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dimanche, 31 janvier 2016

D'autres 31 janvier

    Regarder vers le futur implique de se laisser guider, plus que jamais, par une remontée amont, par ce qui reste du passé en nous. C'est à cette aune que la ronde des saisons, avec ses retours mais surtout ses entrelacements, peut servir de modèle complexe.

Pour m'en tenir au pan très fragmentaire que constituent ces carnets, le 31 janvier, jour en quelque sorte au cœur de l'hiver (or, ce cœur est, cette année, pluvieux, gris, frisquet sans être franchement hivernal, bref : ligérien), a donné lieu à deux insurrections :

 

08:07 Publié dans Aujourd'automne | Lien permanent | Commentaires (0)

samedi, 30 janvier 2016

Macroules à Belœil

    Plus tôt dans la journée du dimanche — diable, si le scripteur se permet des ressacs, on n'en a pas fini (c'est le but : n'en pas finir) —, saisir une parade nuptiale de foulques, ou peut-être un combat de mâles, l'un cherchant à impressionner l'autre afin de prendre le dessus.

Cette scène eut lieu sur la grande pièce d'eau du château de Belœil.

2 et 3 mai 2015 191.JPGPlus encore que l'oiseau, le mot foulque rappelle l'atmosphère des voyages en famille. (J'avais huit ans et demi, l'âge de mon fils cadet, et durant tout le voyage en Suisse et en Autriche, mon père ayant soutenu que foulque était masculin, ma mère et ma sœur lui avaient emboîté le pas, et ce ne fut que quelques semaines plus tard, rentrés dans les Landes, que je pus aller chercher un dictionnaire et leur remontrer à tous les trois qu'ils n'avaient pas raté une occasion de se moquer de mon entêtement au cours du voyage mais que j'avais raison.)

Ce dimanche-là, à Belœil, peu après avoir saisi ces images de foulques en début de printemps, avoir fait un portrait de nous quatre avec le retardateur (appareil calé sur un des piliers de la balustrade, sans doute), moi arborant mon ghesquière et mon chèche.

 

(Toujours pour l'humidité piquante, les printemps hésitants, l'eau partout dans les yeux, il y aura bientôt dix ans et nous n'avons pas remis les pieds, what a shame, dans la Brenne.)

08:45 Publié dans Artois, à moi, Brille de mille yeux | Lien permanent | Commentaires (0)

vendredi, 29 janvier 2016

38

    sarabande amère

un cycliste file droit

 

ligne de fuite, arbre

dont on ne voit pas la mort

d'écorce désincarnée

 

07:30 Publié dans Tankas de Touraine | Lien permanent | Commentaires (0)

jeudi, 28 janvier 2016

Pouces

    Dès que, sur le réseau social, je publie un commentaire politique, pourtant navrant de banalité, affluent, comme hier matin pour la démission de Taubira, avis positifs, pouces en l'air etc. Mes textes quotidiens sur les blogs recueillent, au mieux, un ou deux likes dont je ne peux m'empêcher de songer qu'il s'agit de politesses, du petit sourire charitable que l'on accorde au vieux tonton gâteux tout entiché de sa marotte et inconscient d'être ridicule.

07:47 Publié dans Narines enfarinées | Lien permanent | Commentaires (0)

mercredi, 27 janvier 2016

Sans l'iguanodon

De si loin que nous reviennent les trajets, les déambulations ou les piétinements — ainsi devant les vitrines de paléontologie de Bernissart, ce musée qui devait être l'objet de ce récit, je voulais retarder le moment, et vlan ! vlà-t-y-pas que je me trahis moi-même —, il faudrait s'inspirer, par exemple, du petit cahier, celui où sont scotchées trois fourchettes en plastique de frituur composant artistement le drapeau belge, et tenter de cerner la trame de la façon la plus réelle.

Mais, après tout, est-ce là l'affaire, surtout quand j'arrive fourbu à ces carnets, me disant qu'il faut que j'essaie de tenir, cette année, l'à peu près quotidienneté, avec les cinq ou six fers au feu qui pis est, est-ce là l'essentiel ? De toute façon, le réel me fuira.

(Incise : non, rien. Finalement, demain.)

