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mercredi, 25 octobre 2006

Sept réponses à Patricia

    Mon laptop est mon seul clavicorde.

"Un vrai blog sympa", cela ne doit pas exister, je pense : seule une personne peut être considérée comme sympathique, ou non. Un site n'est jamais identique à son auteur, donc un site, même très personnel, ne peut pas être "sympa". (Une jupe ou un chandail non plus, incidemment.)

La nuit, très originalement, je dors. Comme je ne vis pas en appartement, et comme je ne suis ni le seul amateur d'opéra ni le seul professeur de France, je vous suggère de laisser tomber (comme on dit vulgairement) cette piste. 

# 713 : cela signifie-t-il que j'ai déjà écrit 712 poèmes intitulés Solitude ? Je vous laisse juge.

Imat ol sherderbok : oui, je ne peux que chaudement recommander de découvrir ce merveilleux chanteur qu'est Julien Jacob.

Oui, j'aime Shakespeare, un sommet incontournable, un himalaya du Verbe, mais je ne pensais pas ici (consciemment) à sa célèbre formule : "The world's a stage".

Enfin, merci beaucoup de vos lectures, et notamment de ce gentil commentaire inspiré de mon récent poème.

09:59 Publié dans 721 | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : Littérature

Samedires

    Dans la foulée d'un répertoire précédemment livré, ici même, et qui concernait mes achats parisiens de disques, j'inscris ci-dessous, sans autre forme de procès, la liste des livres que j'ai achetés samedi, toujours à Paris (et toujours chez Gibert Joseph (toujours en inversant l'ordre habituel du prénom et du nom)) :

  • Coplas. Poèmes de l'amour andalou. Traduction de Guy Lévis Mano. (Allia)
  • Claude Ollier. Eté indien. (Hachette/Flammarion)
  • Hermann Melville. Moby Dick. (Wordsworth Classics) *
  • Leonardo Sinisgalli. Poèmes d'hier. Traduction d'Odette Kaan. (Orphée/La Différence)
  • Danielle Mémoire. Prunus spinosa. (P.O.L.)
  • Piero Bigongiari. Ni terre ni mer. Traduction d'Antoine Fongaro. (Orphée/La Différence)
  • Maurice Rheims. Abracadabrantesque ! Dictionnaire des mots inventés par les écrivains. (Larousse)
  • Anghélos Sikélianos. Une voix orphique. Traduction de Renée Jacquin. (Orphée/La Différence)
  • Renaud Camus. Le Département du Gers. (P.O.L.) **

 

* Me croirez-vous si je vous dis que je ne possédais pas d'exemplaire de ce roman, et même que je ne l'ai encore jamais lu ? Shame on me... Reste à le lire ! (Il me tarde.)

** C'est tout de même autre chose de mettre la main sur le livre que de lire cet ouvrage en ligne.

09:21 Publié dans Unissons | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : Littérature

mardi, 17 octobre 2006

Raymond van der Uys

Comme Une famille parfaite est un film réalisé par les auteurs de Dancing, dont j'avais d'ailleurs (brièvement) dit du bien dans ces carnets, je m'apprête à le regarder en direct sur Arte. Or, je m'aperçois qu'une nouvelle fois, mais tout à fait inexplicablement, Arte est en allemand. Je ne veux pas dire que je suis tombé sur un programme en allemand et que les sous-titres n'apparaissent pas : il s'agit de la version doublée ou surdoublée en allemand. Ainsi, à l'instant, l'annonceuse française parlait distinctement en français, mais une voix allemande la recouvrait !

Cela ne me gêne pas, en soi, de regarder un téléfilm français en allemand, quoique je préfère la V.O., y compris quand il s'agit de ma langue maternelle (!), mais ce qui me turlupine, c'est que ce problème, qui s'était déjà posé (et avait duré une bonne quinzaine de jours) est resté inexpliqué par les techniciens de SFR et de Ma Ligne TV. Nous n'avons la télévision que depuis un an (onze mois, en fait), et nous ne la regardons presque jamais, ce qui explique notre manque de pugnacité auprès du service clients... mais tout de même...!

 

Une petite fille noire se lève la nuit, et voit un énorme ours blanc monter l'escalier. Un ours brun la saisit dans ses griffes. Elle rit aux éclats. Les volets ne sont toujours pas fermés. Par le hublot de sa chambre, elle voit s'éloigner les deux ours, sous la neige. Amour d'une musique pleine de menaces et de promesses. (Déjà dans Dancing.) Un avion s'éloigne, lui aussi, dans un ciel nuageux.

