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samedi, 29 septembre 2007

Dès qu'Adam...

    Dès qu'Adam attaque le scherzo de la Sonate n° 2 opus 35 de Chopin, Marius Tincu aplatit dans l'en-but des Blacks. Joie sauvage, et ferveur sous le clavier. Plus tard encore, ça se gâte. Tout de noir vêtus, quelques gentlemen portent un cercueil.

13:39 Publié dans Unissons | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : Musique, Rugby, écriture

En vain et sans histoires

    Écoutant pour la dixième fois Buvant seul de Dick Annegarn, Araïna a décidé d’écrire enfin le chapitre de sa thèse qu’elle veut consacrer à ce texte, et principalement – d’ailleurs – à sa mise en musique, solo de guitare surtout. Sa thèse porte sur les rémanences contemporaines du poème de Li Po sur la compagnie de l’ombre de la lune, mais, comme elle s’est heurtée à quelques difficultés en traitant de la métamorphose de la lune en chien dans trois œuvres de langue espagnole, il lui semble utile de rebondir, comme on dit si vilainement. L’exilée du ciel, en un sens, c’est elle. Auprès d’elle, sous les draps, Irina se pochtronne, comme d’habitude, au whisky et au bartissol comme d’habitude.

Je repense, en évoquant ce couple d’ombres – Irina et Araïna –, à cette phrase énigmatique : « Ma coupe est vide (je suis abstème) et la lumière du chien est sombre. » (Les Larmes, trad. de Michel Lafon, éditions André Dimanche, 2000, p. 53). Le mot abstème existe-t-il ? je ne l’ai compris que par analogie avec l’anglais abstemious. S’il existe, pourquoi ne l’ai-je jamais rencontré ? Ce semble être une version savante de l’anglais “being a tea-totaller”. S’il n’existe pas, d’où vient le néologisme ? Du texte d’origine (César Aira) ? Du traducteur ? Pourquoi ? Ma voisine de lit m’a suggéré sobre, mais on peut boire de l’alcool et être sobre : abstème signifie, sans équivoque possible, que le narrateur ne boit jamais d’alcool.

Entre-temps, la nuit a envahi la pièce de vie, et, ici, au gîte de Kergaer, c’est le plein matin, même sous un timide rayon de soleil. Nous irons dans d’autres vies, d’autres eaux. (Au fait, l’artiste québécoise se nomme Marie-Josée Laframboise.)

07:06 Publié dans Les Murmures de Morminal | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : Littérature, écriture, Chanson, Musique

vendredi, 28 septembre 2007

Emballements, embrasements

    Je regarde la flamme qui danse. Toi, tu en as vu passer, dans ta vie, de ces gens petits ! Il fut ballé, sauté, dansé… Dès le premier coup d’œil, il fut enthousiasmé par la beauté brûlante d’Irina, et son sourire au premier chef.  Je regarde la flamme qui, telle une belle fille lente, se plie et se dérobe aux à-coups du vent, et porte la nuit autour d’elle comme une toque. Le copiste avait lu Llano au lieu de llanto. Pierre s’était pendu – par amour.

 

[ 19.08.2007. ]

07:05 Publié dans Dimanche pleurera | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Bretagne, écriture

jeudi, 27 septembre 2007

César : Aira :: Les : Larmes

    La matière de ce récit, ce sont les antipodes. Ce n’en est ni le sujet ni le thème, mais la matière. Récit écrit de manière à opérer sans cesse des renversements, des allées et des venues entre des registres et des régimes de sens diamétralement opposés, il ne bouleverse pas le lecteur ; plutôt, il le fait tourner en bourrique, ou en sablier. Sans cesse, le narrateur tourne les pensées, les jugements du lecteur de ce récit censément en train de se faire (mais, en fait, au fond, absolument préfabriqué), pour les inverser, les nier, les faire basculer – tout tournebouler. Si ça vous chante, vous pouvez aller saupoudrer ça de tropismes façon Nathalie Sarraute… mais la différence essentielle, c’est qu’ici rien n’est creusement. Non, tout est chatouillis, grattements à la surface, titillations. Le narrateur remue la vase en de nombreux points distincts de la mare, et très vite on ne perçoit plus même la forme de la mer. (Quelle analogie inepte, dirait-on.)

On en passe par le texte traduit. (On en passe toujours par le traducteur ; on en vient toujours au traducteur, comme on en vient aux mains. Le texte que l’on a lu, c’est celui du traducteur, un texte un peu ventriloque, sans doute beaucoup hanté par en dessous, du tréfonds. On en vient là, à ces mots tracés par Michel Lafon, s’ils lui furent dictés, intimés peut-être, par César Aira.)

« Il y avait un Japon en train de se poser doucement sur l’Argentine, mais sur toute l’Argentine, centimètre par centimètre, dans la douleur, une douleur suave, bleue, violette. » (p. 64)

 

Convoquez Borgès et Cortazar si vous le voulez – et vous aurez raison car leur influence saute aux yeux – mais tout ici n’est que collusion/collision, coïncidence/dissension, explosante/fixe, et surtout hallucination née de la longue contemplation d’un globe coloré ou d’une mappemonde comme celle que j’avais enfant au-dessus de mon lit.

À un moment, hors des virevoltes et pirouettes auxquelles le lecteur se soumet (nommons ce phénomène de lecture la loi d’accélération antipodale, si vous le voulez bien), il peut bien rêver même à certains mots par-delà leurs connotations immédiates déjà pas simples. Ainsi l’Argentine suggère à la mémoire un vers de Baudelaire, la gueule de Maradona bouclé en 1982, un quartier de Beauvais (qui devait ce nom à la fleur d’argent), un zézaiement de Boby Lapointe.

Passé par les antipodes comme on a pu être passé par les armes, le temps d’un aveu, l’esprit projette de lancer enfin, pour de vrai, le chantier des Tropographies.

 

[ 19 août 2007, Kergaer ]

07:04 Publié dans MOTS | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : Littérature, écriture, Bretagne

mercredi, 26 septembre 2007

1474 - Bon, pas bon, mauvais, moins pire...

    Jean II le Bon (qui, après avoir épousé Bonne de Luxembourg, eut des démêlés avec Charles le Mauvais (je n'invente rien, esprits médiocres)), fut fait prisonnier à la bataille de Poitiers le 19 septembre 1336. Une semaine plus tard, le 26 (il y a 771 ans), était-il déjà embastillé à la Tour de Londres (et non fumant des londrès à la Bastille) ?