Il s'avère surtout que ce musée — avec son nom, Bernissart — continuera d'évoquer principalement un souvenir plus ancien, celui de la complainte de l'iguanodon, chanson contemporaine de la découverte de ****, dont une version assez ridicule, il faut bien le dire, accompagnait tel documentaire vu il y a fort longtemps à la télévision, et sur laquelle je ne me lassai pas, quelque temps, de broder variations, vocalises et réécritures improvisées sur les thèmes les plus variés.

Pour Bernissart, au moins, le passé aura appuyé son emprise.

Il n'en va pas forcément de même pour le « bout de viande fatal ».

21:57 Publié dans Artois, à moi | Lien permanent | Commentaires (0)

mardi, 26 janvier 2016

Pong-ping, 10

    Pourquoi j'ai toujours écrit vilenie avec un accent aigu, et persisté à le faire même après avoir découvert ma méprise – alors que, lorsque j'ai découvert, à la faveur d'un compte rendu de lecture comme notre professeur de français de première (celui qui est parti en congé maladie début novembre) nous demandait d'en faire, dans un petit cahier, que succinctement s'écrivait avec un c devant le t, j'ai tout de suite et sans remords adopté cette orthographe —, je ne le sais. Comme je n'ai pas la moindre idée (ou guère d'idée, en tout cas) de ce que j'avais vraiment en tête, il y a bientôt dix ans, en écrivant la dernière phrase du dix-huitième texte de Voici venir Samuel B. (dont 3 chapitres restent toujours à écrire !), peut-être le maintien de l'accent aigu était-il délibéré, avec “l'accenteur” dans la même phrase ?

Toujours est-il que me voici à scruter mes fariboles. Et il y en a ! Ce mot a dû me traverser. Sur ce site, on le retrouve, dès 2006, en juin aussi, pour une notule dont je n'ai aucun souvenir (décidément) mais qui préfigurait un peu ce qu'il m'arrive de tenter dans les Translatology snippets.

Mieux, même. Trois mois auparavant, j'établissais un lien très net entre les Murmures de Morminal et ce substantif. Fadaises ? non. Menteries, fictions, détours, mensonges.

Plus près de nous, on retrouve fariboles dans un poème de la série des Douzains d'aise, puis, dans un bref texte en prose écrit sous le coup d'un drame, d'une angoisse, d'une impression de fin de route, qui ne fut que cela — une impression. Mais la noirceur en demeure.

Tout ce que je fais, au fond, me semble faribolesque, faribolien, faribolant, faribolard, faribolide et fariboliforme. Mais ce sont des fariboles nécessaires.

22:44 Publié dans Pong-ping | Lien permanent | Commentaires (0)

lundi, 25 janvier 2016

Cils

    Sur FB, il rarissime que les annonces automatiques de publications sur ce site ou sur Touraine sereine attirent ne serait-ce qu'un seul like.

Pourtant, il semble que je continue d'avoir des lecteurs. Mystère du silence.

03:53 Publié dans Ex abrupto | Lien permanent | Commentaires (0)

dimanche, 24 janvier 2016

W.C. du sous-sol, 1

    J'en suis presque le seul usager.

Il se trouve que je suis celui qui passe le plus de temps au sous-sol, soit pour lancer ou étendre lessives, soit pour ranger des choses à l'atelier (je ne bricole guère — il faudra bien écrire un et même plusieurs textes sur l'atelier, au diable quelle barbe), soit quand je joue au ping-pong avec mon fils cadet, soit que j'aille apprêter la chambre d'amis, ou prendre une bonne boutanche à la cave... Donc il m'arrive de pisser ou plus aux W.C. du sous-sol. 

On y trouve d'ailleurs un cahier, un calepin et deux stylos qui ne marchent guère. Ils ne servent guère.

(Ce n'est pas là que j'ai composé les Buandes, amas de manuscrits brefs que j'avais entrepris de dactylographier avant de cesser, de guerre lasse, tout ça n'intéresse personne.)

 

On y trouve mon vieil Abrégé du Littré, fidèle compagnon de mes premiers vrais émois lexicographiques et de mes premiers vrais pas dans l'écriture, surtout à Talence. Le voilà non pas relégué, mais presque affermi dans ses titres de noblesse, puisqu'il est, avec le Robert culturel du séjour, le seul dictionnaire sous forme voluminique que je consulte encore régulièrement, pour le savoir et le plaisir (et les exercices d'écriture).