 

(Quel est le titre de ce roman de Richard Powers, déjà ? Ce film m'y fait penser.) ....................... Le thème du double père vous obsède, Patrick Mario Bernard et Pierre Trividic ! ......................... Plowing the Dark : voilà ! (Mon préféré avec Prisoner's Dilemma.)

23:13 Publié dans Unissons | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Cinéma, Film, Littérature

99, in temperature

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    Virginia Woolf to T.S. Eliot. April 14, 1922.

          So far I remain 99; in temperature, not age, but I feel astonishingly well.

 

          Jusqu'ici, je m'en tiens à 37 : c'est ma température, pas mon âge. Mais je me sens dans une forme étonnante.

 

 

          Faut-il traduire par 99, pour conserver la plaisanterie ?          " Jusqu'ici, j'en ai 99 : des degrés Fahrenheit, pas des années. Mais je me sens dans une forme étonnante."

lundi, 16 octobre 2006

La vie comme aux lendits

En recopiant cette phrase de François Bon, comme aux lendits, je suis passé de Dialecte (Marc Ducret Trio) 

Des lois sans mots qui se tissaient entre eux pour établir et faire respecter comme aux lendits les distances imposées, comme une place à soi-même nécessaire, croire à un territoire comme à une chasse gardée inviolable sur le lieu de chacun son corps. (Sortie d'usine, p. 57)

 

à Are You Going With Me? (Pat Metheny Group), dansant un peu comme aux lendits, vagabond ou saltimbanque.

Frén&sie et m&lancolie, jamais je n'y échappe. (Je me braque un peu aussi, autant dire : je me dévalise ; je me lorgne ; je me scrute ; je suis jumeau.)

09:19 Publié dans Unissons | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : Littérature, Jazz

dimanche, 15 octobre 2006

Ce parler de travesti

    François Bon parle de travestissement, et la voix elle-même se travestit. (La phrase, elle, se vêt. L'écriture en lambeaux ou pourpoint doré, qu'importe.)

Au même titre donc le jeu circulant, de machine à machine, de l'établi au vestiaire, de ces dialogues à voix de châtrés grande folle, ce parler de travesti les masques à tout moment pris, un ridicule cri de coq oh ne me touche pas ici devant tout le monde pour un geste le moindre, une main posée sur l'épaule, aurait pu s'interpréter comme affirmation quand même du corps, l'impossibilité qu'ils en taisent complètement la voix dans cet enfermement ici de l'homme avec d'autres hommes sous le ressassé du pointage à vie. Ce parler travesti avait son poids, n'était pas le futile d'une parole évaporée ici où l'on venait pour se louer, emmurés de l'interdit posé sur le toucher sauf la main (François Bon, Sortie d'usine. Minuit, 1982, p. 52)

 

Ce roman, qui fut écrit (ou, tout au moins, publié) quand j'avais huit ans me remet en mémoire ces camarades qui, entre le CM1 et la classe de cinquième, jouaient exactement à cela. Je me souviens d'un, particulièrement, Laurent G* (que j'avais été très surpris de retrouver un mercredi pour un match de tennis, car nos clubs respectifs jouaient l'un contre l'autre, mais nous ne savions pas, ni lui ni moi, que nous faisions du tennis), dont la réplique quasi systématique était, voix zaza-serrauldienne à l'appui : "Arrête, espèce de pétale, tu vas me refiler le soda."

Il faut dire que son patronyme, qui signifie abominable en allemand (or, nous étions germanistes), reflétait assez mon sentiment à son égard, mais, si j'essaie d'adopter un point de vue moins radical qu'à l'époque, je me dis que ce genre de jeu était gentiment puéril, voilà tout. Il n'empêche que je persiste à penser (et même à écrire, très bientôt sous vos yeux écarquillés) que ce genre d'attitude et de réplique témoignait d'un milieu familial où l'homophobie-par-ignorance devait régner en maître (voire, pour accorder l'expression à son sujet, en maîtresse).

Que mon expérience de ce genre de jeu stupide (dont un autre camarade, d'école primaire, le très célèbre Stéphane B*, qui est le seul être au monde sur qui j'ai porté la main (avec comme conséquence un nez stéphanien rudement amoché), était aussi très friand) ait pu coïncider avec l'observation d'un semblable phénomène dans le monde des adultes, à la faveur d'un roman sur le milieu ouvrier, voilà qui me plonge dans le désarroi : était-ce une mode passagère dont certains enfants se firent le porte-voix ?

