinq heures et demie (du soir).) Wyommyitd baric !