20:00 Publié dans Hystéries historiées | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : Histoire, Fiction, écriture, Ligérienne

Éléments du mobilier

    Une crampe passagère (déjà passée) à la cuisse gauche, la flamme allongée de la bougie (dans un verre à pied), le vrombissement parfois ronronnant du frigo, le corps vissé ou rivé à cette table dans la vaste pièce de vie, il ne reste que deux pages sous la couverture rouge. Comme le shampooing qu’Irina a employé pour sa douche tout à l’heure – de marque Iroise (Araïna a passé sa journée à fredonner le refrain d’une chanson un peu bébête de Souchon) – sentait le fluor, elle craint qu’il lui pousse des dents sous le cuir chevelu. Elle fera brûler un cierge à l’ossuaire hollandais de Saint-Penthézec. Irina et Araïna se sont enlacées silencieusement sous la couette, et il reste toujours deux pages (à lire) sous la couverture rouge, et deux mouches près du luminaire violet, et un reflet diffracté dans la vitre du buffet de la cuisine, dans la vaste pièce de vie. Relevée, Araïna cherche à se rappeler le nom complet de l’artiste québécoise dont elle a lu, dans un prospectus quelconque, qu’elle exposait à Quimper : quelque chose Framboise ? Tourne en rond comme dans sa cage un loup à crinière. Elle est entièrement nue, dans la lumière d’hiver. Voudrait pleurer, pour tant de raisons pêle-mêle. Plie.

 

[ 19.08.2007. ]

13:36 Publié dans Pêle-mêle | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : Bretagne, écriture

vendredi, 21 septembre 2007

Javier : Tomeo :: Les ::: mystères : de ::: l’opéra

    Il faudra que j’aille rue Robert Pinget enterrer solennellement mon exemplaire des Mystères de l’opéra. Pour moi, depuis le choc causé par la lecture de L’Inquisitoire en 1992, tous les inquisitoires sont L’Inquisitoire. Ce n’est pas médire de Javier Tomeo, qui a signé là un livre singulier, surprenant comme toujours. Javier Tomeo ne fait jamais le même livre (pour le coup). Mais, pour moi, depuis le choc causé par la lecture de L’Inquisitoire en 1992, tous les inquisitoires sont L’Inquisitoire. Voilà.

Toutes les rues ne sont pas pour autant la rue Robert Pinget, brève bretelle sans bâtiment ni magasin ni entrepôt ni résidence ni rien, de sorte qu’aucun numéro ne lui est affecté – une rue sans numéro et donc sans adresse – une rue où jamais le facteur ne s’arrête.

 

Les Mystères de l’opéra est un roman élaboré comme une pièce de théâtre, avec didascalies, primauté du dialogue entre le « Juge » (ou gardien) et la soprano, mais aussi plusieurs notations ou signaux de nature foncièrement extra-théâtrales, comme le surgissement, ça et là, d’un narrateur omniscient. À le lire, on aimerait le traduire en livret : tout le texte appelle cette transposition, et c’est justement dans la résistance d’un faux récit qui toujours se dé-dramatise que réside une grande partie du plaisir de lecture.

6f1bd44e01b4f74a2b3c926e821519fd.jpgIl y a quelques clins d’œil du côté de Beckett (« C’est le souvenir de cette femme impossible qui vous a abîmé depuis des années dans cet antre pour dresser l’acte des foirages des autres ? », traduction de D. Laroutis, Bourgois, p. 147), le lien sémiotique qui se tisse entre l’énigme (Rätsel de l’aria wagnérienne, p. 107) et la foirade (le ratage : « vous aussi, vous êtes un raté », p. 146), la lutte entre l’esprit de système de la soprano et le goût du Juge pour le mystère.

« Des ennemis, en plus, dont l’existence pour nous est un mystère. » (p. 91)

La soprano a parlé de salopards, mais le Juge a dit « nous ». (On entend résonner les voix du Kafka de Marc Ducret : chez nous… chez nous… chez nous… chez nous… chez nous… chez nous… chez nous… chez nous… chez nous… chez nous… chez nous… chez nous… chez nous… chez nous… chez nous…) Nous, c’est aussi, d’un doigt léger puis – juste au dernier paragraphe – impérieux, le narrateur : « À partir d’ici nous n’en dirons pas plus. Nous ne nous mêlons pas de justice. » (p. 148)

Le Juge, si malsain que paraissent la plupart de ses principes, lance toutefois, aux fiévreux de mon espèce (mais il y en a d’autres, comme Madame de Véhesse), un appel rassurant : « Dans ce monde il faut tout compter. Oui, oui, ne me regardez pas de cette façon, il vaut mieux tout compter. Quantifier tout ce qui nous entoure : pendules, ampoules ou tubes fluorescents. » (p. 64)

 

Denise Laroutis est certainement une très bonne traductrice. (On peut savoir si un traducteur est mauvais sans même se reporter au texte original ; pour faire définitivement le tri entre bons et mauvais traducteurs, un bon texte n’est jamais qu’un début d’indice.) Pourquoi ? Un seul paragraphe, sans autre commentaire, suffira à éclaircir mon affirmation :

Brusquement, on n’entend plus la voix du violoncelle – comme si quelqu’un avait décidé de lui couper toutes les cordes d’un seul coup de ciseaux –, le Portier éternue une fois de plus et reste les yeux baissés. On dirait que le ressort de son cou s’est cassé pendant qu’il éternuait. À ce moment-là, les femmes qui sont de l’autre côté de la porte préfèrent se tenir coites. Elles n’ont pas la moindre idée de ce qui risque de se passer à partir de maintenant, mais ce dont elles sont toutes convaincues, c’est que Brigitte a encore le temps avant que soit remplie la coupe de l’amertume.     (p. 114, tripatouillages de polices ajoutés)

 

Comme pour les masques, comme pour les mensonges, comme pour le bal des vampires dans les armoires (ou des grimoires qui transpirent), l’opéra se travestit : « Une véritable soprano – une soprano tout-terrain – peut chanter les séguedilles de Carmen même habillée en Brunhilde ou en Salomé. » (p. 72)

Maintenant, le thé est noir ; il faut le boire. Respecte ton supérieur !