Le brave et noble bouquin en papier pelure — héritage de je ne sais qui, il se trouvait à Cagnotte, peut-être mes grands-parents maternels l'avaient-ils donné à ma mère ? — se trouve posé, près de deux ou trois rouleaux de papier toilette, sur une sorte de clayette étroite fabriquée jadis par mon beau-père pour y ranger des CD et où j'ai remisé, moi, en arrivant dans cette maison, quelques dizaines de carreaux laissés en rab par l'ex proprio, qui pensait sans doute que je serais ne serait-ce qu'à moitié bricoleur comme lui. Comme on s'illusionne !

Toujours est-il que de ces gogues je demeure presque le seul usager, même si parfois, mes fils y passent (et y pissent).

22:11 Publié dans 16 en 16 | Lien permanent | Commentaires (5)

samedi, 23 janvier 2016

Détour ░ Bypath

 

Moi né faux nègre et vécu sosie           I at birth a false nigger with a life looking like

de quelqu'un toujours à venir              someone always in the making

si j'ai ma chance de mourir vrai           if I stand a chance of dying in truth

elle passe par le détour                     it's with the bypath

de ces phrases restées fidèles              of these sentences still faithful

à leur histoire d'enfant tout seul           to their history that of a lonesome child

guettant l'écho pour savoir s'il existe      looking out for the echo to know if there is one

 

 

Ludovic Janvier est mort il y a trois jours, le 20 janvier 2016.

Le poème ci-dessus se trouve dans son recueil Entre jour et sommeil (Seghers, 1992, p. 101). Traduction inédite © Guillaume Cingal

 

07:58 Publié dans Darts on a slate | Lien permanent | Commentaires (0)

vendredi, 22 janvier 2016

37

    lueur verte des

réverbères dans les feuilles

 

du pont Wilson je

contemple les obscurités

au-dedans et en dehors

 

 

Reprise de chantier. Aucun en 2015. Pour le tanka #37 (comme le département), redécoupage des 5 vers en 2+3.

08:11 Publié dans Tankas de Touraine | Lien permanent | Commentaires (0)

jeudi, 21 janvier 2016

Bibliothèque, 1

    Préfère-t-on appeler cette pièce bureau ou bibliothèque ? C'est selon, et parfois les deux assemblés.

C'est qu'un des critères de choix pour la maison, c'était de pouvoir mettre, à peu près, tous les livres et les deux bureaux de travail dans une même pièce, de préférence en longueur. Bien entendu, on rêve toujours de douze mètres sur quatre, avec trois mètres sous plafond, puis la vie vous rattrape. On ne voit pas l'utilité de jouer à la loterie, donc le salon, par exemple, est aussi meublé — un peu — de livres.

On ne pourrait pas compter, dénombrer, dans la bibliothèque, le nombre de livres, et pas même combien d'appareils photographiques ou d'ordinateurs s'y planquent. 

Il faut le savoir.

Sujet de philosophie : il faut le savoir.

D'une fenêtre, je vois les branches nues des deux néfliers. (Et ici, pas de document Word préalable — j'écris directement, à même la fenêtre.) De l'autre – il faut se glisser derrière le cabriolet Régence, près du faux placard à la porte duquel sont accrochés les trois costumes – on voit aussi le néflier, la rue, la boîte à lettres, le vieux filtre à café qui lentement, dans l'herbe endormie de l'hiver, dépérit.

Décrire le capharnaüm que représente nécessairement un bureau n'est pas impossible, mais on ne fait que retarder les échéances. Ce qui compte, c'est ramer. Directement, dans la fenêtre. Le nez contre la vitre. Le savoir nous est vital. Là, dans la fenêtre même, on affronte le ramage. (Et on chante un peu. La bibliothèque est aussi lieu de chant, essayer de s'égosiller pour marquer le tempo de l'allégresse. Tenter de s'époumoner, sourire aux lèvres, silver lining à la plèvre.) Et là dans la fenêtre on se coltine la ramure, le bois froid semble-t-il engourdi des branches de néflier et le tréma qu'on ne sait où placer.

La dernière harde.

Même dans la bibliothèque frusquin et fripes, fringues et nippes.

Passade par la plèvre, sourire à la lippe.

Le savoir est indispensable.

Vous n'y pensez pas.

10:06 Publié dans 16 en 16 | Lien permanent | Commentaires (0)

╝5 ╝

Il semblait qu'à midi il faisait plus froid qu'au lever du jour, ou même à mon lever à moi, avant, ce qu'une mère d'élève a confirmé, tandis qu'on discutaillait près du garage à vélos, à l'extérieur de l'école primaire.