Sortie du fanzine

Redonnée sa chance à Richard Millet, et découverte une prose curieuse de Gérard Gavarry, seront les deux passions languides (passives, surtout) de fin septembre, début octobre. 

Un jour donc qui n'en était qu'au matin de sa durée et dont il fallait bien s'accommoder, travaillant pour oublier l'écoulement du temps, puisque le travail même peut constituer la fuite immédiate de l'ennui, ce qui s'achève et disparaît de l'établi laisse un vide qu'une pièce brute est déjà là pour emplir, et dont le brut même laisse voir, irréalisé mais présent, son fini, et sans commandement ni hâte oblige à la tâche. La pensée se laisse enraciner comme à y glisser lentement, qui dit comme une voix et parfois jusqu'aux lèvres le filetage à chercher du taraud, ou bien quel tourne-à-gauche dans le tiroir ou la boîte. (François Bon. Sortie d'usine. Minuit, 1982, p. 37)

 

Le long des murs rouges, sur le long linoléum rouge flambant neuf qui fera tout à fait dégueulasse dans même pas dix ans, et où l'on n'osera plus faire passer ministres ni maires ni autres huiles, je place ma perceuse et, le regard vif sous la visière, guette les promeneurs.

Chant de bambous

medium_Jardins_de_Chaumont_Oct._7_073.jpg    Clair et net, l'enchevêtrement laisse filer ses musiques amères, comme du verre tinte dans la nuit, le fête bientôt finie, et des feutres posés sur les cymbales, des coups de marteau cotonneux lancés à l'assaut de l'espace, on joue des épaules à n'en plus finir, comme une pointe fine marque de sa lame un pleur tombé sur les pages d'encre verte, et, les épaules vibrant encore de ce chant sonore, on s'en retourne à l'abri des buissons, dans les haies dénuées de cette forêt verticale, vertige consommé.

Jardins de Chaumont, 7 octobre 2006.

M.S. MuMM

Dans Moon Palace, le narrateur, Marco Stanley Fogg (aussi appelé M.S.), se débarrasse progressivement, afin de subsister, de l'héritage de son oncle, soit 1492 livres répartis dans 76 caisses. (Je n'ai aucun mérite à me rappeler ces nombres, vu que, comme sur le versant onomastique, Paul Auster n'est pas très subtil dans la symbolique : 1776 est l'année de l'indépendance des Etats-Unis et 1492 marque la "découverte" du continent par les Européens).

Passant près d'un carton de vieux livres de poche que je compte vendre, et qui se trouve à la salle de jeux (ou deuxième chambre d'amis), au rez-de-chaussée, je m'imaginais qu'il serait possible de se défaire de tout livre après en avoir cité une phrase, ou exploré un mot, dans un billet publié dans ces carnets.

Du cancer de l'amie

    Livré ici, un extrait de la lettre n° 2978 de Virginia Woolf (The Sickle Side of the Moon, tome 5 de la Correspondance, p. 366). Il s'agit d'une lettre du 23 janvier 1935, adressée à Ethel Smyth, compositeur (-trice?) et amie de V.W. :

I agree with you entirely about death from Cancer: I forget how you said it: something about having a chance to die standing up. That is a very true remark, and sometimes you say a thing that I had it in mind to say. But why ain't I to come, when you, if you, die? Why? Aren't I capable of comfort? No – a mere reed, floating along a sugary stream, in your view. And so you dont want to see me.

Je suis entièrement d'accord avec toi, pour ce qui est de mourir d'un cancer : je ne sais plus comment tu as formulé cela, mais il était question de la possibilité de mourir debout. C'est une remarque d'une grande justesse, et il t'arrive de de m'enlever les mots de la bouche. Mais pourquoi ne dois-je pas venir te voir, quand tu seras près de mourir, et si cela arrive ? Pourquoi donc ? Suis-je incapable d'apporter le moindre réconfort ? Non, à tes yeux, je ne suis qu'une tige de roseau qui se laisse emporter au gré des flots suaves. Et du coup tu ne veux pas me voir.

 

samedi, 14 octobre 2006

La sodomie, sujet sensible #999

    Livré ici, un extrait de la lettre n° 2850 de Virginia Woolf (The Sickle Side of the Moon, tome 5 de la Correspondance, p. 272). Les ajouts entre crochets sont des précisions de l'éditeur, Nigel Nicolson. Il s'agit d'une lettre du 24 janvier 1934, adressée à Quentin Bell :

Helen [Anrep] has the flu, and that oaf her son has the congenital idiotcy. I wish Roger could scrape his neck of all Russian barnacles. I am writing about sodomy at the moment [The Pargiters] and wish I could discuss the matter with you; how far can one say openly what is the relation of a woman and a sod? In French, yes; but in Mr Galsworthys English, no.