16:40 Publié dans Les Murmures de Morminal | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : Musique, Opéra, Littérature, Espagne, Jazz, Photographie, Ligérienne

exploser / perdu

    c'est comme une aubade

de regards

à la dérobade

 

quelques kamikazes

dorment dans

l'abri de branchages

 

un fou qui se fait

exploser

perdu dans la foule

 

d'autres horizons

s'éveillaient

déjà ce matin

 

a vaincu le feu

noirci la

page déchirée

 

ça c'est une aubaine

étancher

sa soif aux arènes

 

 

{ mardi déjà, 3 heures }

15:51 Publié dans Fil bleu : Tridents & autres textes brefs | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : Poésie, Ligérienne

mardi, 18 septembre 2007

si, le vent

    si le vent

parle sans violence

à la soif

 

si le vent

cherche des éclipses

fermentées

 

si le vent

refroidit aussi

le silence

 

le soleil

surprendra toujours

le salpêtre

 

& le vent

désenchanté de

toute nuit

 

suspendra

son souffle salé

à la soif.

 

12:50 Publié dans Fil bleu : Tridents & autres textes brefs | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : Poésie, Ligérienne

lundi, 17 septembre 2007

Sur basse de violon

Tormod Dalen
      

    Terpsichore

onagre de doigtés

rassurantes divinités qui

mêlent la lumière de leur chant

ostentatoire aux senteurs

délicates ...........

 

........... Délicates de ce baroque monument

assuré de pouvoir

lentement se hisser avec

entrain jusqu'aux

nues.

 

09:05 Publié dans Zézayant au zénith | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : Poésie

dimanche, 16 septembre 2007

Tentative d’y remédier

    Le frigo a des feulements.

Papier peint jaune et poutres, au salon murs blancs ; au plafond lambris et poutrelles formant dix longs rectangles de largeur variable.

(je ne m’explique pas comment, soudain, les larmes se sont transformées en ce travail d’écriture)

Le frigidaire frissonne, frétille, murmure. Plusieurs bouquets tous de fleurs fausses, abat-jour haut plutôt cosy ; les deux chaises d’enfant plaquées contre le mur de l’autre côté.

Tout chez lui avait fini par émaner des livres, et surtout par y ramener. Il avait installé son ordinateur – pour écrire et nous empêcher de tuer les mouches – à la table de la cuisine américaine.

Pleurer est si lent que même le mot, à son amorce, en est mouillé : el llanto. Crachats d’alpaga dans l’azur. Tout un bric-à-brac même pas solennel, bohême et foutraque, orne divers points de la vaste pièce de vie, comme autant de mouchetures.

(Douze années de félicité sans faille.)

 

Le réfrigérateur gémit, tremble, digère.

[19.08.2007]

17:05 Publié dans Droit de cité | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : Bretagne, Littérature, écriture

samedi, 15 septembre 2007

Texte banal avec 17 liens

    L'été a traversé les mois pour s'extasier au ciel de septembre. Les histoires toujours les mêmes recommencées prennent de l'ampleur, comme une plainte douce d'enfant en vert-de-gris. (Tant de variétés de vert, au moins vingt sur un chemin de cinq cent mètres, c'est à vous défriser les yeux.) L'été a battu son plein, et des paupières.

11:30 Publié dans Minimalistes | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : Fiction, écriture

vendredi, 14 septembre 2007

Novionates (454/20)

    Tends-toi comme un drapeau, comme une ramure ; tends tes bras, comme une rameuse, une fileuse d’algues, l’amante des roseaux. Tends-toi comme un tambour, gronde comme l’orage, envole-toi comme un silence. Il faut apprendre à aimer, aussi sur la terre labourée. Des orages monteront, qui n’auront pas d’autre souffle à briser. D’autres baisers te cueilleront, qui te trouveront tendue comme un drapeau, amarrée à un tronc, rouge et filandreuse comme la soie folle du séquoia. Des larmes perleront sur la soie, bazar dans la débâcle, à plus de trois mille signes l’heure. Tends ton cou, comme un tadorne.

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Alangui, l’oiseau blanc et vert forêt, comme de coton, refuse – triste et seigneurial – de se mêler au concert de caquetages et de commérages de ses presque congénères, sur cette mare où, douloureusement, à la ligne même de l’andante, flottent roseaux morts, algues en putréfaction, et où je vois ton visage, jonquille, se manger des yeux à ne rien fuir, sans coup férir, la peau près des paupières tendue comme un tambour alangui dans les eaux mornes de l’Orne.

#########

Pas tout ça, il faut encore prendre du bon temps de se pendre. Dans les champs noyés de pluie, avoir glané les épis de maïs boueux, en avoir arraché la paille, vu que la lumière du soleil jamais ne reviendrait. Il fallait en profiter pour. Rentrer chez soi, déposer les clayettes d’épis glanés sur la vieille table de ping-pong défoncée. On a rêvé d’un oiseau altier qui aurait soudain sifflé : tends-toi comme un drapeau.

11:10 Publié dans Novionates | Lien permanent | Commentaires (14) | Tags : Musique, écriture, Fiction, Ligérienne

lundi, 10 septembre 2007

l'habit & prend

    Le 10 septembre 1849, à trente-cinq ans, Elisabeth Eppinger reçoit l’habit et prend officiellement le nom de Sœur Alphonse-Marie.

20:00 Publié dans Hystéries historiées | Lien permanent | Commentaires (2)

Pointe du dard

    Peut-être le mieux, après tout, pour dire quelque chose de ce séjour en Bretagne, est-il de commencer par le mouton mort sur le tas de terre, au bord de cette petite route de campagne. C’était une route anodine, sans charme particulier, que l’on empruntait chaque jour pour rallier – du bourg avec son église, son calvaire et son bar-tabac – le gîte loué pour la semaine ; après près de trois kilomètres à voir se succéder les tournées vers autant de hameaux en Kerzunou et Kergaer, on tournait à gauche, et c’était là, après un coude, près d’une pauvre triade de bouleaux et un hangar rouillé, le gîte.

Or, le second soir, après avoir regardé pour la troisième fois le panneau de sortie de village dont la partie en langue bretonne ne différait que d’une seule lettre de la partie française, le champ et sa quarantaine de moutons laids vaguement marqués de croix rouges, les fermettes aux hangars sans charme, l’allée droite de peupliers qui elle seule pût retenir, sur ce trajet, l’attention, on avait vu, sur le côté gauche de la route, près d’une boîte à lettres, le cadavre évident d’un mouton posé sur un petit remblai terreux, ce qui n’avait pas manqué de susciter quelques questions.