Ce n'est pas principalement le froid que suggère le passage d'automne en hiver, qui s'est fait cette année après Noêl, peut-être a-t-on ressenti un vrai temps d'hiver pour la saint Odilon, toujours un jalon que l'on remarque, et là, avec, deux semaines plus tard, bonhommes de neige tassés quasi fondus avec leur regard en trémas, on s'en souviendrait plus que jamais.

Surtout que la saint Odilon tombait cette année le jour de la rentrée, donc le lundi, sur le chronotope particulier de l'année dernière, à peu près au même moment, et pour la première fois j'ai pu accompagner le cadet à sa leçon de hautbois —les autres lundis depuis septembre étaient mangés, sur ce créneau, par mes cours. (D'ailleurs, le créneau, je le foirai. Créneaux foirés, de quoi en faire un plat, même un roman. Everything goes into the book. Mais peut-être pas ce lundi-là. Enfin...) Enfin... Première impression d'hiver, je ne voulais pas en dire autre chose.

Est-ce ce jour-là — déjà le souvenir frêle s'en dissipe — qu'on nous a pilonné avec la mort de Galabru ?

00:53 Publié dans Aujourd'automne | Lien permanent | Commentaires (0)

mercredi, 20 janvier 2016

L'amico misteriosamente scomparso in Africa

    Entendre Bernard Blier doublé par un Italien voix suraiguë, c'est bizarroïde, quand même.

La grande époque glorieuse des collaborations cinématographiques franco-italiennes a-t-elle, alors, connu son apogée ?

Autant de questions en porte-à-faux

(même s'il n'y en a qu'une).

15:09 Publié dans Afauxrismes | Lien permanent | Commentaires (0)

mardi, 19 janvier 2016

Faire pièce

    Au château de Belœil, aucun risque de se surclasser, ni de s'en casser.

Un festival de glaïeuls sans véritable parfum, cohortes lourdes qui passent devant les superbes tapisseries sans paraître les voir. Eaux boueuses, gris plus que verdâtres, de la grande pièce d'eau dont je crois me rappeler qu'il y régnait une sorte de quasi imperceptible flot mouvant. (Pas de bouillon pourtant, cela eût été pour une autre fois, dans une autre dimension, après Sedan.)

 

La scène où des gueux bourrés à la moelle plantent un précaire mât de cocagne, des grenades éclatées peintes par Oudry, un Voltaire qui n'en était pas un et un Louis XVI qui ne pouvait se ressembler, des putti de granit rongés par la mousse regardaient qui vers le large d'une pièce d'eau comme à Ostende, et qui vers l'arrière, façade arrière du château où le vent donnait le la de cette semaine.

Parfum, qui rime avec fin chez Fersen — pourtant, ce n'est pas possible.

Les glaïeuls n'embaumaient rien ; d'ailleurs, je m'en avise, sot et infoutu d'y retenir goutte, en fleurs, c'étaient des amaryllis.

(Comme chez Paul West.)

 

Belœil, pourtant : il faudra creuser ça. Pas comme on écarquille un œil, ou comme on écale un œuf, pas comme on épouse une consœur. Pas pour l'œil, pour le mot. Pour les deux points du tréma —— tes baisers sont pointus comme l'accent aigu. Et moi je m'en bats l'œil.

22:48 Publié dans Artois, à moi | Lien permanent | Commentaires (0)

lundi, 18 janvier 2016

╝4 ╝

    Le froid est là, la neige est blanche.

Et pourtant, en sortant du tramway place Anatole France, ce matin, après avoir relu, plutôt bien assis, plusieurs passages de Richard III, dont la très belle longue scène IV de l'acte IV, c'est une autre chanson de Manset qui s'est imposée, Les rendez-vous d'automne — pourquoi ? sans doute parce qu'elle me hante et me travaille depuis si longtemps, une des premières que j'ai connues, grâce à Christoph qui m'avait prêté une cassette, fin 1989 ou début 1990 — et donc, depuis lors, ces bras qui se tendent et ces troncs qui se fendent ont toujours fait écho en moi à mes vagabondages d'enfant et d'adolescent à battre la campagne, buée de froid et pataugeages dans les bords d'étang (surtout le ru inondé en hiver, asséché en été (ah, Du Bellay !)), le froid doux de Chalosse toutefois — et le cri final — l'Amérique !