Helen a la grippe; son benêt de fils est idiot, mais c'est congénital. Si Roger pouvait lui ôter ses maudites bernaches russes * de la tête. En ce moment, ce que j'écris a trait à la sodomie et j'aimerais pouvoir en parler avec toi : jusqu'où peut-on aller quand on évoque les rapports entre une femme et un sodomite? En français, c'est possible, mais, dans la langue anglaise de ce bon monsieur Galsworthy, non, vraiment pas.

 

* Je penche pour les oies, et non pour les coquillages... mais du diable si j'y comprends goutte. C'est d'ailleurs pour cela que j'ai conservé ces deux premières phrases dans cet extrait, car je me demande dans quelle mesure il n'y a pas là, avec, notamment, ces mystérieux Russian barnacles, une allusion à la sodomie. (L'expression scrape his neck me paraît particulièrement suspecte...)

Comme je ne crains pas, moi non plus, les liens circulaires, je me permettrai d'appeler Madame de Véhesse à la rescousse. (Depuis qu'elle m'a expliqué ce qu'était un prince Albert, hein...)

The : Sickle :: Side ::: of :::: the ::::: Moon

    Ces derniers jours, j'ai manqué de temps pour écrire, et même pour lire. J'ai surtout, depuis mardi, fait mes délices du tome 5 de la correspondance de Virginia Woolf (dans l'édition dirigée par Nigel Nicolson et publiée à la fin des années 1970 par The Hogarth Press (évidemment)). Le style, c'est l'homme la femme, et mieux encore, on la rencontre à chaque détour, au coin de chaque phrase, avec ses promesses et ses mesquineries, sa franchise et ses obtusions. Le style porté au corps d'une vraie écrivaine (si à la féminisation je cède) donne une couleur incomparable à la moindre minute passée en sa compagnie. Loin d'être inconditionnel de Virginia Woolf (mais admirateur forcené d'Orlando et de To the Lighthouse), je retrouve dans ses lettres ce qui me plaît chez elle: ce mélange d'âpreté et de finesse qui est sa marque. Aurai-je, dans les jours qui viennent, le temps de citer certaines lettres, certains passages, certains forages particulièrement remarquables? Disons que je le prendrai.

17:22 Publié dans Pêle-mêle | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Littérature

lundi, 09 octobre 2006

Provincialisme ?

    Soyons clairs : je déteste d'ordinaire les parisianismes (car il en est une multitude, une large palette) et pourfends aisément ceux qui, d'aventure, se risquent à généraliser au sujet de "la province" ou des "provinciaux". Toutefois, je trouve qu'il n'y a pas meilleur exemple d'une forme très provinciale d'incompréhension de la littérature que ce petit article sans queue ni tête, ni fait ni à faire, qu'un(e) certain(e) J. Rémy consacrait le 21 septembre dernier, dans Le Bien public, au roman de Chevillard, Démolir Nisard.

Il a été question, dans ces carnets, du roman de Chevillard, mais il me semble que J. Rémy, parfait représentant du nisardisme, n'a aucunement perçu les enjeux proprement littéraires du texte, pour s'en tenir aux oeillères d'un esprit de clocher (ou de paroisse) bien étriqué sur les bordures...

mercredi, 04 octobre 2006

Demain

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    Demain et les jours suivants seront plus encore sans écrire, et vous ne pourrez pas dire que vous n'aviez pas été

prévenus.

Toutefois, les fantômes sans regard, les spectres rouges au lourd visage nuageux seront avec nous, ce qui n'est pas

rien tout de même.

16:00 Publié dans MAS | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : Littérature, Poésie

Sortie de véhicules

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Clown civil

    Ce qui n'a pas de sens nous fait vivre.

Even the Captain's misuse of that absurd word fuliginous irritated me. (Graham Greene. The Captain & the Enemy. Penguin, p. 139)

 

Ce sont, dans les épîtres et les missives, les clowneries et les civilités qui nous marquent le plus durablement.

mardi, 03 octobre 2006

Force d'âme

    Goethe à Eckermann, le 3 octobre 1828 : 

Der Mensch bedarf der Klarheit und der Aufheiterung, und es tut ihm not, daß er sich zu solchen Kunst- und Literaturepochen wende, in denen vorzügliche Menschen zu vollendeter Bildung gelangten, so daß es ihnen selber wohl war und sie die Seligkeit ihrer Kultur wieder auf andere auszugießen im Stande sind.