Comme, dans un moment de répit, allongé sur le canapé à carreaux bleus et jaune clair du salon, j’avais lu les trente premières pages des Larmes de César Aira en écoutant la brise souffler entre les bâtisses du hameau, je m’étais demandé si le paysan qui avait ainsi posé son mouton mort – pour quoi d’ailleurs ? pour faciliter le chargement du bestiau crevé par l’équarrisseur ? – n’avait pas eu le sentiment de composer un rare bouquet, à l’instar du narrateur de ce récit cristallin.

Du gîte lui-même, il faudrait mettre hors de cause l’ameublement hétéroclite et fade (à l’exception de la commode et de l’armoire des deux chambres), ainsi que les trois reproductions artistiques du salon et de la salle à manger : un cadre minuscule avec quatre dessins de Sempé, un Gauguin méconnu (deux Bretonnes en coiffe traditionnelle devant un champ vert et une ferme) et un tableau de John Dyer apparemment intitulé Beside the Wave Gallery (encore que le mot « Gallery », placé là comme partie du titre, permette d’avoir quelques doutes). Non, si le narrateur des Larmes insistait – à juste titre – sur l’existence des poubelles comme objets réclamant d’être photographiés (et je ne pense pas seulement, pour ma part, à celles d’Urval), il fallait voir, dans ce mouton mort balancé sans ménagement sur une motte, un appel quasiment esthétique aux rares touristes demeurés, par ce froid de canard pis qu’automnal, dans la région après la mi-août.

À temps triste, offrande d’artiste ?

[ 19 août ]

18:49 Publié dans YYY | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Fiction, écriture, Bretagne, Finistère

dimanche, 09 septembre 2007

« la splendide dame blonde »

    « J’allais omettre de dire néanmoins que là, à la différence d’à peu près toutes les autres pièces de la maison, dont les murs étaient couverts de tableaux, on n’en voyait qu’un seul : un énorme portrait grandeur nature, de Lenbach, qui pendait, tel un retable d’autel, du mur derrière la table. 888fc85e1cea8a83b8a7ba97d8ef15d2.jpgLa splendide dame blonde qui y était représentée, debout, les épaules nues, un éventail dans sa main gantée, et, avec la traîne de le sa robe de soie blanche ramenée en avant pour faire ressortir la longueur de ses jambes et la plénitude de ses formes, n’était évidemment autre que la baronne Josette Artom de Susegana. On eût vraiment dit une reine. »

 

(Le Jardin des Finzi-Contini,

traduction de Michel Arnaud. Gallimard, pp. 181-2)

14:45 Publié dans Droit de cité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Peinture, Photographie, Italie, Littérature

samedi, 08 septembre 2007

Issam :: Krimi :: Trio :::: Églogues :: 3

    Trois des raisons pour lesquelles j’ai acheté ce disque le 28 août dernier :

  1. Son titre.
  2. La première composition s’appelle 28 août ; c’est le genre de signe du destin qu’on ne peut éviter.
  3. Il ne coûtait que trois euros.

 

Les signes mentent rarement, il faut croire. Grand album, enregistré en novembre 2004 par trois jazzmen français dont je n’avais jamais entendu parler : Issam Krimi, leader & compositeur de dix titres sur onze (‘claviers numériques et analogiques’) ; Han Sen Limtung (sax alto) ; Sébastien Brun (batterie). Antoine Hervé et Christophe Monniot les rejoignent, sur un et six morceaux respectivement : dis-moi qui tu hantes…

Premier compliment – la musique de ces trois jeunes musiciens ne rappelle rien, rien de très précis en tout cas. Bien sûr, on voit très bien dans quelle mouvance ils se situent, quelle esthétique ils privilégient. Si je balbutie des adjectifs comme saccadé, discontinu, vibrant, x noms pleuvent, bien sûr, mais, si ça signifie un peu quelque chose, ça ne dit rien du tout de cette musique.

D’ailleurs, il est très difficile d’en parler globalement, car, sur chaque composition, l’équilibre des forces au sein du trio varie beaucoup. Autrement dit, le trio parfois quatuor réinvente sans cesse la singularité (ce qui est pompeux, mais, très honnêtement, bien rare (D’ailleurs, on aime beaucoup certains musiciens, certaines formations de jazz notamment, alors que certains arrangements, certaines compositions, certains solos, certaines orchestrations se ressemblent furieusement (et je pourrais moi-même en citer des dizaines sans rien ôter à ces artistes de l’admiration que je leur porte).)). À titre de simple et seul exemple de cette singularité constamment réinventée, Les Bacchantes, qui fleure avec le jazz rock avant de lorgner du côté de la ballade, n’est comparable à rien : dans la première partie, la batterie autiste fore de son côté sans se soucier du duo frénétique des claviers et du saxophone ; ensuite, le sax lance un solo ponctué gentiment free, avec cymbales urbaines, sans perdre d’ouïe le thème ; puis percussion et Fender y vont franco mais en douceur, à explorer, me semble-t-il, l’une des pistes les plus discrètes ouvertes par le solo ponctué ; le clavier relance le thème, le sax danse un peu dans son coin et on s’en tient là, oreilles promenées aux quatre vents mais toujours dans le droit fil.

 

(Stop intempestif sur le bord du chemin.)

20:20 Publié dans J'Aurai Zig-Zagué | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : Jazz, Musique

« un petit nu masculin de De Pisis »

    « Ainsi, par la porte de communication, il me fut permis de voir déjà alors quelque chose de cette pièce : une partie du lit, sur lequel il y avait une couverture de laine à carreaux rouges et bleus, du type sportif, au pied du lit un pouf en cuir, c0674378215b415fe0b9962495e94c27.jpget, accroché au mur à côté de la porte qui y était encastrée et qui donnait dans la salle de bains, porte elle aussi entrouverte, un petit nu masculin de De Pisis encadré par une simple baguette claire. » (Le Jardin des Finzi-Contini, traduction de Michel Arnaud. Gallimard, p. 152)

 

C’est le seul nu masculin de Filippo de Pisis que j’aie pu dénicher sur la Toile, mais cela, évidemment, ne signifie rien, d’autant que ce nu du récit peut être tout à fait imaginaire, chimérique. Seul De Pisis (né Filippo Tibertelli) n’est pas inventé, à coup sûr. Il est mort en 1956, année qui voit Bassani devenir célèbre grâce aux Cinq histoires de Ferrare (si j’en crois le rabat de 2e de couverture de l’édition Gallimard).