Sous la neige, donc, à huit heures et demie, place Anatole France, bras qui se tendent troncs qui se fendent et toi tu casses des briques.

09:39 Publié dans Aujourd'automne, MUS | Lien permanent | Commentaires (0)

dimanche, 17 janvier 2016

╝3 ╝

    Dès l'intro, tu kiffes.

(J'me comprends. (Ou : je m'comprends. (Tu mets l'accent sur quoi : sur toi-sujet ou sur toi-réfléchi ? Réfléchis à ça.)))

Puisque, depuis une semaine, c'est vraiment, enfin, l'hiver, puisque, ce dimanche, il y a eu une belle – quoique trop brève – promenade sur les bords de Loire, avec seulement des goélands argentés et des mouettes rieuses (dont une avait entièrement retrouvé son masque brun foncé, mue finie dès la mi-janvier*), il faut s'intéresser de nouveau à cette histoire d'automne qui serait là, sous-jacent, courant souterrain, silure du fond de vase, dans tant d'instants des autres saisons.

D'ailleurs, je n'ai pas la moindre idée de mon intention de départ.

Je m'arrange avec l'idée que je me fais de la mémoire.

Ce n'est pas mal, ça, déjà.

Pourtant, on avait dit qu'on reprendrait les formes poétiques tarabiscotées, pas ça.

 

* Cette fin de mue est une coïncidence bien commode.

21:58 Publié dans Aujourd'automne, Droit de cité | Lien permanent | Commentaires (0)

samedi, 16 janvier 2016

Salon, 1

Dans la chambre [...] nous étions comme dans une cornue.

(Charles Cros)

 

    Nuit finie précocement, c'est bien sûr au salon que j'échoue.

Sur le canapé, tout neuf d'ailleurs. (C'est notre quatrième canapé en 19 ans, on vient de l'acheter ; il est là, dans le salon, depuis dix jours, depuis l'Épiphanie ; le précédent, l'intérimaire — rouge — avait été racheté à nos voisins et aura duré trois ans et quelque.)

Cinq heures et quart, café réchauffé à portée de main, assis en tailleur sur ce sofa avec le laptop sur les genoux, je me demande ce que la chatte, immobile et mutique sur le carreau — elle vient de remonter et a refusé de s'allonger sur le fauteuil en face de moi —, attend de moi (que j'ouvre la cuisine pour aller y laper de l'eau ? que je lui ouvre les volets (mais elle a pu sortir, la trappe était ouverte) ?), cependant que, le temps d'écrire cela, elle a fini par sauter dans le fauteuil, où elle patouille de ses griffes, longuement, l'infâme plaid panthère.

Peu de meubles, au fond, dans ce salon, petit : le canapé de cuir noir, donc, le fauteuil rouge avec son pouf (Po—äng !), le baffle gauche posé au sol près du meuble hifi (de bois rouge, avec la télé (sans image et sans bruit, que c'est beau une télé)), la table coffre basse en bois rouge, dans l'alignement de la petite bibliothèque (mais là, c'est déjà la salle à manger, techniquement), les étagères de séparation  qui délimitent partiellement le salon de la salle à manger (baffle droit, livres d'art, quelques photos, statuette mumuyé, grand atlas des oiseaux nicheurs).

 

Deux phrases, encore, toujours, en explosante-fixe, tournoient autour du lustre sans s'attacher aux indigentes moulures.

Il y a une vraie dignité à ne pas être Dalibor Frioux. — On n'a plus entendu parler de lui, au fait. Finalement, les sofas gardent surtout la mémoire des gens que nous aimons.

Et ces noirs sont-ils souhaitables ? — Noir sur noir : le nouveau canapé, de cuir noir, dans la nuit environnant le salon comme un océan aux millions de petites pointes de flèches luminescentes. Quand nous rendra-t-on vraiment, dans les villes, la nuit ?

 

05:36 Publié dans 16 en 16 | Lien permanent | Commentaires (0)

vendredi, 15 janvier 2016

Que faire ?

    de ta nuit je n'en ai cure

beauté charnelle en dedans

le doberman sur les dents

faites monter le mercure

 

tout toujours de bon augure

la croix sur le ramadan

kippah et pomme d'Adam

pour faire bonne figure

 

Télémaque déshabille

un souffle d'air frais dans la

cambuse Argus dégobille

ses sourcils dans l'entrelacs

 

à moins qu'un prophète accoure

nul risque que je me goure

 

05:40 Publié dans Sonnets de juin et d'après | Lien permanent | Commentaires (0)

jeudi, 14 janvier 2016

Fâcheux

    Il ne faut pas se cacher derrière son petit doigt.