 

Je ne saurais mieux dire.

... au creux de tes reins ...

    texte

          comme la pluie comme les pierres s'attardant traînant son absence d'inspiration au cours de deux longues semaines un texte se meut ou se meurt sans le mouvement des lignes ou des doigts sur la page ou des doigts sur le clavier ou du mercure dans la caboche pas moyen d'avancer un texte se meut ou se meurt retenez bien cela rentiers de l'écriture retenez bien cela dieux de platine dieux de marbre dieux d'ivoire dieux d'airain retenez cela un texte se meut ou se meurt une profanation et c'est la vie le silence glissant de l'onde immobile et plus un clapotis vous voyez lentement agoniser le texte dieux d'airain j'en appelle à vos rictus j'en appelle même à vos socles j'en appelle à Eschyle à Euripide j'en appelle aux astronomes avec leurs lunettes j'en appelle aux bourgeois de vaudeville avec leurs monocles oui j'en appelle à Sophocle surtout dieux d'airain j'en appelle aux hémicycles des amphithéâtres tout autant qu'aux hémistiches absolus du vieux père Corneille un texte se meut ou se meurt et sur la scène aucun acteur ne meurt vraiment tant qu'un texte latent ou dit le porte ou que le diable l'emporte un acteur porte son texte plus qu'il ne le dit il le porte en-dedans au-dedans de soi et cela n'a rien à voir avec un chien mort ni un trajet en autobus jusqu'aux confins d'une ville poussiéreuse d'Afrique afin d'enterrer un enfant mort non cela ne porte pas de nom c'est seulement la vie propre la dynamique introuvable de tout texte et si l'on vous dit de tisser fileuses tissez si l'on vous dit de tisser dieux d'airain ne dormez pas dans l'herbe car le chemin est long et il y aura encore des carrefours des douanes des passages étroits des fourches caudines des dictateurs en puissance de vrais dictateurs aussi oui ceux qui veulent dicter le sens la direction à prendre le sens d'un texte se meut ou se meurt et la garde qu'en faites-vous oh je ne m'en préoccupe si l'on vous dit de tisser c'est votre boulot pas le mien n'est-ce pas dieux d'airain dieux de marbre dieux d'albâtre dieux d'ivoire je savais bien que je réussirais à placer le mot albâtre dans un texte un jour en allant de l'avant à force d'aller de l'avant et peut-être mon seul et unique but en écrivant même en tenant ces carnets était de parvenir au texte qui me permettrait d'écrire le mot albâtre de le graver comme qui dirait métaphoriquement dans le marbre et cela évidemment se produit aujourd'hui où il pleut à pierre fendre ou pas vraiment un goutte-à-goutte à peine accéléré mais qui mouille détrempe tout et même la grande poubelle grise ouverte depuis hier afin d'en laver le fond noirâtre mot qui rime avec albâtre dans tous les cas cette pluie est une aubaine et justement ce jour de pluie infinie ténue mais tenace j'écris enfin le mot albâtre et ne sais qu'en faire ne sais que faire après d'autres doués d'un sens de l'honneur plus aiguisé que le mien ici se feraient hara-kiri c'est à n'en pas douter et tandis que la pluie humecte puis humidifie puis mouille puis inonde la grande poubelle grise ouverte dans la cour je ne sais ce qui me pousse à écrire encore et toujours albâtre comme si ce mot soudainement prenait la forme d'une incantation le dernier ressort le dernier battement des veines le dernier sursaut artériel qui permette d'aller de l'avant un texte se meut ou se meurt l'ai-je dit je crois l'avoir écrit mais l'ai-je dit toujours est-il qu'un texte oui tu l'as dit merci l'acteur se porte un texte se meut ou se meurt et sans un mot même désuet ou inutile auquel se raccrocher parfois les textes les plus parfaits s'enlisent se figent dans une immobilité d'onde gélifiée un désert de racines et de vieux bois de flottaison échoué desséché au point de ne plus pouvoir écrire même une phrase qui tienne debout et qui suis-je pour parler de phrase qui tienne debout moi qui assis pianotant tapotant clapotant comme l'eau vive d'une pluie fine mais farouche ténue mais tenace ne sais rien dire d'autre ne sais rien écrire d'autre non ne sait dire non ne sait pas écrire d'autre mot qu'

albâtre

lundi, 02 octobre 2006

Rencontres du cinquième type

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    En robe

(Argus ou basilic ?)