Surtout, il a tout de même peint cet émouvant Portrait d’Allegro ; l’ami du narrateur, dans la chambre duquel se trouve le nu du récit, se prénomme Alberto. Rien n’aura de fond que le nom.

17:20 Publié dans Aujourd'hier | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Peinture, Littérature, Bassani, De Pisis, Ferrare

Le Prédateur des blogs

    Quand il a coupé le contact de sa Clio, Matthieu Mesplède-Morandini a entendu que la Nouvelle-Zélande menait 14 à 0 contre l'Italie au bout de huit minutes de jeu. Le temps qu'il achète diverses fournitures scolaires pour son fils aîné au supermercado et de reprendre le volant, les All Blacks avaient ajouté vingt-neuf points à l'addition. Pourtant, les courses n'avaient duré qu'à peine un quart d'heure.

À la caisse, Matthieu Mesplède-Morandini suivait un couple qui, songeant sans doute que la foule compacte du samedi après-midi autorise ce genre de fantaisie, avait eu la très bonne idée de vouloir payer ses achats en trois blocs distincts ; la jeune femme laissa tomber un cahier dont la première page était une sorte de C.V.. Matthieu Mesplède-Morandini vit alors qu'elle se nommait Marianne Martin et habitait à Monnaie. Il eut même le temps de mémoriser l'adresse électronique de l'imprudente.

Imprudente ? Oui, assurément, d'ignorer que Matthieu Mesplède-Morandini sert de modèle au psychopathe violeur du Prédateur des blogs...

(Un double Ricard, et vite !)

15:00 Publié dans MAS | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : Fiction, Ligérienne

« Le milan blanc est revenu »

    Hier je n’ai rien écrit. J’ai beaucoup lu ; rêvé ou contemplé plusieurs billets, rien écrit. Pour avoir lu le mot poussier dans la traduction française d’Il me faut aimer une pierre (et trouvé une citation de Balzac à l’appui de la définition de ce terme dans le dictionnaire), je me suis décidé ce matin à envisager d’écrire (cet après-midi).

Écrire par ces notes ou billets, quand je croyais y constituer assez solidement une œuvre, aura encore été le prétexte à bribes, fragments désunis, paragraphes au fil de la plume… bref, à la grande vérité de ma vie : velléité.

J’ai songé à me lancer enfin dans un grand livre, mais le projet finit par buter et achopper contre l’expérience passée de tant d’autres grands projets. Il faudrait commencer par la phrase « Le milan blanc est revenu », puis de l’élanion au busard, retrouver la trame de tant de petits souvenirs en marge de la grande histoire. Ah, à quoi bon, si j’en suis incapable ?

En attendant, faute de milan blanc roucoulent les tourterelles.

[03.08.07.]

08:00 Publié dans Pêle-mêle | Lien permanent | Commentaires (22) | Tags : Littérature, écriture

vendredi, 07 septembre 2007

The Bill Wells Octet vs Future Pilot A.K.A.

    Déjà, on ne comprend pas que l’octuor ne se compose que de sept musiciens – ou alors le leader, pianiste et bassiste, compte-t-il double ? Ensuite, on ne comprend pas la structure du projet : musique improvisée et enregistrée par un ensemble de 7/8 musiciens d’une part puis remixée par deux ou trois bidouilleurs – peut-être ce Sushil K. Dade qui paraît avoir participé aux compositions ?

Oui, ce pilote du futur nous désoriente.

 

La musique elle-même ? Du jazz électronique écossais*, sur un disque très bref, avec de belles mélodies (No Funerals This Morning) et pas mal de gimmicks un peu m’as-tu-vu et superfétatoires.

Piano & basse en soubassement : on pense à Mingus, sans rapport pourtant (encore que la première minute de Pink kitty, hein…).

 

Je ne connais pas la chanson de Gainsbourg Requiem pour un con, mais c’est un temps fort de l’album : introduction progressive de la section rythmique sur 54 secondes par trois tranches, puis pénétrante poignante échappée de trompette bouchée (Robert Henderson), avant que la guitare de Stevie Jackson n’hésite joliment entre frisottis et chatouillis, d’où la mélancolie plus terrible encore qui vous saisit dans le dialogue final entre flûte / trompette.

 

* I know, it just doesn’t obtain… Did it on purpose, though.

20:10 Publié dans J'Aurai Zig-Zagué | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Jazz, Musique, Ligérienne, écriture

Tout ça au décap’four

    Ce sera la dernière fois qu’on boit du rembeng.

Il s’ensuit un dialogue un peu théâtral entre l’épidémie de coqueluche et l’épidémie de roséole, qui se tirent la bourre. (La couverture à soi.) Nettoyer la margelle de la fenêtre au décap’four, mais ça va pas, la tronche ? Enfin, ce qui est fait est fait…

On parle d’appui, pas de margelle.

Le beau temps se barre, ce sont des soliloques pour les mendiants, et au fond du puits même l’eau brune gèle. Tout comme Ophélie, on se couche.

16:05 Publié dans Onagre 87 | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : Fiction, écriture

« malgré le changement de saison »

… pour servir à une reprise (future) de l’exégèse (minime) des Églogues :

 

« Et pourtant, malgré le changement de saison, tout avait continué à se dérouler de telle manière que j’avais pu me figurer que rien, en somme, n’était changé. » (Le Jardin des Finzi-Contini, traduction de Michel Arnaud. Gallimard, p. 126)

 

14:24 Publié dans Fall in Love | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : Littérature

La femelle du molosse

    Dans la salle de bains, après la douche froide, avoir smashé, d’une serviette sans rage, la femelle du moustique (qui n’est pas la femelle du requin). Vous m’avez gâché ma joie, ce que je suis dans l’impossibilité de vous pardonner. Il s’était gavé de brioche vendéenne, dans l’espoir de tomber malade et de manquer l’école. Longtemps j’ai confondu Oloron et Les Sables d’Olonne. Le molosse nous dévisageait, la mâchoire en bataille.

[01.08.07.]