Il ne vaut pas se cacher derrière son petit doigt.

Il ne faut pas se lâcher derrière son petit doigt.

Il ne faut pas se fâcher derrière son petit doigt.

Il ne fut pas se fâcher derrière son petit doigt.

Il ne fut pas se fâcher derrière son petit pois.

Il ne fit pas se fâcher derrière son petit pois.

Il ne fait pas se lâcher derrière son petit pois.

Il n'a pas fait se lâcher derrière son petit pois.

Ce lâche n'a pas fait derrière son petit pois.

Ce lâche n'a pas fui derrière son petit pois.

Puis ce lâche n'a, lui, terni son petit pois.

Puis ce lâche n'a, lui, terni son petit bois.

 

21:55 Publié dans Bégaiements | Lien permanent | Commentaires (0)

mercredi, 13 janvier 2016

———— nisée

Septain épiphanique zénithal 2, 6 janvier 2016

 

    carbonisée

dans l'azur

jolie fusée

ne se détache

qu'après s'être brisée

explosée

dans la cache

.

11:01 Publié dans Septains épiphaniques | Lien permanent | Commentaires (0)

Cimarosa, Pierlot & autres vagabonds

    Poursuivant la découverte du coffret Rampal offert par ma sœur pour Noël, je note (pause, réécoute, reprise du Rondo aussi après) la Symphonie concertante pour flûte et hautbois de Cimarosa, enregistrée en 1954 avec l'Orchestre de Chambre de la Sarre sous la direction de Karl Ristenpart. Le hautboïste (ou oboïste) est Pierre Pierlot, apparemment complice régulier de Rampal.

De Cimarosa, on trouve un enregistrement d'une autre partition (en do majeur, pas en sol majeur) par l'immarcescible Heinz Holliger et Aurélie Nicolet (sur YouTube), une autre symphonie pour flûte, hautbois et cor (sur Classical Archives, donc en écoute très partielle  —  ), un autre (énigmatique) concerto pour ces deux mêmes instruments, par Falala et Arrignon (nulle autre précision).

La Symphonie concertante en sol majeur ne se retrouve que dans sa version pour deux flûtes, avec Hye-sook Yang et Georgi Spassov (Allegro uniquement). On la retrouve en entier ici (mais toujours pour deux flûtes), avec plusieurs autres pages chambristes de Cimarosa. De Cimarosa, toujours pour hautbois, j'ai découvert le Concerto pour hautbois, soit par Pierlot himself : il semble qu'il ne faille pas confondre ce concerto avec un concerto pour hautbois d'un certain Arthur Benjamin, inspiré d'une sonate pour piano de Cimarosa et souvent attribuée, par conséquent, à Cimarosa. De ce dernier, je donne une version ancienne et craquelante, avec Léon Goossens et l'Orchestre symphonique de Liverpool.

Et, enfin, pour les amateurs de piano, voici un enregistrement de 32 sonates de Cimarosa par Roberte Mamou.

 

Pour s'informer sommairement sur Pierre Pierlot, sans passer forcément sous les fourches caudines de la WP, on lira avec intérêt cette notice présentée sur le Site du Hautbois, et cet hommage lors de sa mort en 2007.

 D'autre part, le site Musicologie propose une fiche très complète sur Domenico Cimarosa, et on peut encore écouter (bien que ce soit théoriquement impossible) l'émission de France Musique “Cimarosa, le préféré de Stendhal”.

 

[ Qu'importe si la colonne des “catégories” — ou, comme je préfère les nommer, rubriques — déborde du cadre, devient désespérément et ridiculement longue, en voici une nouvelle, peut-être une de celles qui avortera bientôt. ]

10:40 Publié dans MUS, Vagabondages | Lien permanent | Commentaires (0)

mardi, 12 janvier 2016

Fessetête

    Sa tête ne passe plus les portes.

Sa fête ne passe plus les portes.

Sa fête ne passe plus les mortes.

Sa femme ne passe plus les tortues.

Sa femme n'efface plus les tortues.

Sa femme n'efface plus les tortures.

Sa femme n'effare plus les tortures.

Sa femme n'effare plus mes tortures.

La femme n'effare plus mes tortures.