 

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le monstre de métal

 

 

 

de ses yeux me fige.

Déveine

   Sur le gravier je fais cuire le lieu. Vraiment j'ai la poisse.

04:55 Publié dans Minimalistes | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : Littérature

samedi, 30 septembre 2006

Gris de lire

    ... lorsque tout le monde eut dégrisé...

(David Bessis. Sprats. Allia, 2005, p. 10)

 

Cet emploi de dégriser comme un verbe intransitif, et avec le verbe avoir, n'est attesté dans aucun des dictionnaires que j'ai consultés. Alors, écart stylistique délibéré ou menue (curieuse) erreur d'auteur et d'éditeur ?

18:08 Publié dans MOTS | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : Littérature

vendredi, 29 septembre 2006

Nubile

    Quel plaisir de pleuvoir, dit-il avant de s'évanouir.

15:25 Publié dans Minimalistes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Littérature

Visions du 25 septembre

Lundi matin. Trident irrégulier. 

colombier

métaphore

    amère de mort

mi-bémol

maréchal juin

la monnaie

    frissonne à l'oreille

du chauffeur

chopin

catabase

    musique des sphères

à rebours

iut

de sa grâce

    corsage lilas

yeux plissés

passerelle

regardez

    cheveux d'araignée

seul solfège

 

il a son

    pantalon bouffant

au manège

 

ce garçon

    comme des milliers

de victimes

 

même pas

    tout ce qu'un regard

noir allège

mirabeau

le feu de Flaubert

      dans les terres nues de l'âme

retraite aux flambeaux

château de tours

de terreur

    pris par la marée

de ces rimes

voltaire

sur mon siège

    pas trop regardant

je conspire

anatole

jeudi, 28 septembre 2006

Balzac 00.04

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Difficile, III

    Vous m'assurez que la difficulté réside dans les sérigraphies et l'insuccès. Je vous certifie que ce qui me fait le plus de peine, c'est que les éditions Harpo& ne parviendront pas à poursuivre la publication de la collection "comme dix raies blanches". Rouge bouge, et la flamme d'une chandelle ne s'éteint jamais.

mercredi, 20 septembre 2006

Fous de façade

    Fragiles

récifs des temps

anciens -

narrés par des fous de fa-

çade

osant tout sur sofa

immergés en eux-mêmes -

sortez de l'eau !

 

Bue la mer

on se repose dans les

nues.

Balzac 00.02

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mardi, 19 septembre 2006

Impatience—s

université

le soleil

      brûle l'avenue

court sueur

anatole france

au bureau

      j'ai oublié mon

parapluie

voltaire

long fil blanc

      serai-je maniaque

pour Ariane ?

château de tours

parapet

      derrière luit la

Loire folle

mirabeau

bouchon sur

      le pont calciné

nerfs à vif

passerelle

pas la peine

      de freiner au peu

que je chante

iut

lui lunettes

      sa casquette carreaux

lignes vertes

chopin

grands ciseaux

      découpent-ils le

ciel de lit

ronsard

Et basta !

    Histoire d'illustrer ce qu'on disait hier :

Les deux hommes se redressent mais ne vous saluent pas (pourtant on a pris les devants). Ils s'essuient les mains à des chiffons, on suppose de l'essence dans le bac, par terre. La chenille de la Poclain, de leur côté, est calée par des bastaings, et le tambour est démonté. (François Bon. C'était toute une vie. Verdier, 1995, p. 37)

 

Je continue de ne pas savoir si cet emploi de l'impersonnel m'agace ou me séduit. Il me déroute. (Me rappelle des poèmes écrits quand j'étais adolescent. Mon père m'avait dit qu'il fallait que j'enlève certains des on...) De même, que penser, in fine, de ce style qui cherche à se faire passer pour très simple, dénudé, neutre, et qui manie aussi savamment les rimes internes ? Si l'on passe la dernière phrase au crible d'une analyse stylistique qui tient compte du rythme et des sonorités, on (!) s'aperçoit qu'outre le système de rimes croisées (Poclain/côté/bastaings/démonté), le rythme repose sur des tétramètres, que vient à peine nuancer, par rétraction, l'heptasyllabe central (8/4/7/8). Il faut au moins reconnaître que la rime Poclain/bastaings n'est pas banale !