08:00 Publié dans Dimanche pleurera | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Fiction, écriture

jeudi, 06 septembre 2007

7' 20"

    seulement le temps que dure Let's get to the nitty gritty seulement ça pas autrement paradoxe du thé : Le paradoxe du thé cuivres résonnants c'est que j'en bois là justement parce que réveillé très tôt après trop peu d'heures de sommeil je me suis senti la matinée les jambes lourdes alors café après filet & génoise puis deux heures plus tard l'envie de thé : D'où dans l'interstice électronique choisissant le thé vert que m'avait offert l'étudiante chinoise je me dis : Le thé vert est moins excitant, ce qui est faux bien entendu (c'est le thé rouge qui n'a pas de théine) : Enfin, je bois du thé alea jacta est et je veux finir de lire ce roman, pages 333-361, avant quatre heures, et pourquoi diable alors me suis-je interrompu : Est-ce d'avoir lu "Quelle malheur", énième coquille bourde ou faute de l'ouvrage de la plume pourtant d'un éminent traducteur d'avoir pensé chez Gallimard ni ailleurs il n'y a plus personne pour relire les textes ni on suppose pour les lire si l'éditeur se contrefout des textes qu'il édite pourquoi imputer au lectorat peau de chagrin l'affaiblissement sans cesse croissant de l'intérêt pour la littérature (ça, c'est foutrement mal écrit, on se croirait dans les Inrocks, enfin, je ne me corrige pas, solo de piano ou plutôt dialogue avec la batterie de Roy Brooks, il ne doit pas rester tant de temps que ça seulement le temps seulement tant et pas plus, les baffles sont derrière moi, et le cadran de la chaîne aussi : Je ne vais pas perdre vingt secondes à me retourner mais j'en perds quarante à écrire que je ne vais pas en perdre vingt à me retourner), et donc il n'est pas quatre heures (fini)

15:40 Publié dans Les Murmures de Morminal | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : Fiction, écriture

Du côté de l'eisteddfod

   Un papillon écru volète à la fenêtre. Deux rugueuses raies crème signalent désormais le début de la zone 30.

 

------ Si vous n'y comprenez rien, vous comprendrez encore mieux moins ici.

14:59 Publié dans Minimalistes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Fiction, écriture

Tombanx étourneau (Tout moi ça, 543/634)

    Aviateurs, oiseaux,

surtout le cliquetis des typewriters. (La liaison qu'imposait

"machines à écrire" aurait rompu le rythme.)

Cigognes dans des boîtes : Diga me. Vieux

téléphones vieux. Vieux très vieux appareils à

diapositives, tout ce bric-à-brac technique si

vieux vingt-sept ans après. C'est tout

VU ; c'est tout : MOI.

Images fixes de dindes, j'ai dégommé le vétérinaire. Un

ténor (aviateurs, oiseaux) barrit : c'est un : baryton.

Musicus Fallantly entre deux rideaux rouges chante en

gallois danse cette danse chantée en abyme. Tout cela me

fatigue. Jeux pythonesques

 

sur l'anachronisme.    Surfaces de lacs dans les landes

(d'Ecosse ?).

14:30 Publié dans ABC*ACB | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Fiction, écriture, Poésie

W"e"eket carse (Tout moi ça, 456/544)

    C'est tout moi, ça. J'ai emprunté ce matin une dizaine de livres, et acheté plusieurs autres, et, de retour à la maison, après filet de lieu jaune au foie gras & génoise tutti frutti, je me mets devant The Falls de Peter Greenaway, jamais regardé alors que je possède le DVD depuis trois ans. It's disgracesful too eat schips depuis trente-trois ans presque. Langues inventées, files de caravanes violettes ou vert pistache, taxinomie entre folle oisellerie et ornithologie fantasque

Après ça, quoi ? J'ouvrirai à Vouvray La cage aux oiseaux...?

14:01 Publié dans 410/500 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Fiction, écriture

Fêlure, un rien

    Jamais je n’aurais imaginé, écrit Mathieu Mesplède-Morandini (lui dont le nom fut ensuite abrégé en MuMM, sans rapport avec le champagne, dans la mesure où les seules relations qu’il entretînt jamais avec la Formule 1 consistèrent à dormir, d’aventure, dans un hôtel de cette désignation (et dans la mesure aussi où les seuls vins pétillants qu’il eût jamais bus à l’époque où ce surnom lui fut donné étaient de pâles crémants, d’affreux vouvrays de contrebande et peut-être même quelque blanquette de Limoux de derrière les fagots)), jamais je n’aurais imaginé, quand j’écrivais, en 1996, mon roman Frasques, en vue de le proposer aux éditions P.O.L., que, dans la parfaite dernière phrase du 68ème fragment de disaient les 2 fils, texte publié chez ce même éditeur quatre ans auparavant, se trouvait résumée une partie non négligeable du travail textuel de ce Frasques-là, et jamais non plus je n’aurais songé, écrit Mathieu Mesplède-Morandini, que je retrouverais encore une fois sur ma route des frasques sous la plume d’un auteur P.O.L. D’ailleurs, écrit Mathieu Mesplède-Morandini, qui est ce Nicolas Vatimbella, et a-t-il publié d’autres livres depuis ? Ce nom n’a-t-il pas tout du pseudonyme ? s’interroge Mathieu Mesplède-Morandini, perdu à corps rebroussé dans une expérience de la campagne que rien ne dénie ni n’affirme, et il lui traverse l’esprit, oui, il me traverse l’esprit, écrit Mathieu Mesplède-Morandini, que ce Vatimbella fut le premier nom de plume de Christine Montalbetti, à l’époque où elle publiait sa thèse, ou quoi d’autre encore, et donc je gagerais fort, écrit Mathieu Mesplède-Morandini, que ce Vatimbella prétendu (aux accents tantôt beckettiens tantôt chevillardiens (vérifier date de publication de Palafox – 1990 ? note en marge Mathieu Mesplède-Morandini) tantôt michaldiens (mais est-ce là l’adjectif approprié pour se référer à l’œuvre et à l’écriture même de Michaux ? s’interroge Mathieu Mesplède-Morandini)) ne soit qu’un masque de celle qui devait publier, quelques années plus tard, mais toujours à la P.O.L., aux côtés de Hubert Lucot (auteur en 1998 d’un roman intitulé Frasques), un bref mais somptueux texte, suivi de plusieurs autres, écrit Mathieu Mesplède-Morandini. Et si j’ai raté l’écriture de mes Frasques, cet hiver-là à Oxford, écrit Mathieu Mesplède-Morandini, c’est que je suis lent, désespérément lent à trouver mon rythme, à trouver une forme, à trouver le sujet, autant dire à trouver une forme dans mon rythme pour le sujet, et à faire autre chose, autrement qu’éparpiller des fragments, apprivoiser des fêlures, macérer des moisissures, pr od uire des filaments sans aucun point de paternité perdue ni retrouvée, puisque, écrit Mathieu Mesplède-Morandini, je peine à désespérément trouver mon rythme, une forme, le sujet (ou, suggère avec une accolade virile Mathieu Mesplède-Morandini, le rythme, ma forme, un sujet), à trouver un sujet pour ma forme avec le rythme.