La fesse n'effare plus mes tortures.

 

21:57 Publié dans Bégaiements | Lien permanent | Commentaires (0)

———— muscade

Septain épiphanique zénithal 1, 6 janvier 2016

 

    passez muscade

— un temps noir —

cette embuscade

dont se dégrade

un instant la mémoire

tout se brade

à la foire

.

19:59 Publié dans Septains épiphaniques | Lien permanent | Commentaires (0)

lundi, 11 janvier 2016

———— sont des

Septain épiphanique 5, 6 janvier 2016

 

    ces deux amies sont des

mi—jumelles

(je me comprends) — prédelles

d'un très fardé

retable — lance un dé

de sorte qu'elles

rient — anciennes nouvelles

07:57 Publié dans Formes singulières, Septains épiphaniques | Lien permanent | Commentaires (0)

dimanche, 10 janvier 2016

———— belle avec

Septain épiphanique 4, 6 janvier 2016

 

    elle est si belle avec

cette adresse

son regard me caresse

me cloue le bec

le fleuve était à sec

voilà détresse

et prose vengeresse

.

15:55 Publié dans Septains épiphaniques | Lien permanent | Commentaires (0)

samedi, 09 janvier 2016

Larus canus (951)

Maillage : 17+1

Hivernage : 951

 

Störungen auf die Brutkolonie durch Spaziergänger erfolgen meist unwissentlich und durch falsches Verhalten, wie zum Beispiel durch das Verlassen der Wege.

 

La vaste anxiété de ce qui peut être, telle est la perpétuelle obsession du poëte. L'affreux baiser de la mort l'effleurait.

Je serai libre, seul et nu sous le ciel vaste ;
Je mêlerai mes cris aux cris du goéland ;
Je laisserai bondir mon cœur enthousiaste
Sans craindre qu’un regard en comprime l’élan.

 

Je voyais la frégate partant de Toulon dans la nuit…

Les choses sont les pores par où sort Dieu. L’univers le transpire. Pendant quelque temps encore, les matelots causèrent entre eux à demi-voix… Leur regard est comme un poignard mal émoussé…

Detached rocks stood upright afar, a collar of foam girding their bases, and repeating in its whiteness the plumage of a countless multitude of gulls that restlessly hovered about.

 ▓▒░░▒▓▓

Le Goéland cendré, qui fait partie des onze espèces de laridés présents – au moins à l’hivernage – en Île-de-France, est l’un des plus discrets.

17:13 Publié dans L'Atlas | Lien permanent | Commentaires (0)

———— morteau

Septain épiphanique 3, 6 janvier 2016

 

    saucisse de morteau

clémentine

au point d'une mâtine

dans cet étau

pamphlets sous le manteau

pas de sestine

les vers je m'en tartine

.

05:51 Publié dans Septains épiphaniques | Lien permanent | Commentaires (0)

vendredi, 08 janvier 2016

La cave, 1.

    Tout ne peut que commencer à la cave, à moins que ce ne soit par la salle de bains principale (qui n’est pas la plus spacieuse).

Commençons donc à la cave.

Il faut bien commencer.

La cave, réduit balayé de gravier coincé sous l’immense dalle, en bout de garage, contient des casiers très partiellement garnis — peu, mais d’excellentes bouteilles — mais aussi des balais, un sac de graines pour oiseaux, des pelles à déneiger, une tondeuse électrique à bras qui n’a encore que peu servi (la précédente, léguée par l’ancien propriétaire) est tombée en panne. J’en oublie, car je n’y suis pas : peu importe, un autre jour, je ferai l’inventaire aussi exhaustif que possible de ce maigre réduit.

Du gravier monte forcément une complainte.

Cette complainte tourne autour de deux phrases.

C'est un tramway nommé voie romaine. — Écrire ça en 2006, le 31 août même, sept ans avant, au jour près, l’inauguration du tramway tourangeau.

Une punaise dans le talon du pied droit. — C’est plutôt le beau mot d’équinoxe qui demanderait à clore ici et aujourd’hui – temporairement – le propos, peut-être parce que c’est le début de la saison des vendanges (→ cave) ou pour se rappeler, confusément, d’avoir rimé ce mot avec ninoxe.

Il fallait commencer, il ne faudra jamais finir.