 

[29.07.07.]

08:00 Publié dans Les Murmures de Morminal | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : Littérature, Fiction, écriture

mercredi, 05 septembre 2007

Aklop

    De son toucher aérien, Andreas Schiff donne éclat et beauté même à une page plutôt oubliable, comme la Polka pour piano de Smetana.

17:17 Publié dans Minimalistes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Musique, écriture

Histoire d’un livre à couverture rose

    Le petit livre à couverture rose – comme tant d’autres du même auteur – aura été lu par trois personnes au cours de ce seul mois de juillet : tout d’abord la mère, qui l’aura choisi par désoeuvrement, par défaut en quelque sorte, avant que le type ne le lise, lui, car il l’avait acheté en mars, avec toute une pile, et aime bien, de temps à autre, lire un texte d’Inoué Yasushi, cette prose plutôt classique, académique même, avec ses tons retenus, ses éclats soudains mais jamais plus vifs que le soleil ou le miroitement de l’eau après le plongeon d’un grèbe, et la grand-mère elle-même avait fini par se rabattre sur cette Histoire de ma mère (en fait, le récit de la sénilité gâteuse de la mère d’Inoué), car l’exemplaire, lu depuis trois jours déjà par le type (le pauvre type), avait été laissé là, sur les briques près de l’âtre, comme abandonné par une main nonchalante au bord d’être en proie au désordre, et donc, en moins de trois semaines, la couverture rose était passée de main en main, et le petit livre avait été lu par l’épouse, le mari et la grand-mère, successivement, ce qui avait pu alimenter quelques conversations, et d’autant mieux que le sujet en est universel. J’écris cela, et l’ordinateur repose sur la table basse en verre, où figurent seulement un livre (plus épais que l’Histoire de ma mère) et un ticket rose Zoo d’Asson Parc aux kangourous qui pourrait servir, un autre jour, une autre fois, de marque-pages à un autre exemplaire de la « Bibliothèque cosmopolite ».

[29.07.07.]

08:00 Publié dans MAS | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Littérature, écriture

mardi, 04 septembre 2007

Guet & garde

Paris, 4 septembre 1418. Pouvoir et commission au prévôt des marchands
de contraindre tous les habitants de Paris d'aller au guet et à la garde des
portes.
Paris, 4 septembre 1418. Pouvoir et commission au prévôt des marchands
de contraindre tous les habitants de Paris d'aller au guet et à la garde des
portes.
Paris, 4 septembre 1418. Pouvoir et commission au prévôt des marchands
de contraindre tous les habitants de Paris d'aller au guet et à la garde des
portes.
Paris, 4 septembre 1418. Pouvoir et commission au prévôt des marchands
de contraindre tous les habitants de Paris d'aller au guet et à la garde des
portes.

    Le 4 septembre 1418, le roi donna pouvoir et commission au prévôt des marchands de contraindre tous les habitants de Paris d'aller au guet et à la garde des portes.

(Source : Archives nationales des Monuments historiques, Titre VIII)

20:00 Publié dans Hystéries historiées | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Histoire

{ ma paresse }

À titre d’exemple, je n’ai écrit que la 1ère des 20 Novionates.

 

Voici ce que j'écrivais avant-hier, pour me plaindre de ma   paresse, de mon incapacité à écrire, ou maintenir le cap. Si je vous racontais que j'ai caressé, aujourd'hui, en poussant le landau, l'idée d'écrire vingt Ospianols qui seraient le double ombreux de ces mêmes Novionates, vous me prendrez certainement en pitié, sous votre aile protectrice,

aimés lecteurs.

14:18 Publié dans ABC*ACB | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : Fiction, écriture

Chevaux d’espace

    Ce dimanche du feu d’artifice, le soleil ne s’était toujours pas montré, à onze heures du matin pourtant, et il ne faisait même pas très chaud, au point que l’on dut ressortir gilets légers et vestes ouvertes pour la promenade du matin jusqu’à la prairie des chevaux ; c’est assis sur un tabouret de piano, à écrire sur la terrasse, que l’on put se rappeler qu’il n’y avait pas si longtemps les chevaux étaient, non une denrée, mais un spectacle rare au bord des routes de cette région. On pouvait sillonner les routes, même les chemins vicinaux, pendant des heures, sans jamais en voir. Or, à présent, en parcourant le kilomètre et demi qui séparait la maison de la statue de la Vierge marquant le carrefour avant d’arriver au bourg, on longeait pas moins de deux prés où se trouvaient (paissaient ? dit-on d’un cheval qu’il paît ?) respectivement six et trois chevaux. Cette nouvelle m od e se confirmait à chaque route, à chaque chemin. Désormais, les chevaux étaient plus fréquents que les vaches et les bœufs, ou même les moutons et les canards. Le mot de la fin, poétique, littéraire, et pédant même serait : cheval en orge.

[29.07.07.]

08:00 Publié dans Narines enfarinées | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : Fiction, écriture, Landes

lundi, 03 septembre 2007

Myra / Vatim

    Nos deux prénoms commencent par des voyelles, alors que ceux de nos parents commencent par des consonnes, disaient les 2 fils. Il a acheté le livre de Nicolas Vatimbella un peu au hasard, dans la caisse des livres bradés, avec tant d’autres, ce dernier jour de mars, et ne sait si le nom de l’écrivain est un pseudonyme, ni s’il a publié d’autres livres depuis (puisque ce volume-ci est une première édition). La plupart des noms de nos peluches commencent aussi par des consonnes, disaient les 2 fils. Il a passé les branches feuillues au broyeur, et coupé de minces baguettes, mille au moins, à la scie. Dans le récit, dès la première page, il est question des signes bleus sur les feuilles blanches lignées (et non quadrillées) ; dans l’un des premiers chapitres de Myra Breckinbridge (que je vais laisser en plan), il est aussi question du nombre de pages du carnet, et du nombre de lignes par page, au fil de l’écriture.

Dans disaient les 2 fils (bruissements d’abeilles, bourdonnements de mouches, fredonnements sans fin de bourdons), outre l’homographie – déjà présente (à ce que je crois, car je ne l’ai jamais lu) dans le titre d’un livre de Serge Doubrovsky (Fils, tout simplement) – entre la filiation et la filature, entre la paternité et le tissage, on remarque la récurrence des adjectifs futile et factice. Dans un lac artificiel se noient les feux d’artifice.

Les phrases – leur agencement, leur forme et même leur saveur – restent la clef de la lecture (texte incongru). Il y a aussi, dans Wert et la vie sans fin, ce passage relatif aux frasques (fragments, parole en archipel, découpures des nuages comme des copeaux dans la montagne). Bref, je mélange tout (furètement répétitif des feutres de couleur sur le papier, c’est déjà le 15ème coloriage depuis hier soir). Chaque minute a son épaisseur dont aucun système de notation ne peut rendre compte (exhaustivité impossible, grincement du relax Lafuma avant frottement frénétique des pieds frappés par une démangeaison). Comme le pas d’un pied-bot ou d’un cul-de-jatte, comme à petites touches la palette pointilliste d’un Seurat de pacotille, le bruit des doigts sur le clavier s’interrompt irrégulièrement pour des silences qui sont aussi chaque occurrence des lettres A ou Z. Le linge sec pouvait attendre.

M’étant arrêté à vingt-cinq pages de la fin du livre de Nicolas Vatimbella (trois heures de l’après-midi, soudaine crispation du gros orteil dans l’espadrille), je me rappelle que le nom du groupe britannique qui faisait la première partie de Depeche Mode à Bordeaux en 1990 (si mes souvenirs du récit que m’en avaient fait mes amies Karine et Dorothée ne sont pas faux) était Electribe 101, et que des spectateurs impatients avaient balancé des cannettes sur la chanteuse.

Jamais il n’a pris la peine de décrire les pièces d’ici ou d’autres demeures en se déplaçant avec son ordinateur portable de l’une à l’autre ; cela demanderait une forme d’ascèse, ou plus de solitude qu’il n’en a à sa disposition. Une nuit blanche ? Ou aller, de nuit toujours, jusqu’au potager où encore son père bine, bêche, creuse, fouille, fouaille et ahane…

[29.07.07.]

11:31 Publié dans Les Murmures de Morminal | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Littérature, écriture

dimanche, 02 septembre 2007

Furibarde

    Il faudrait que je me lance sérieusement dans l’écriture d’α & ω, au lieu de toujours tergiverser, temporiser, vaciller. Tout est en chantier, tout en plan. À titre d’exemple, je n’ai écrit que la 1ère des 20 Novionates. La deuxième partie de J’allaite le nouveau Kant traîne lamentablement, comme si c’était grand-chose, franchement, d’aligner des textes comportant cinquante-neuf signes. Je voudrais chroniquer, en quelque sorte, la moitié de ma discothèque de jazz. Non, tout ça ne ressemble à rien. Hier, je crois, je m’amusais à constater que le texte de 1295 signes que je venais de braire avait été écrit peu avant 19 heures 25 et qu’il était donc possible de le publier à cette heure précise là. Ras la coupe, et pourtant les nombres et les mots sont tout autant mon garde-fou que ma folie. Quand aussi écrirai-je des notules sur les poèmes de Guillevic que je relis, plus de dix ans après le temps fort de ma prime passion pour ce grand poète ? Entretemps j’aurai pondu ceci, qui tombe pile.

23:39 Publié dans Fièvre de nombres, Pêle-mêle | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : Littérature, Nombres, Poésie, écriture

Treize

    Rassurez-vous, ce n'est pas une reprise après Quatorze. Seulement, j'ai constaté que j'avais publié, il y a un an précisément, treize notes, et sans abuser autant des adverbes.

Pas de détresse, comment résister à l'onde polygraphe ?

Comment, surtout, publier, la grosse dizaine de billets qui est dans les cartons estivaux ?

19:00 Publié dans Ex abrupto | Lien permanent | Commentaires (0)

Septième neuvaine

    Il y a, sur le pare-brises de la Clio garée dans la cour, une buée froide de septembre. Dans l’air de la nuit, la fraîcheur se dit septembre. Chaque cliquetis de talon qui passe dans la rue est maquillé en septembre. Le bleu sombre des soirées, dès le repas fini, a coulé lentement de la palette de septembre. Insistant.

07:50 Publié dans J'allaite le nouveau Kant, II | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : Poésie, écriture

samedi, 01 septembre 2007

Là bas syzygie

    L’envie d’écrire n’a toujours pas repris le dessus, mais je n’ai pas non plus le moindre désir de publier l’un des (assez) nombreux textes écrits au cours des mois de juillet et d’août, notamment – frénétiquement – en deux ou trois jours dans le Finistère. Il n’a pas suffi de lire un mot inconnu jusqu’alors – syzygie – sous la plume labile, et agaçante d’allitérations et d’assonances en verbigérations, de Patrick Quillier. Ni de constater que, si les 19 tomes de la partie macropædia de la Britannica de 1975 récupérée au printemps tenaient pile sur une des étagères de la chambre d’amis, les 10 volumes de la micropædia et les 3 volumes d’annexes avaient dû, quant à eux, se dégotter quelque emplacement au-dessus de leurs nobles confrères, et même près de vieux numéros de Jazzman. Tout ça, parler pour ne rien dire, écrire pour ne rien écrire, écrire pour démentir l’absence d’envie d’écrire posée en postulat.

Si, tout de même : la grande, l’immense découverte du jour : des carnets entièrement dédiés au génial Saint-Pol Roux, Les Féeries intérieures. Je suis loin d’en avoir encore fait le tour, mais je vous en conseille vivement la fréquentation assidue. Ce peut être une porte d’entrée toute trouvée pour frétiller enfin dans cette onde vive et lisse, l’écriture avide du Magnifique.

19:25 Publié dans 1295 | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : Littérature, écriture, Langue française