10:45 Publié dans 16 en 16 | Lien permanent | Commentaires (0)

———— cinq tas

Septain épiphanique 2, 6 janvier 2016

 

    sur la table cinq tas

magazine

des devoirs en débine

or tu ôtas

dans notre galetas

(vision calcine)

ta chemise voisine

09:49 Publié dans Formes singulières, Septains épiphaniques | Lien permanent | Commentaires (0)

jeudi, 07 janvier 2016

———— de vent

Septain épiphanique 1, 6 janvier 2016

 

    maquillez-vous de vent

ô précieuses

virilités radieuses

dont l'air savant

si souvent énervant

rend malheureuses

les danses sous les yeuses

.

Le septain épiphanique, forme inventée le 6 janvier 2016 lors d'une surveillance dans l'amphi C du site Tanneurs (d'où son inclusion dans la rubrique peu étoffée des Septains amphibies), est fixe : 6/3/6/4/6/4/6 pour la métrique (nombre d'étudiants par rangée de bas en haut) et mffmmff pour les rimes (selon qu'un garçon ou une fille était assis en bout de rangée, du côté droit en regardant de bas en haut).

Une sous-forme, le septain épiphanique zénithal, tient compte de l'évolution de la disposition à midi ce 6 janvier, au bout de trois heures et après que quelques étudiants eurent rendu leurs copies. Le forme en est également fixe, selon le même schéma : 4/3/4/4/6/3/3 pour la métrique et fmfffff pour les rimes.

Les cinq premiers épiphaniques classiques et les deux premiers zénithaux ont été composés pendant la surveillance et seront publiés au rythme d'un par jour.

 

06:36 Publié dans Septains épiphaniques | Lien permanent | Commentaires (0)

mercredi, 06 janvier 2016

Lisa n'a plus les cheveux rouges

   Lisa n'a plus les cheveux rouges

mais Doriane a les cheveux verts

toujours verts en ce nouvel an

green unlike red is forever

    Lisa n'a plus les cheveux rouges

mais un anneau à la narine

oui, un anneau au nez lui pend

    Lisa n'a plus les cheveux rouges

mais porte un sweat-shirt avec des

Garfields bectant des hamburgers

& mon regard s'y enfarine

    Lisa n'a plus les cheveux rouges

mais Doriane a les cheveux verts

unlike red green is forever

15:15 Publié dans Sonnets de juin et d'après | Lien permanent | Commentaires (0)

dimanche, 03 janvier 2016

Cuire les pommes de terre.

(principe Interférences expliqué ici)

 

    — L'avion, tu as vu l'avion ?

— C'est une figure tourangelle.

— C'est mon copain Abel. Celui qui répare les tapis.

— Qu'il se fasse enlever la vessie.

— Il mériterait une bonne claque dans sa tronche.

— Compulsif.

— Il faut aussi que je fasse cuire les pommes de terre.

— Les frites ou des courgettes ?

— Ça brûle.

— C'est sûr qu'on n'aurait plus qu'à fermer.

 

16:04 Publié dans Interférences | Lien permanent | Commentaires (0)

samedi, 02 janvier 2016

Interférences

    Une nouvelle année est, bien sûr, l'occasion de mettre en place de nouvelles formes textuelles. (Il faudrait aussi poursuivre l'exploration des anciennes, surtout des à peine esquissées. Autre sujet.)

Ce carnétoile fêtera, le 6 février prochain, ses 10 ans. Peut-être reprendrai-je, en 2016, certains anciens chantiers, mais je préfère ne pas trop promettre ou anticiper...

Pour ce qui est donc des nouvelles formes, nous nous sommes promenés en famille, cet après-midi, à Tours. J'ai fait remarquer à mon fils aîné que je venais d'entendre un passant croisé dire à la personne qui l'accompagnait : « Il faut aussi que je fasse cuire les pommes de terre. » — Phrase à la fois d'une absolue banalité, et très singulière, ainsi isolée.

A*** a alors eu l'idée de tendre l'oreille et de mémoriser diverses phrases glanées au gré des rencontres de fortune. Nous les avons ensuite assemblées pour former le premier texte interférentiel, qui sera publié demain.

Il s'agit d'un centon de phrases entendues de façon aléatoire et assemblées ensuite dans un ordre non aléatoire. Les co-auteurs (mon fils A*** et moi-même) décident seulement de l'ordre. Les possibilités dramatiques (dialogiques ?) du texte obtenu sont soulignées par le recours aux tirets.

23:53 Publié dans Interférences | Lien permanent | Commentaires (0)